La lettre signée vendredi par le groupe des 19 jette un véritable trouble. Du moins par rapport à certains signataires connus pour être des amis, voire même des intimes du président Bouteflika. C’est le cas de madame Zohra Drif Bitat. Sa maison était aussi celle de Bouteflika qui s’y rendait régulièrement pendant les années de son bannissement au temps de Chadli.
C’est certainement en reconnaissance de cette amitié que le président Bouteflika, une fois revenu aux affaires, en a fait un membre inamovible du Conseil de la nation dont elle a été la vice-présidente. Outre sa qualité officielle de sénatrice, madame Drif s’est souvent vue confier des missions de représentation du président Bouteflika. C’est dire l’intensité de l’amitié qui lie Abdelaziz Bouteflika à la famille Bitat.
Le constat est valable également pour le Moudjahid Abdelkader Geroudj qui entretient des liens empreints de familiarité avec le président Bouteflika. Des liens en rapport avec leur appartenance à la même région d’origine, mais des liens surtout forgés pendant la guerre de libération. On se souvient tous du message très fort, avec des mots très émouvants, envoyé par le président Bouteflika à Abdelkader Guerroudj, après le décès de sa défunte et Moudjahida Jacqueline Gerroudj.
Pareil pour Khalida Toumi qui a noué des relations d’amitié avec Bouteflika, lorsqu’ils se rencontraient en compagnie d’autres personnalités chez madame Fatiha Boudiaf à Hydra. C’est d’ailleurs en souvenir de de cette proximité que Bouteflika, une fois président, avait "récupéré" Khalida qui venait d’être exclue du RCD. Bouteflika en a fait son indéboulonnable ministre de la culture pendant trois mandats, s’opposant résolument à toutes les tentatives de la faire « déguerpir » de l’éxécutif où elle n’était pas toujours en odeur de sainteté avec certains ténors du gouvernement et même avec certains walis.
Le même constat peut être fait pour Louisa Hanoune, qui avait accepté de devenir la bête noire de l’opposition en défendant le droit du président de briguer un quatrième mandat. En étant également vent debout contre tous ceux qui revendiquaient la mise en branle de l’article 88 de la constitution. Après la réélection du président Bouteflika, Louisa Hanoune, la patrone du PT est l’une des rares leaders de partis à être reçue chez lui, alors qu’il commençait à peine à se relever de son AVC.
Le Moudjahid et diplomate Mohamed Lemkami, en plus d’être un voisin de la famille Bouteflika à Hydra, compte parmi les amis du président. Une amitié qui remonte à l’époque où il était ambassadeur, sous la coupe de Bouteflika, alors chef de la diplomatie algérienne sous feu Houari Boumediene.
Une telle amitié, sachant ce que cette valeur représente pour les algériens, incline à penser que les signataires, du moins certains, sont de bonne foi (manipulés ?) et surtout loin de vouloir porter tort au président Bouteflika. A moins qu’ils ne soient schizophrènes.
Des passages entiers de la lettre sont dédiés à sa qualité de Moudjahid, homme d’Etat, patriote. Et encore cet autre passage où ils disent « loin de toute intention indélicate et dans le vif que vous en preniez connaissance, c’est contraints et forcés que nous rendons public cette lettre ».
D’où alors cette question que se posent pas mal d’observateurs : les signataires de la lettre ne cherchent-ils pas à travers leur initiative à dénoncer l'entourage du président et en particulier son frère ou remettre plutôt en question la légitimité du président ?
Parce que de là à dire que le président n'est pas au courant de la situation politique et économique du pays, il n'y a qu'un pas qu'eux seuls ont franchi. Qu'en savent-ils au juste sur les activités du président ? si c'est le président lui-même qui a ordonné ou donné son accord pour « l’abandon du droit de préemption de l’Etat algérien » ? Ce qui est en soi une bonne chose selon des spécialistes en économie consultés par notre journal, car affirment-ils "c'est la colonne vertébrale pour la stabilité économique du pays en matière d'investissements").
En quoi cela concerne t-il ce groupe des 19 ? le président de la république n'a-t-il pas la légitimité des urnes pour décider ce que bon lui semble ? Et pourquoi le président ne changerait pas d'avis quand les intérêts stratégiques de l'Etat, dont il est l'incarnation, le commandent ? Est ce que la Constitution lui intime, avant de prendre une quelconque décision, de consulter X ou Y ou de recevoir en audience X et Y ?
Ces 19 se croient investis de la mission de « libérer » le président Bouteflika, qui serait, selon eux, pris en otage par son entourage. Il faudra l'extraire donc des mains de ceux qui prennent des décisions en son nom, étant selon eux dans l'incapacité d'exercer ses fonctions et lui offrir ainsi une sortie honorable en déclarant une vacance du pouvoir et l’application de l’article 88 de la Constitution.
Malgré leurs précautions de langage, (loyauté, respect, considération...), il est indiscutable que cette lettre, rendue publique seulement 4 jours après son expédition, (délai considéré très court pour obtenir une audience présidentielle dans n'importe quel pays du monde), est avant tout politique, puisqu'elle induit des interrogations et des doutes légitimes quant aux intentions réelles des signataires et leurs arrières pensées.
Cette correspondance est donc pernicieuse, nuisible, délétère et nocive puisqu'elle concoure à tenter de déstabiliser voire ébranler les institutions et en particulier la première d'entre-elles en mêlant pêle-mêle incapacité, doutes, abandon de principes, entourage occulte, prise de décisions par autrui et autres balivernes.
le président de la république a été élu par le peuple algérien et il n'a de compte à rendre qu'au seul peuple algérien comme cela se pratique dans tous les pays.
Ces 19, à part quelques uns, ont commis une véritable félonie envers quelqu'un qui les a adulé, aidé, respecté, usant envers eux avec égards et bienveillance, pour certains maintenus en tant que ministre et sénatrice envers et contre tout, pour d'autres encouragés à poursuivre l'activité politique alors que ne disposant d'aucune base populaire.
Cela étant, il est impossible de faire abstraction de la manipulation de ce groupe que rien ne destine à se retrouver ensemble car étant de parcours et de sensibilités très différents. Ne sont-ils donc que la partie émergée, la partie visible d'une vaste conspiration ?