La Omra et le Hadj sont des marchés juteux qui attisent bien des appétits. C’est quelque chose comme 400 millions d’Euros pour 400.000 «omristes», selon les chiffres qui nous ont été communiqués par Tewfik Midoun, le président du SNAV Ouest.
Il se trouve, selon lui, que les agences de voyages, qui ont un savoir-faire professionnel sont quasiment exclues de l’opération qui se fait dans un climat d’opacité et de clientélisme. Tewfik Midoun se demande, à juste titre «pourquoi ce n’est pas le ministre du tourisme qui sélectionne les agences de voyages afin de compter sur ces dernières, d’officialiser la corporation et de mettre ainsi fin au bricolage.»
En fait, c’est le ministre des Affaires religieuses qui a le beau rôle pour ce qui est de la Omra et le Hadj. «Le ministre des Affaires religieuses oblige les agences agréées à valider leurs contrats par les ministres des Affaires étrangères, du Tourisme, du Commerce en négligeant le ministre des Finances, alors que ce dernier devrait être une un passage obligé, tout en sachant qu’Air Algérie programme des vols charter conçus pour les agences de voyages afin de procéder à la vente et à transporter les pèlerins à destination des lieux saints.»
"Tout ce fait dans un cadre informel"
S’agissant du paiement, les choses semblent ne pas se faire dans la stricte légalité. A en croire encore le président du SNAV-Ouest qui nous révèle que «toutes les prestations fournies par les agences de voyages en matière de voyages organisés pour l’étranger, ce que nous appelons Out Going, le paiement des factures pour les partenaires étrangers se fait dans un cadre informel.» Et qui dit cadre informel dit marché parallèle de la devise, ce qui rend fatalement le produit « excessif », de l’avis de professionnels. «Quel scandale ! Alors qu’en ce moment tout un programme du gouvernement a été mis en place pour justement lutter contre l'informel», s’indigne M.Midoun.
Et ce dernier de s’étonner encore : «Le cahier des charges précise que l'Etat subventionne l’opération pèlerinage et d'un autre côté l'office Hadj et Omra commissionne les agences de voyages à concurrence de 50% de son bénéfice. Comprenez-vous quelque chose ? »
Dans l’opération, l’Office du Hadj et de la Omra trouve bien son compte. Ce qui justifie un peu son existence, alors que normalement l’affaire relève des agences de voyage, comme cela se fait dans d’autres pays. Selon les chiffres du SNAV, l’Office gagnerait entre 40.000 Da et 50.000 Da par pèlerin. Une somme à multiplier par une moyenne de 32.000 pèlerins «C'est la seule raison du maintien du monopole et au même temps un manque à gagner pour les agences de voyages et un énorme préjudice pour l’économie du pays», dénonce encore M. Midoun.
Pour réduire la facture, il fait une proposition en invitant les responsables à réduire la durée du séjour dans les Lieux Saints entre 12 et 15 jours « comme le font d'autres agences en Europe, au Maroc, en Tunisie et dans d'autres pays musulmans", et se demande "pourquoi 30 jours et plus ? »
"Pillage des ressources de l'Etat"
« Vu la situation économique de notre pays, l'office Omra et Hadj devrait penser à l'intérêt de l'Algérie et non pas la ruiner. Il y'a d'autres moyens pour réussir cette opération en confiant cette prestation aux professionnels du tourisme », insiste à nouveau M. Midoun.
Selon lui, le ministre des Habous ainsi que l’Office devraient se retirer complètement de cette opération d’Omra et hadj et laisser les pèlerins eux-mêmes verser des devises aux Agences de voyages puisque l'histoire des 7500 euros est tolérée et cela pour préserver les caisses de l’Etat, au même titre que les pays musulmans. C’est la seule façon d’arrêter ce que le responsable du SNAV-Ouest appelle « pillage des ressources de l’Etat.»
Notre interlocuteur plaide pour un changement radical de politique avec une plus grande collaboration entre les vraies agences et le gouvernement. «Nous devrions collaborer ensemble puisque nous les professionnels connaissons mieux et nous sommes mieux à même d’orienter les décideurs car notre savoir-faire n’a pas à être négligé», dit-il à ce propos.
Quid alors de la location devise ? Tout le monde sait qu’elle est dérisoire. La contre-valeur de 15.000 dinars, soit 110 Euros, à peine de quoi payer un taxi de l’aéroport vers l’hôtel et encore. Aux yeux de notre interlocuteur, c’est un autre paradoxe, d’autant que la loi autorise la somme de 7500 euros par personne à chaque sortie. A titre comparatif, la location est de 3.000 euros en Tunisie et 4.000 euros au Maroc. En conséquence, le responsable du SNAV-Ouest en appelle une nouvelle fois aux autorités « afin de régulariser cette situation dans les plus brefs délais car l'informel reste de l'interdit.»