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Il appelle l’ANP à faire un coup d’Etat : A quoi joue Boukrouh ?

30-08-2017 18:06  Djamil Mesrer

S’il y a un homme politique qui ne se retient plus ces derniers jours c’est bien Noureddine Boukrouh. Interviews par-ci, contributions dans les journaux par là, longs posts sur sa page Facebook, remise au goût du jour de ses écrits sur le président… Il s’était même payé une polémique avec Said Sadi qui l’a sévèrement recadré soit dit en passant, sur le retrait des six candidats en 1999 pour se présenter dans les habits d’un anti Bouteflika invétéré prêt à jouer un rôle si...

Depuis quelques jours, il multiplie des sorties médiatiques en surfant opportunément sur la vague  enivrante d’un prétendu coup d’Etat en gestation contre le président de la république. Sa toute dernière «livraison» politique, publiée ce matin sur sa page Facebook, semble avoir franchi la ligne rouge. «Dans la réalité, l’Armée algérienne est devenue sous la chefferie du général Gaïd Salah l’armée du Président (...) écrit-il.

Tout le monde sait que Noureddine Boukrouh s’est placé, depuis le limogeage de l’ex Premier ministre Tebboune -auquel il se découvre une curieuse sympathie- aux avants postes de cette cohorte de fantassins politiques et médiatiques qui poussent au pourrissement.

Orphelins de l’ex premier ministre, limogé pour des raisons objectivement irrécusables, ils appellent publiquement l’armée à intervenir pour rétablir «leur ordre».  Mais là, l’ex ministre du Commerce de Bouteflika, qu'il a été, enfile quasiment l’uniforme du soldat pour réclamer de sa hiérarchie qu’elle opère un coup d’Etat contre le président de la république.

Stupeur au MDN

C’est clairement une incitation des officiers de l’armée à se démarquer des orientations de leur  chef, le général de corps Ahmed Gaid Salah «coupable» selon Boukrouh  de rester fidèle aux missions «républicaines» de l’institution.

En écrivant que l’ANP sous le commandement de Gaid Salah s’est mise au service du président, Noureddine Boukrouh a commis une double faute. D’abord et par la force de la Constitution, le président de la république est le chef suprême des armées. En l’occurrence, le chef d’état major ne peut rien entreprendre sans le feu vert du président qui en est le patron.

Ensuite, en jetant ainsi le général Gaid Salah en pâture, Boukrouh suggère aux autres officiers supérieurs que leur chef n’est pas digne de son statut. Le message subliminal est d’une froideur glaçante. Il s’agit ni plus ni moins que d’une tentative maladroite voire dangereuse de saper le moral de l’armée. C’est ainsi que le «brûlot» de Boukrouh est perçu aux Tagarins, nous a-t-on certifié.

Une source proche du MDN confie que l’ex responsable du Parti du renouveau algérien (PRA) est en train de «jouer avec le feu».  

Il est évident à travers son écrit que Boukrouh n’a pas digéré la récente mise au point du chef d’état major qui a réitéré le «caractère républicain» de l’armée. Lui, attendait manifestement autre chose de sa part qu’un tel attachement aux institutions et aux lois de la république.    

Il s’est désolé aujourd’hui en s’interrogeant : «Quel sens peuvent revêtir des déclarations d’allégeance à la République quand cette allégeance ne va pas au « peuple souverain».

Le costume et l’uniforme  

Bien qu’il se défende d’appeler à un coup d’Etat, Noureddine Boukrouh, le crie à tue tête à travers son texte. «je réitère que je n’appelle pas l’Armée à un coup d’Etat mais affirme en toute responsabilité que le pourrissement de la situation qui nous est faite sape de plus en plus le moral de la nation, érode l’autorité de l’Etat, pousse aux troubles sociaux et que, devant de tels dangers, il n’y a pas que le coup d’Etat comme moyen d’action»(sic).

C’est quoi donc cet autre moyen d’action pour effacer ce tableau horrible que brosse Boukrouh sinon l‘usage de la force (par l’armée bien sûr) pour rendre selon lui la «souveraineté au peuple» ?

On devine la gêne de M. Boukrouh d’enfiler le treillis d’un putschiste, lui le donneur de leçons sur les bons usages en politique et par-dessus tout, le moraliseur autoproclamé de la société. Il lui est difficile d’assumer politiquement son nouveau statut de propagandiste d’un certain courant qui, faute d’avoir des bataillons de partisans derrière lui, propose ses idées à la criée sur la place publique.  

L’incroyable contradiction de Noureddine Boukrouh réside dans le fait qu’il soit contraint de respecter ses convictions républicaines qu’il étale à longueur de pages de journaux, et dans le même temps, inciter l’armée à mettre fin justement à cet ordre républicain...

C’est le dilemme Cornélien d’un homme politique déboussolé, réduit à prêcher une chose et son contraire.  Boukrouh qui a habitué ses lecteurs à ses brillantes exégèses constitutionnelles, étonne aujourd’hui par sa volonté d’abattre cet ordre institutionnel bâti au pas de charge et au prix du sang et des larmes.   

Bizarre tout de même que M. Boukrouh pourfende aujourd’hui  la «légalité» et le «républicanisme de l’Armée» qu’il vénérait dans sa vie antérieure dans son envie irrépressible, de permettre au peuple «d’exercer sa souveraineté et de conquérir sa citoyenneté».

Quitte à user de chars et de baïonnettes et replacer l’Algérie dans l’atmosphère insurrectionnelle des années 90… !



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