L'ONU a retiré hier, vendredi 17 mars, de son site internet, deux jours seulement après sa publication, un rapport rédigé par une de ses commissions régionales, la Cesao (Commission économique et sociale pour l'Asie occidentale) un document qui accuse Israël d'apartheid envers les Palestiniens.
Rédigé par deux spécialistes du droit international, de nationalité américaine, les professeurs Richard Falk (de l'université de Princeton) et Virginia Tilley (qui enseigne à l'université de l'Illinois) ce texte, interdit de publication donc, accusait Israël d'être coupable du crime d'apartheid : "Israël, y était-il écrit, a mis en place un régime d'apartheid qui institutionnalise de façon systématique l'oppression raciale et la domination du peuple palestinien dans sa totalité."
Les deux professeurs américains, bêtes noires honnies des autorités israéliennes, appelaient également la communauté internationale à soutenir le mouvement BDS ("boycott, désinvestissement, sanctions") une initiative de 2005 de la société civile palestinienne, qui bénéficie d'un écho mondial et qui prône le boycott de l'Etat sioniste (à l'instar des campagnes de boycott conduites, dans les années 80, contre le régime d'apartheid de l'ancienne Afrique du Sud).
À la suite du retrait de son rapport, la secrétaire exécutive de la Cesao, madame Rima Khalef, qui a été, durant les années 90, ministre de la planification puis premier-ministre adjoint de son pays, la Jordanie, a présenté sa démission pour protester contre les pressions qu'elle a subies de la part du Secrétaire général de l'ONU, M. Antonio Guterres :"M. Guterres m'a demandé avant-hier de retirer ce texte et il a insisté plusieurs fois. Je démissionne parce qu'il est de mon devoir de ne pas dissimuler un crime, je soutiens toutes les conclusions de ce rapport."
Cet acte de censure "qui va à l'encontre de tous les principes des Nations Unies" selon la réaction d'un collaborateur de la Cesao, a été obtenu à cause des fortes pressions des Etats-unis et d'Israël, évidemment.
C'est la première fois de l'histoire de l'ONU, rapporte le journal français le Monde " qu'un rapport publié au nom de l'organisation onusienne accuse l'Etat hébreu d'apartheid."
Le terme revient pourtant régulièrement, depuis une dizaine d'années, dans le débat sur la politique d'occupation israélienne. L'ancien président américain Jimmy Carter l'avait employé dans un livre paru en 2006, intitulé "Palestine, la paix, non l'apartheid" dans lequel il soutenait que les pratiques israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est étaient "pires que l'apartheid en Afrique du Sud."
Le journal "le Monde" rappelle que l'ancien secrétaire d'Etat américain John Kerry, en 2004, avertissait qu'Israël allait devenir un "État d'apartheid si une solution au conflit israélo-palestinien n'était pas trouvée rapidement."
Les autorités israéliennes, qui avaient comparé ce rapport de la Cesao "à une propagande nazie" se sont félicitées, bien sûr, de la démission de Mme Khalef et se sont réjouies que le rapport des professeurs américains ait été malheureusement jeté à la poubelle.