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Visite de la chancelière allemande Angela Merkel en Algérie : quelles perspectives pour la coopération algéro-allemande ?

14-09-2018 13:41  Pr Abderrahmane Mebtoul

Première économie de l’Union européenne,  la visite  de la  chancelière allemande Madame Angela MERKEL s’inscrit à la fois dans le cadre du renforcement de la coopération économique algéro-allemande mais également devant aborder les aspects du terrorisme dans la région  et les flux migratoires vers l'Europe.

1.-Quelle est la situation de l’économie allemande en 2017 ? 

Première économie de l’Union européenne, l’Allemagne est un État fédéral composé de 16 Länder  et  s’étend sur une superficie de  357 027 km² pour une population d’environ  82,5millions d’habitants (mars 2017) avec une population étrangère de plus de 9 millions. Elle a  comme capitale Berlin où nous avons comme villes principales : Hambourg, Munich, Cologne, Francfort-sur-le-Main, Stuttgart, Düsseldorf, Dortmund, Essen, Brême, Dresde, Leipzig, Hanovre, Nuremberg L’organisation institutionnelle de la République fédérale d’Allemagne se fonde sur la Loi fondamentale (Grundgesetz) adoptée le 23 mai 1949. Le chef de l’Etat, dont les fonctions sont essentiellement représentatives, est le Président de la République fédérale  Le chancelier fédéral est le chef de l’exécutif. Les 16 Länder (Etats fédérés) qui composent l’Allemagne disposent de compétences étendues en matière de police, d’éducation, d’environnement, de culture et d’administration. Chaque Land dispose d’un exécutif propre et d’un parlement régional (Landtag). Les principaux parties politiques sont  dominée par deux grands mouvementsla CDU-CSU et le SPD.  Mais nous avons d’autres partis qui émergent expliquant récemment la difficulté pour la chancelière de former un gouvernement devant aller vers des coalitions, le parti libéral-démocrate (FDP) , le parti des Vertsle parti Die Linke  solidement implanté dans les anciens Länder de l’Est où il réalise régulièrement des scores supérieurs à 20%, ainsi que dans le Land de Sarre, le parti l’AfD (Alternative für Deutschland) qui  est une formation populiste fondée en 2013 dans un contexte marqué par la crise de l’euro et le sauvetage financier de la Grèce  représenté dans 12 des 16 assemblées régionales, le parti a fait son entrée au Bundestag lors des élections législatives de septembre 2017, obtenant 94 députés et des scores supérieurs à 20% dans les Länder de l’ancienne RDA. Sur le plan économique, l’économie allemande se caractérise par quatre spécificités l’’industrie, qui représente une part significative du PIB restée quasi stable depuis 20 ans ;  des entreprises extrêmement internationalisées, l’OMC  la classant  en 2017 au troisième rang des exportateurs mondiaux, derrière la Chine et les États-Unis ; la densité de son tissu d’entreprises de taille moyenne et intermédiaire (le “Mittelstand”) innovantes et exportatrices et enfin la décentralisation avec la répartition des lieux de production et des centres de décision sur le territoire allemand. L’Allemagne poursuit depuis plusieurs années une politique budgétaire marquée par la volonté de réduire l’endettement et les déficits publics (dite « Schwarze Null »), conformément aux objectifs fixés par les traités européens. Pour 2017, le produit intérieur brut est estimé à : 3263 milliards d’euros  avec une croissance de 2,2% , le PIB par habitant de 39.454 euros et   les principaux secteur d ‘activité  sont : services à très haute technologie (69%) ; industrie (30,4%) ; agriculture (0,6%).  Le taux de chômage a été  de 5,7%  (février 2018) et en  moyenne pour 2017 le  taux d’inflation a été de  1,8%.. Sur le plan de l’équilibre de la balance commerciale, la balance commerciale  les exportations pour 2017 ont été de   1279 milliards d’euros et les  importations de 1034 milliards) où les principaux clients sont : : Etats-Unis(8,7%) ; France(8,2%) ; Chine(6,7%) ; Pays-Bas(6,7%) ; Royaume-Uni (6,6%)  et les principaux fournisseurs: Chine (9,7%), Pays-Bas (8,8%), France (6,1 %), Etats-Unis (5,9%), Italie (5,4 %)  L’Allemagne étant la  première puissance économique de l’Europe, dans le domaine international, elle entend se donner une place à la mesure de son poids économique et de son influence politique. Dans ce cadre, elle a toujours défendu son ,  engagement en faveur du partenariat transatlantique comme le montre a quasi-totalité de l’effort de défense allemand  qui est consacré à l’OTAN, tout en soutenant   le  projet de Partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement(TTIP). et ce malgré les tensions récentes avec les Etats Unis d’Amérique ( mesures projectionnistes) , l‘Allemagne   est étroitement liée aux Etats-Unis, tout en essayant pour des raisons économiques de maintenir un équilibre avec la Russie. Dans ses relations avec le reste du monde et notamment des pays émergents, l’Allemagne entretient des relations avec la Chine  où elle  est le premier investisseur européen et compte 5 000 entreprises et a signé avec l’Inde  un  « partenariat stratégique » .Récemment la chancelière a fait une tournée en Afrique, contient d’aven ir à enjeux multiples..L’Allemagne entend s’engager davantage en Afrique  afin de juguler   le risque terroriste et la crise migratoire  Au-delà des questions politiques et sécuritaires, le maintien d’importants liens économiques, notamment sur le volet « aide au développement » et aide humanitaire, et commerciaux, bien que l’Afrique ne représente encore que 2% du commerce extérieur allemand, est un élément déterminant de la relation de Berlin avec le continent.

2.- Densifier la coopération algéro-allemande

D’une superficie de 2.381.741 km2, ( 6,7 fois l’Allemagne )  mais plus de 90% de désert,  et une population au 01 janvier 2018 de  42,2 millions d’habitants, le  PIB de l’Algérie en termes réel a été d’environ 160 milliards de dollars en 2017,  le pays ayant subi des contrechocs économiques négatifs  depuis la mi 2014 avec la baisse du  cours des hydrocarbures qui contribuent directement et indirectement à 97/98% de ses entrées en devises. Dans son rapport semestriel sur les perspectives économiques mondiales, publié le 05 juin  2018  à Washington, la BM prévoit une croissance du Pib réel de l’Algérie à 3,5% en 2018, contre 3,6%, (-0,1 point) anticipé dans l’édition de janvier du rapport. La prévision actualisée de 3,5% reste toutefois identique à celle prévue par l’institution de Bretton Woods dans son rapport de suivi de la situation économique de la région Mena, publié en avril 2018. La BM a légèrement abaissé sa prévision pour 2019 à 2%, soit -0,5 point, comparé à la croissance projetée en janvier et a revu sa projection pour 2020 à 1,3% (-0,3 point). Les projections pour ces deux années restent également inchangées comparées à celles d’avril. L’Algérie  garde pourtant  une marge de  manœuvre  bien que ses réserves de change sont passées de 195 milliards de dollars fin 2014 à 97 milliards de dollars fin 2017.  Selon les statistiques douanières officielles du gouvernement,  les importations non inclus les servies qui fluctuent  entre 9/11 milliards de dollars/an,  sont  passées  de 47,08 milliards de dollars US en 2016 à 45,95 milliards de dollars US fin 2017. Les hydrocarbures ont représenté l’essentiel de nos exportations à l’étranger durant l’année 2017 avec une part de 94,54% du volume global des exportations, et une augmentation de 16,45% par rapport à l’année 2016. Les exportations « hors hydrocarbures », qui restent toujours marginales, avec seulement 5,46% du volume global des exportations soit l’équivalent de près de 1,89 milliard de Dollars US, ont enregistré une augmentation de 5,21% par rapport à l’année 2016. Les groupes de produits exportés en dehors des hydrocarbures sont constitués  Les pays de l’Union Européenne sont toujours les principaux partenaires de l’Algérie, avec les proportions respectives de 44,03% des importations et de 58,37% des exportations. Les principaux clients sont par ordre décroissant Italie 5,51 milliards de dollars ( 15,96%) –France 4,46 ( 12,92%)-Espagne 4,14(11,91%)- USA  3,39(9,76%)-Brésil 2,08 (5,99%)Turquie 1,96  (5,64%)-Pays Bas 1,84 (5,32%) et la Chine très loin avec un montant dérisoire de 695 millions  de dollars Les principaux fournisseurs  sont  la chine 8,30 milliards de dollars (18,08%)- la France 4,29 ( 9,35%)-l’Italie 3,75 (8,17%) –l’Allemagne 3,21 (7,00%)-l’Espagne 3,12 (6,81%)la Turquie 1,99 (4,35%)- les USA 1,81 (3,95%). Les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Allemagne ont évolué ainsi : 2011 2,56 milliards de dollars, 2,59 en 2012,  2,86 en 2013 , 3,77 en 2014 alors que les importations d’Allemagne sont dérisoires 498 millions de dollars en 2011, 238 en 2012, 317 en 2014. Les exportations allemandes vers l’Algérie se sont élevées selon le Ministère de l’économie à 887 millions en 2016  avec  une augmentation de 6% en 2017 donnant  environ 940 millions d’euros. Si l’on tient compte des 3,21 de dollars d’exportation 98% d’hydrocarbures, nous aurons un montant global pour 2017  d’environ 4,15 milliards de dollars contre certaines données statistiques recoupées d’environ 5 milliards de dollars en 2008 Ce déséquilibre a été largement compensé par les  achats d’armement  Selon le site de la radio allemande Deutsche Welle (DW), l’Algérie arrive en tête des importateurs d’armes allemandes en 2017 avec 1,36 milliard d’euros.. D’une manière générale, l’Algérie importe essentiellement de ce pays des équipements mécaniques, électriques, sidérurgiques, des véhicules, (ayant assisté récemment à l’installation d’une unité de montage),  et des produits chimiques et des graisses. Les exportations algériennes sont, à l’inverse, constituées essentiellement des hydrocarbures (pétrole et gaz) et dérivés. Or, selon plusieurs  études réalisées en Allemagne,   les  entreprises allemandes ont beaucoup de difficultés à pénétrer le marché algérien, en raison des lourdeurs bureaucratiques, plusieurs étapes à franchir. Malgré ces difficultés, il y a beaucoup d’entreprises allemandes qui sont installées en Algérie, notamment dans les produits de haute technologie qui sont de meilleure qualité. En plus des difficultés administratives, ils  rencontreraient  aussi des problèmes avec le secteur finance, comme les banques. comme  l’interdiction de transfert une partie des revenus à l’étranger.,  la règle du 49/51% généralisées à tous les secteurs , pouvant imaginer une minorité de blocage ,  régissant le code des investissements étrangers en Algérie constitue un frein pour les entreprises étrangères ,surtout les PMI/PME  innovantes désireuses d’investir . Or les  quelque 4400 entreprises de gouvernance familiale que compte l’Allemagne forment la colonne vertébrale de l’économie allemande, sans compter l’importante diaspora  en Allemagne, plutôt «bien intégrée» qui peut favoriser le couroi de transmission. Plusieurs centaines de  sociétés d'Outre- Rhin sont implantées en Algérie.  Elles évoluent dans différents secteurs d’activité entre autres l’énergie, les services, l’hydraulique, le transport et les technologies de la construction. Malgré ces échanges minimes loin des potentialités,  la volonté politique « partagée » par les deux capitales et leurs intérêts économiques et géostratégiques respectifs,  restent, malgré la crise économique et financière mondiale, favorables au renforcement des échanges économiques et de la coopération bilatérale dans plusieurs secteurs porteurs .L’objectif essentiel est de renforcer le partenariat, tout en étudiant le marché économique des deux pays afin de rechercher les opportunités de coopération en vue d’accroître les échanges commerciaux et la coopération bilatérale notamment dans le secteur de l’énergie (solaire, éolienne et photovoltaïque) et des technologies, l’Algérie, ayant accordé  pour les prochaines années la priorité aux énergies renouvelables. Aussi, parallèlement dans le cadre d’un partenariat gagnant/gagnant dans divers domaines en intégrant l’accumulation du savoir faire technologique et managérial des algériens, l’on pourrait aboutir à la conclusion de contrats de coopération avec des entreprises algériennes dans d’autres filières où l’Algérie a un avantage comparatif mondial ,où l’Allemagne par un  partenariat gagnant/gagnant  pourrait utiliser ses réseaux de commerces  internationaux,  car nous sommes à l’ère de la mondialisation.

En conclusion, les Allemands qui n’ont pas de contentieux historique avec l’Algérie, privilégiant le pragmatisme ont une vision stratégique l’Algérie pouvant leur servir de  porte de l’Afrique et par son développement au sein dune intégration de l’Afrique du Nord  favoriser le co-développement dans la région et atténuer les flux migratoires où seront abordés lors  de cette visite également les questions  sécuritaires.. Dans différentes rencontres, les entrepreneurs allemands  ont fait savoir souvent au gouvernement algérien  qu’ils étaient prêts à intensifier la coopération sous réserve de lever les contraintes au monde des affaires .loin d’une démarche  administrative,. L’économie allemande étant dominée par le secteur privé, et l’économie algérienne par la dominance de la bureaucratie qui produit la sphère informelle, un système financier et socio-éducatif à réformer, en plus de la levée du foncier,  il   appartient aux  Algériens de lever les obstacles à la mise en œuvre des affaires , supposant de profondes réformes structurelles, une bonne gouvernance et une visibilité et cohérence de la politique socio- économique. L’Algérie étant principalement exportateur d’hydrocarbures, il faut être également  conscient  que  l’Allemagne peut  s’approvisionner en pétrole et gaz de la Russie à travers les canalisations déjà opérationnelles En bref,  dans la pratique des affaires n’existant pas de sentiments, mais que des intérêts, espérons que la visite de la chancelière Angela Merkel puisse ’intensifier la coopération dans le cadre du respect mutuel. [email protected]



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