Les autorités ajoutent de la rage à la colère. C’est ainsi qu’on peut décrire le climat provoqué par les conditions pour le moins absurdes imposées par l’ambassadeur d'Algérie en France, s’agissant de la collecte et de l’acheminement des dons de concentrateurs d’oxygène et autre matériel médical, au profit des victimes de la Covid-19, qui doivent recevoir au préalable l'onction des autorités consulaires après avoir déposé un dossier comportant l'identité des donateurs, la liste du matériel, le volume, le poids et...la valeur (sic). Une fois ces formalités accomplies, qui font fi de l'urgence de la situation, les dons seront acheminés non pas vers les citoyens mais vers ... la pharmacie centrale.
En effet, hier vendredi, l’ambassade d'Algérie en France a informé par un long communiqué, que les opérations de solidarité initiées par notre communauté à l’étranger et particulièrement en France seront désormais soumises à une « Autorisation d’acheminement des dons » et que les donateurs doivent prendre attache avec les représentations consulaires territorialement compétentes à l’effet de solliciter la délivrance de ce fameux sésame au profit... de la Pharmacie centrale qui sera « le seul et unique destinataire ».
« Ce communiqué de l’Ambassade d’Algérie en France est le moyen idoine de mettre un frein au salutaire et louable élan de solidarité de notre diaspora, l’Etat s’arroge d’être le destinataire exclusif des dons collectés par les citoyens au profit de leurs proches », dénonce pour sa part l’ancien député du RCD Hakim Saheb.
« Nous sonnes très en colère, leur bureaucratie va nous tuer tous », s’est emporté de son côté Lounès Djouadi maire de la commune de Timezrit qui pose la question suivante « Sont-ils des humains ? ».
« Merci pour votre générosité, merci pour votre solidarité, vous avez montré que l’Algérie bat dans votre cœur, mais gardez-les pour vous, ne les déposez surtout pas dans les consultats, car ils n’iront pas là où vous le voulez, laissez-nous mourir », se révolte Said Nemri sur sa page Facebook, parlant carrément d’un « coup d’état à la solidarité nationale ».
« Je veux envoyer un concentrateur à mon parent malade, pourquoi suis-je obligé de passer par les dédales bureaucratiques de l’Etat, et sachant pertinemment que ce matériel n'arrivera jamais à son domicile, alors que la Tunisie a surmonté cette épreuve grâce aux dons de sa diaspora sans la moindre entrave bureaucratique ? », interroge Hamid Méziane un autre internaute.
Et Mohamed d'écrire à son tour "Mais après leur réveil ils cherchent les moyens de compliquer par des procédures administratives afin de décourager toutes les initiatives à l'avenir.... Consultant l'article: "obéissent aux conditions.... autorisation d'acheminement... prendre attache avec les services consulaires... solliciter la délivrance de l'autorisation... les noms des donateurs.... les agréments.... la liste du matériel.... le volume... le poids... et pour enfin de compte le tout serait envoyé à une bureaucratie qui n'a pas pu gérer quelques bouteilles d'oxygène... Concernant les volontaires, et parmi eux des spécialistes, de vrais spécialistes, on imagine le temps qu'ils vont passer attendant à l'exterieur du bureau d'un administrateur véreux pour qu'il les envoie là où bon lui semble...Gérer les affaires du pays administrativement et c'est la catastrophe qui nous attend, si nous n'y sommes pas déjà".
Nadir Benhamiche de s'indigner "Mais il y a urgence ou pas ? C'est une question de vie ou de mort". "Au lieu d’accompagner et de faciliter au maximum l’acheminement des dons, on fait tout pour casser cet élan de solidarité" indique pour sa part Barouchi Toumi. "Ils ont trouvé un stratagème pour dissuader les généreux donateurs de nous aider" se désole Arezki Kahouadji. "Une gestion centralisée des années 70" relève Abdel Nasser Brahmi.
"Nos ambassades n'aiment pas trop se donner des peines pour initier ou accompagner des initiatives pour aider le pays. Elles mettent en évidence beaucoup plus les problèmes que les solutions" note Mohamed Benaboud.
La mobilisation réactive de la société civile, grâce aux réseaux sociaux qui sont son principal levier, n’était visiblement pas vue d’un bon œil par les autorités qui se voyaient prises de vitesse sur un dossier aussi sensible que la solidarité nationale.
D’où sans doute l’origine de cette décision procédurière et bureaucratique qui est dénoncée rageusement par les citoyens d'ici et d'ailleurs lesquels parlent de "coup d’état de l’Etat contre la solidarité citoyenne".
Si, face à l’élan de solidarité et de générosité des membres de notre communauté, il était peut être utile de mettre en place des mécanismes pour organiser et surtout accélérer l’arrivée des dons à un pays qui agonise, ce n’est assurément pas en bureaucratisant la procédure.
Car c’est ainsi qu’est perçue dans l’opinion la démarche du Gouvernement qui s’appuie sur le prétexte de la centralisation des dons pour, en fait, prendre le risque de casser sa dynamique, voire même de la tarir, car il y a un problème de confiance entre l’Etat et le citoyen.