Comme il fallait s'y attendre, la demande du royaume du Marocd’adhérer (et non pas de réintégrer puisqu’il avait quitté une autreorganisation que fut l’OUA) à l’Union Africaine (U.A) a été entérinée cet aprèsmidi par la conférence des chefs d'Etatde l'Union africaine réunis à Addis Abeba. Au moins 39 chefs d’Etats africains(sur les 54) membres du l’UA se sont prononcés pour le retour du Maroc au sein de l’UA. Et parmi eux l’Algérie.
Cela pourrait surprendre maisl’Algérie aura prouvé devant le monde qu’elle n’a aucun problème avec sonvoisin de l’ouest et qu’elle demeure attachée à la légalité. En l’occurrence,le Maroc est dans son bon droit de rejoindre l’Union Africaine dans la mesureoù il a rempli toutes les conditions exigées. Alger a donc habilement déjouéles pronostics en adoptant une attitude intelligente qui la met en conformité avec les idéaux qu’elledéfend.
Son ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra, estallé jusqu’à souhaiter la bienvenue au Maroc au sein de l’organisationcontinentale en précisant que l’Algérie n’a strictement aucune réserve sur leretour du royaume dans la communauté africaine. Soit. Mais le Maroc n’aura pasles coudées franches une fois à l’intérieur de l’U.A.
La leçon d’Alger
Et c’est là la principale condition à laquelle est soumis cenouveau venu. En effet l’acte constitutif de l’UA qui impose à tout pays membre de s’astreindre au «respect des frontières existant au moment de l’accession àl’indépendance» et «défendre la souveraineté,l’intégrité territoriale et l’indépendance de ses États membres».
Or, cette disposition phare de l’Union africaine estclairement foulée aux pieds par le Maroc qui colonise le territoire de larépublique sahraouie depuis 1975 alors que la RASD est membre à part entière del’organisation depuis 1982 ! Le parlement marocain a avalisé cet acteconstitutif au début de ce mois en toute connaissance de cause à savoir qu’ilest légalement tenu de défendre tous les membres de l’UA y compris la république sahraouie qu’il aannexée dans les faits.
Il s’est engagé aussi àne pas remettre en cause les frontières des pays membres. De fait, c’est unesituation cocasse en ce sens que la Constitution marocaine de 2011 stipule ladéfense de «l’intégrité territoriale [du royaume] dans ses frontières authentiques»,comprendre celles qui englobent le territoire du Sahara Occidental. Cetétat de fait crée un problème juridique quasi insoluble.
La stratégie du sous-marin
Dans sa stratégie, le Maroc procède par étapes. Il va d’abordsavourer son plaisir d’avoir (re)mis les pieds au sein de l’UA puis faire dulobbying avec ses nombreux amis notamment de la sphère francophone pour réunirles deux tiers des membres de l’organisation pour exiger l’amendement de l’acteconstitutif de l’Union Africaine qui lui permettrait, espère-t-il, de pouvoirvoter l’exclusion de la RASD.
L’Algérie et tous les pays qui soutiennent le Polisario et ledroit du peuple sahraoui à disposer de lui-même, n’ignorent pas ce plan duroyaume qui est un secret de polichinelle. Rabat va tout mettre en œuvre avec ses nombreux alliés en Afrique pour obtenir le vote d’une motion excluant laRASD. Mais ceci n’est simple que sur papier. Le «front du refus» ne restera pasles bras croisés. Le Maroc devra faire face à des poids aussi lourds quel’Algérie, le Nigeria et l’Afrique du sud.
Contrairement à son adhésion à l’UA, exclure la RASD ne serapas une partie de plaisir. Quoi qu’il ensoi, la vraie bataille de lobbying commence maintenant.