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Le Maroc profite t-il de l'écrivain Mohammed Dib pour régler ses comptes avec l'Algérie ?

27-10-2017 18:52  Amine Bouali

En l'espace de 5 mois, pas moins de 2 colloques internationaux sur l'écrivain algérien Mohammed Dib, ont eu lieu au Maroc, pays frère et voisin.

La première manifestation s'est déroulée les 20 et 21 mai dernier à Marrakech, pour commémorer le 14e anniversaire de la disparition de l'auteur de la fameuse trilogie "Algérie". Y étaient présents notamment, Charles Bonn, un spécialiste reconnu de l'œuvre de Dib (il enseigne actuellement la littérature maghrébine d'expression française à l'université Lyon2) Paul Siblot, professeur émérite à l'université de Montpellier3, ainsi que des enseignants marocains comme Thami Benkirane de l'université de Fez ou Abdelaziz Amraoui de la faculté de Lettres de Safi.

La seconde rencontre intitulée "Mohammed Dib, quête de sens, quête d'appartenance" est programmée ce week-end (les jeudi 26 et vendredi 27 octobre) à l'université de Kenitra, en présence notamment de Charles Bonn toujours, de Hervé Samson du CNRS de Paris, Abdellah Alaoui Mdarhri de l'université de Rabat, Hafifa Brerhi de l'université d'Alger et en présence de Madame Catherine Dib, la fille de l'écrivain algérien.

La tenue de pas moins de 2 colloques sur Dib, en seulement 5 mois, au Maroc (et si on prend en compte la situation tendue qui existe entre ce pays et l'Algérie) invite à se poser des questions sur la véritable identité de la "muse" qui aurait inspiré ces initiatives culturelles marocaines et surtout d'essayer de deviner leur éventuel but réel et caché ?

Bien sûr, et par la force de son talent,  Mohammed Dib a acquis une dimension internationale mais il existe un fort soupçon, dans le cas qui nous interpelle ici, que l'écrivain algérien soit utilisé dans un objectif sournois de "règlement de compte" de nature politique.

Cette crainte d'une tentative de récupération de l'œuvre et du profil de Dib par des structures culturelles marocaines (encouragées par les services culturels de l'ambassade de France à Rabat, co-organisateurs des 2 colloques) n'aurait pas été envisagée si celles-ci s'étaient aussi intéressées avec la même assiduité, à des écrivains, à fortiori marocains, de la génération de Dib, comme Driss Chraïbi ou Mohammed Khaïr-Eddine (ce qui n'est pas le cas, vraisemblablement).

Né le 21 juillet 1920 à Tlemcen et décédé le 2 mai 2003 dans son appartement de La Celle Saint Cloud, dans la région parisienne (un logement que lui avait déniché à la fin des années 1950, son ami, le romancier et poète Louis Aragon) Mohammed Dib se sentait, au fur et à mesure du passage du temps, un citoyen du monde mais il avait gardé de son enfance tlemcenienne et son engagement pour la cause de son pays alors colonisé, une âme profondément algérienne.

Au fil des années, il s'était éloigné de ce qu'on peut appeler "l'étriquée idéologie du terroir" pour aller puiser son inspiration dans "l'humus universel". Pour cette raison, certains ont cru pouvoir penser que son oeuvre, profondément humaine, était propice à tous les détournements malhonnêtes et tous les "traquenards politiques". Il est d'ailleurs fort à parier que d'autres écrivains algériens "hors-de-la-norme" (mais n'ayant rien à voir avec Dib) comme Boualem Sansal ou Kamel Daoud aient à pâtir d'un sort encore plus pénible.

Pour mémoire, il est à rappeler également, le détournement de Saint Augustin, né à Thagaste (Souk-Ahras) le 13 novembre 354 après JC et décédé à Hippone (Annaba) le 28 août 430 après JC, par les tunisiens durant la décennie noire lorsqu'ils organisèrent un colloque international sur la pensée du philosophe et du théologien Algérien.



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