Les élections du 10 mai prochain vont-elles jeter les bases d’un régime républicain authentique ou déboucher sur une vulgaire mascarade comme d’habitude ? Aller voter garde-t-il un sens ? Si oui, sur quelles listes porter ses suffrages ? Ces questions dérangeantes, une grande partie de nos compatriotes se les pose. Elles sont le signe indiscutable que l’Algérie se porte mal, sinon très mal.
Très vraisemblablement, le changement effectif ne sera pas réalisé avec les élections de 10 mai prochain. L’Algérie est - et restera - un pays sous développé, à cause de l'arbitraire d'un pouvoir mafieux et assassin, corrompu et corrupteur. Elle est - et restera - insérée de manière organique dans le système de domination occidental. Elle ne s’est pas écartée - et ne s’écartera pas - des choix économiques désastreux de nos décideurs depuis des décennies. Immanquablement, ces choix continueront à creuser des inégalités insupportables entre les groupes sociaux et les régions. Ils continueront de marginaliser la jeunesse, en particulier les jeunes diplômés. Ils augmenteront toujours plus le rôle destructeur de l’affairisme et de la corruption.
Ce ne seront donc pas nos "amis américains" ou nos ‘’amis français’’, ni nos généraux et la plupart des partis politiques qu’ils ont fabriqués qui vont favoriser ou encourager le changement pacifique pour instaurer un État de droit. C’est très exactement le contraire qui se produit. Ces parasites n'interviennent que pour sauver les meubles. Pour barrer la route à une révolution menaçante, dévier sa trajectoire, briser son élan et enfin la dévoyer et la récupérer. C’est à travers des cartes souterraines que ces parasites d’intérieur et d’extérieur regardent l’Algérie.
Oui, je crains, sur tous ces sujets, rien d’important ne changera après le 10 mai. Que faire alors par rapport aux élections? S’en détourner ? S’en laver les mains? Rester chez soi et attendre une mouadjiza? Désespérer de son pays et de ses compatriotes? L’engagement politique exige la lucidité. Mais la lucidité n’est pas synonyme d’abandon ni de démission. Dans un processus révolutionnaire, la victoire ou l’échec sont des notions relatives.
Parce que la révolution est un processus, c’est-à-dire une transformation graduelle inscrite dans la durée. Les succès ou les revers doivent être rapportés à une chaîne de moments successifs, bornée aux deux extrémités par un point de départ et un point d’arrivée. Une même chose peut être considérée comme une défaite, si on la mesure à son éloignement par rapport au but vers lequel on tend ; ou comme une victoire, si l’on estime qu’elle a modifié favorablement les données initiales.
un combat qui n’en est qu’à ses premières phases
Il faut pourtant se déterminer et choisir, à l’intérieur de cet environnement passablement mouvant et incertain. Des milliers de listes sont en compétition, surtout des listes partisanes, mais aussi beaucoup de listes indépendantes. Dans le tas, il y a un grand nombre de candidats intègres et dévoués. Voter pour eux en conscience - et barrer la route aux partis qui se contenteront d’un simple ravalement de façade de l’ancien système - est un devoir civique élémentaire. Même si l’on est convaincu d’avance que l’opération électorale ne sera pas aussi "sincère et transparente" qu’on nous l’annonce.
A titre personnel et à tête haute, j’ai décidé de voter en faveur de la crédibilité, de l’intégrité et de la lucidité politique. Entre le boycott et la participation, mon choix est vite fait, car le boycott n’est pas une arme politique efficace en Algérie, puisqu’il n’a pas fait ses preuves lors des élections précédentes, boycottés pourtant par près de 80 % de la population. Pourquoi alors continuer à faire du boycott un moyen de lutte politique?
L'abstention n'a jamais été et ne le sera pas, le 10 mai prochain, une solution pour exprimer une contestation et nous l’avons vérifié tristement à plusieurs reprises. Le boycott en Algérie est, du coté des décideurs, l’occasion et le synonyme de bourrage des urnes et le gonflage systématique des chiffres, donc de la fraude électorale. Du coté des ‘’opposants’’ déclarés, il signifie tout simplement, l’absence d'esprit d'initiative, la passivité, l’obéissance, l’indifférence, l’absence d'esprit d'initiative, l’impuissance, la fuite de toute responsabilité individuelle, l’incapacité ou encore l’acceptation. L’Algérie de 2012, n’a besoin ni de fraudeurs ni de passifs. L’Algérie a besoin de voir tous ses enfants participer à son édification.
Kamel Bourenane
Canada