Algérie 1

Icon Collap
...

Urgence de profondes réformes de juin 2017 à avril 2019: les 12 défis du gouvernement Tebboune

30-05-2017 17:46  Pr Abderrahmane Mebtoul

Quelles perspectives  pour le  gouvernement  d’Abdelmadjid TEBBOUNE ?  Verra-t-on le statut quo de juin 2017 à avril 2019 (date de l'élection présidentielle),  comme le  stipulent certains médias internationaux, se concentrant uniquement sur  la  distribution de la rente pour apaiser transitoirement le front social sans  visions stratégiques, les ministres se confinant   dans la gestion  des  affaires courantes. D’autres prédisent le même scénario du gouvernement Belaid Abdesselam, qui  par sa gestion administrative autoritaire a conduit le pays droit au  FMI ,  ce que je ne souhaite pas pour l’avenir pays.  Ou, le grand souhait des Algériens, l’Algérie devant faire face aux véritables problèmes dont la résolution impliquera avec l’amenuisement des recettes d’hydrocarbures de profonds ajustements politiques, économiques et sociaux,  assistera-on à  de véritables réformes privilégiant l’avenir de l’Algérie et non les appétits partisans,  afin  de résoudre les problèmes fondamentaux  interdépendants au nombre de douze (12)  qui engagent l’avenir  tant de la société que de l’économie algérienne entre 2017/2020. Cette présente contribution  se veut un modeste éclairage pour le programme du gouvernement qu’il devra présente à l’APN.

1.-L’objectif stratégique devant méditer le fort  taux d’abstention et de bulletins nuls des élections du 04 mai 2017 (70%) , est de mettre en place des intermédiations politiques, sociales et économiques afin d’évier l’affrontement direct Etat-citoyens  permettant des mécanismes de dialogue permanents entre tous les  segments  politiques, économiques et sociaux   de la société sans exclusive, évitant toute  vision autoritaire du passé avec le monde qui est devenu une maison de verre avec la  révolution d’internet,  en fait s’ouvrir à la société par plus d’espaces de liberté.   Tous les segments de la société veulent leur part de rente et immédiatement quitte à conduire le pays au suicide collectif,   ne croyant  plus en les discours démagogiques et aux promesses sans lendemain, l’objectif est  de  rétablir la confiance  en l’avenir, et éviter ce divorce croissant Etat-citoyens par une  profonde moralisation de la  vie politique et économique de la société. 

2.- La mondialisation est une réalité  devant éviter les chimères ou l’on devra prendre en compte  les  impacts des mutations mondiales,  les   enjeux géostratégiques de la  région dont le Sahel,  l’intégration   du grand Maghreb et plus généralement de l’Afrique du Nord,  pont entre l’Europe et le continent Afrique,  à enjeux multiples,  dont les avantages comparatifs de notre pays à terme  devant s’inscrire dans cet espace  euro-méditerranéen et africain.  L’on devra analyser avec  réalisme  les  implications stratégiques de l’Accord d’Association qui lie l’Algérie à l’Europe applicable depuis le 01 septembre 2005, l’Algérie ayant eu un répit de trois années, le tarif douanier zéro étant prévu en 2000. Comment donc mettre en place des entreprises compétitives en termes de coût-qualité  à cet horizon ? Il en est de même  de  l’Accord futur qui sera encore plus contraignant  de l’adhésion  de l’Algérie à l’organisation mondiale du commerce – OMC- qui interdit  tout monopole et toute dualité des prix, notamment de l’énergie ?Dans ce cadre , il est urgent de corriger  toute la politique socio-économique  et notamment industrielle, incohérente, calquée sur le modèle utopique des années1970, l’ère mécanique dépassée,  ne tenant pas compte de la quatrième révolution économique mondiale. 

3.- La  réforme de l’école, ayant des implications pas seulement économiques mais culturelles et politiques   afin  de façonner le citoyen algérien de demain, qui connait une baisse alarmante; dans ce cadre comment intégrer notre émigration qui recèle d’importantes potentialités est la mère de toutes les réformes. Le système socio-éducatifs s’est bureaucratisée, du niveau du primaire au supérieur en passant par la formation professionnelle, posant la problématique  de la maîtrise  des nouvelles technologies, ayant  privilégié  la dominance de la quantité au détriment de  la qualité, allant vers 2 millions d’étudiants horizon 2020. Sans le primat à l’économie de la connaissance   tout programme est voué à l’échec et tout le reste discours (1).

4.- Loin des mesures administratives, il s’agira de combattre le système bureaucratique sclérosant  qui  décourage toute initiative créatrice, produisant  la sphère informelle   qui occupe plus de 50% de la superficie économique où tout se traite en cash  favorisant l’évasion fiscale, et plus de 50% d’emplois fonctionnant dans un  Etat de non Droit,   renvoyant à la refonte de l’Etat. Fondamentalement  cela passe par un débat sur le futur rôle de l’Etat, loin  du système centralisé jacobin, afin de  réaliser  une transition vers une économie de marché à finalité sociale,  devant concilier efficacité et une profonde justice sociale. 

5.- N’existant pas  d’économie de marché spécifique  qui est caractérisé par la dominance du secteur privé  productif , le secteur d’Etat devant évoluer dans un cadre concurrentiel, aborder franchement un programme daté de la démonopolisation( investissement neuf en faveur du secteur privé local et international )  et de la privatisation (cession totale ou partielle des actifs  existants),  processus complémentaire,  permettant la transition  la croissance économique, posant la problématique du rôle de l’Etat dans la  transition vers une économie de marché concurrentielle maitrisée. 

6.-Le problème de la régionalisation économique à ne pas confondre avec l’accroissement du nombre de wilayas  et  le régionalisme, devra   renforcer  la symbiose Etat-citoyens à travers l’implication des collectivités locales, qui doivent optimaliser  les  dépenses publiques, rationaliser la dépense,  afin de réaliser un regroupement autour de grands espaces économiques dont  le noyau sont des centres de formation professionnelles, les banques, les entreprises publiques et privées   et  des universités régionales  au sein d’éco-pôles régionaux afin de bâtir  des pôles d’excellence. 

7.- L’erreur serait de se  focaliser uniquement  de nouvelles organisations et  sur  des lois pour combler le vide , l’Algérie ayant connu des dizaines de nouvelles organisations notamment du secteur économique public sans impacts probants  et les meilleurs lois du monde mais rarement appliquées, la mise en place opérationnelle de la bonne gouvernance, impliquant la refonte de l’Etat, basée  non sur des relations  personnalisées mais sur  un Etat de Droit, l’indépendance réelle de la justice, favoriser la pluralité  des  médias avec un code de déontologie,  la lutte contre la corruption qui détruit la cohésion du tissu social et  fait fuir les investisseurs potentiels  et donc la mise en place d’institutions, s’adaptant tant aux mutations mondiales que locales  tenant compte de notre  anthropologie culturelle. 

8.- Aborder, sans tabou, et sans verser  dans des attaques et analyses pernicieuses, comme dans tous les pays démocratiques,  le rôle de l’armée et des services de sécurité dans un Etat de Droit  étant souhaitable une loi de programmation  de trois à cinq années ,  ainsi que le fonctionnement  de notre diplomatie, celle du Ministère des affaires étrangères et des ambassades bureaucratisés,  devant les adapter  aux nouvelles réalités  mondiales loin  des discours et prises de positions  des années 1970 qui risquent de marginaliser l'Algérie. 

9.- La gestion transparente  de la rente  de Sonatrach pilier de l’économie nationale, 97% des recettes en devises y compris les dérivés des hydrocarbures,  doit être une priorité  car  posant la problématique de la sécurité nationale  par une transparence  des coûts de production,  devant autonomiser la rente des hydrocarbures propriété de toute la collectivité nationale.  Un débat productif s’impose sur l’avenir du pétrole/gaz de schiste et ses effets sur l’environnement,  le niveau réserves des fossiles classiques,  et la période de leur épuisement tenant compte de la forte consommation intérieure, de l’évolution des prix internationaux, des nouvelles mutations énergétiques mondiales, posant  la problématique  des    subventions généralisées sans ciblage source d’injustice et de gaspillage des ressources financières .  L’on devra  pour réduire les couts combiner le solaire et le gaz torché gaspillé inutilement,  impulser l’efficacité énergétique  notamment avec les méthodes de construction traditionnelles, les nouvelles  technologies permettant d’économiser 25% d’énergie, de ciment et de rond à béton.

10.- N’existant pas une véritable politique salariale,  correspondant,  au niveau de la production et de la productivité, il s’agira d’aborder sereinement  le problème du marché du travail conciliant équité  et flexibilité  notamment du danger des sureffectifs de la  fonction publique (plus de 2,1 millions), où l’on ne résout pas les problèmes de l’emploi  par l’administration  ou des emplois  rentes fictifs. 

11.- Lié à l’amélioration du système  de santé  dont les hôpitaux connaissent une  gestion  défectueuse, malgré les compétences,  l’assainissement des caisses de retraite doivent être gérées dans la  transparence,  qui risquent  l’implosion  en cas de chute du cours des hydrocarbures devant combiner les systèmes de répartition et de capitalisation.   

12.- Dynamiser  la bourse des valeurs en léthargie depuis des décennies, la réforme du système financier, les banques publiques totalisant  plus de 90%  du crédit total octroyé se cantonnant dans le rôle de guichets administratifs. Dans ce cadre se demander  le pourquoi le non attrait de l’investissement direct étranger hors hydrocarbures  et la règle contraignante des 49/51% que l’on généralise aux secteurs stratégiques et non stratégiques qu’il s’agira  d’assouplir. Par ailleurs, résoudre, l’épineux problème du foncier tant agricole avec cette déperdition des meilleures terres,  qu’industriel, ce dernier que l’on livre à des prix exorbitants  et souvent  sans les commodités ;

En résumé,  évitons la sinistrose, l'Algérie a toutes les potentialités de sortie  de crise. Mais, méditons l’expérience négative de l’économie de guerre du gouvernement Belaid Abdesselam  du 08 juillet 1992 au 21 aout 1993, soutenu alors par  le  parti ultra gauchiste des travailleurs, qui a peu d’échos au niveau de  la société  qui  en mai 2017  a 11 députés  avec moins de  1% des voix,  qui a conduit  le  pays  droit à la cessation de  paiement.  Pour cela un changement de cap s'impose. Les taux d’intérêt bonifiés, le  pouvoir d’achat des Algériens autant que la  valeur du dinar, corrélée aux  réserves de change,  dépendent pour  70%  de la rente des hydrocarbures.  Les subventions et transferts sociaux directs et indirects  ayant représentés 27/30% du PIB en 2015/2016 ,  l’Etat peut –il continuer  dans cette voie   si le cours des hydrocarbures  baisse , l’Algérie  de 2010/2014   fonctionnant sur la base d’un  cours du baril supérieur à 100/110 dollars et 88 dollars en 2016 ?  Comme j’ai à le démontrer dans les interviews données à plusieurs organismes internationaux/nationaux ,  l’Algérie est à la croisée des chemins avec tous les scénarios possibles, afin de réaliser ou pas la transition d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures dans le  cadre des valeurs internationales se fondant sur l’entreprise,  son soubassement le savoir,  devant en prendre en compte la protection  de l’environnement et les industries d’avenir les industries  écologiques créatrice de valeur ajoutée et d’emplois productifs. Comme nous l‘ont enseigné  les fondateurs  de l’économie,,  devant éviter  tout déterminisme technique  existant un lien dialectique entre le Politique, l’Economique, le Social et le Culturel, largement influencé par la mondialisation.  Il y a lieu  de  distinguer la stabilité dynamique avec l’implication des citoyens  par la démocratie source de progrès économique et social, de la stabilité statique   source d‘immobilisme. Sans démocratie, un Etat de Droit et le retour à la confiance,  il ne peut y avoir de développement en ce monde turbulent et en perpétuel évolution où toute Nation qui n’avance pas recule.

 [email protected]

 (1)-voir site algerie1.com 26/05/2017 « Les nouveaux défis économiques du gouvernement d’Abdelmadjid Tebboune » -Voir interview du professeur Abderrahmane Mebtoul télévision Ennahar « sur les défis du gouvernement Tebboune » 26/05/2017- « sur l’impact des accords de Vienne »  quotidien gouvernemental horizon  et le quotidien arabophone Chorouk  dimanche  29/05/2017 – le professeur Mebtoul sera en débat le 29/05/2017 à 23h  - télévison Dzaiar News  sur ces sujets

 NB-Professeur Abderrahmane Mebtoul, Expert international – Docteur d’Etat en gestion (1974) - Directeur d’Etudes Ministère Energie/Sonatrach 1974/1979-1990/1995-2000/2007- A dirigé  l’audit, février 2015 sur les risques et opportunités du gaz de schiste pour le compte du gouvernement assisté de 23 experts internationaux. -Voir Etude du professeur Abderrahmane Mebtoul, parue à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI Paris France novembre 2011)- « la coopération Maghreb/ Europe face aux enjeux géostratégiques»- -« Pour un nouveau management stratégique de Sonatrach »- revue internationale HEC Montréal Canada (2010)- Conférence internationale ADAPES/ parlement français novembre 2013- « Les nouvelles mutations énergétiques mondiales » - « La stratégie gazière de l’Algérie face aux mutations mondiales » revue internationale gaz d’aujourd’hui (Paris France – janvier 2016). Voir également le débat 24 octobre 2014 entre le Pr Antoine Half,  ancien économiste en Chef au Secrétariat d’Energie US directeur prospective à l’AIE, et le Pr Abderrahmane Mebtoul- RFI Paris /France sur les perspectives de l’OPEP.



Voir tous les articles de la catégorie "Eclairage éco"