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Une justice frappée d’inertie

27-10-2015 14:38  Djamil Mesrer

Tout le monde se rappelle que le Président de la République a assigné, dès le début de son premier mandat, au secteur de la justice un ambitieux programme pour sa modernisation et sa mise au bon niveau de performance, mais force est de constater qu’il est encore un appareil bureaucratique, sclérosé et en décalage par rapport aux attentes de la société, des justiciables, de l’économie et de la société.

Les cinq faits récents ci-après illustreront largement l’état d’impéritie dans lequel se trouve encore, et pour longtemps hélas, ce secteur.

Il y a peu de temps, le ci-devant terroriste Madani Mezrag s’est permis de manquer de respect au Président de la République et de le menacer, à partir d’un plateau de télévision.

Tous les juristes savent que la législation pénale punit toute personne qui commet un outrage envers le Président de la République et porte atteinte à son autorité. Voilà que près d’un mois s’est écoulé depuis sans que le ministre de la justice et le parquet d’Alger ne songent à s’autosaisir pour poursuivre l’auteur de la bravade qui a indigné tous les citoyens qui savent que le délit commis par le prétendu repenti est puni par la loi. Cette défaillance de l’action publique est grave. Elle révèle que ceux dont la mission est de défendre la société à travers l’application de la loi sont en situation de carence. Voilà pour le premier fait.

Les réseaux sociaux ont alerté, avec preuves à l’appui que Mouloud Melzi, le fils du sulfureux Hamid Melzi, l’encore directeur général de la résidence d’Etat de Club des pins, vient d’acquérir, sans mise aux enchères, le célèbre restaurant, l’Hacienda, de Moretti fermé depuis 1990, ainsi que l’ancienne et réputée boite de nuit, la Sfina, mitoyenne de l’établissement précité, tous deux situés dans le périmètre de la Résidence de Moretti elle aussi administrée par Melzi père. Alors que la loi punit l’enrichissement illicite et l’accaparement frauduleux, qu’attendent les autorités judiciaires pour mettre en œuvre l’action publique et poursuivre les auteurs de ces actes délictueux ? Et de deux.

Au vu et au su de tout le monde, sauf du ministre, deux hauts magistrats, servant au sein du ministère de la justice, entretiennent une liaison hors mariage qui dure depuis longue date au grand dam de l’ensemble de son personnel masculin et féminin.

Il s’agit, selon de nombreux magistrats et hauts fonctionnaires du ministère de la justice, d’un directeur général récemment nommé à la tête de l’une de ses plus importantes structures, marié et père de famille, et de sa subordonnée, jeune divorcée mère d’un enfant. Les deux concernés sont tout le temps ensemble et ne ratent surtout pas l’occasion de l’être lors des missions à l’étranger. Il y a lieu de parier d'ailleurs, que samedi prochain, nos deux tourtereaux seront du voyage avec le ministre qui doit se déplacer à Saint-Pétersbourg (Russie). Une simple vérification du relevé des missions effectuées par le directeur général à l’étranger révèlera ce fait observé aussi bien par les fonctionnaires du ministère de la justice que ceux du ministère des affaires étrangères.

La liaison coupable de ces deux fonctionnaires, outre qu’elle fausse tous les rapports au sein du personnel de la direction générale dont il a la charge et peut-être du ministère dans son ensemble, est connue et réprouvée par tous les membres du corps judiciaire, car elle constitue une atteinte, de la part des deux amants, à la respectabilité du ministère de la justice, à la sacralité de la justice et aux bonnes mœurs en vigueur au sein de notre société attachée à la morale et aux préceptes de l’islam.

Qu’attend le ministre de la justice, garde des sceaux, pour mettre un terme à ces agissements immoraux et condamnables et rétablir au sein du ministère le respect rigoureux des valeurs d’intégrité morale, d’éthique et de droiture sur lesquelles repose le sacerdoce des magistrats ? Et de trois.

Quatrième fait : la justice prononce quotidiennement, dans des centaines d’affaires, des peines d’amendes souvent importantes contre des personnes physiques ou des sociétés, mais les montants fixés ne sont jamais ou rarement recouvrés par les juridictions parce que le secteur de la justice ne dispose toujours pas d’un service performant de recouvrement.

A cet égard, le secteur de la justice pèche par une carence avérée alors qu’en ces temps difficiles l’Etat a tant besoin de ressources financières.

Concernant la réforme du code de procédure pénale, nombre de magistrats auront remarqué que les nouvelles dispositions sont un plagiat du code de procédure pénale français, dans certains cas inadaptables à la réalité du terrain dans notre pays. Une réforme ne se décide pas dans le cabinet du ministre, selon les mêmes sources, elle doit faire l'objet d'un débat concernant les différents intervenants (avocats, magistrats, officiers de police judiciaire, organisation des droits de l'homme...)

Or, la réforme du code de procédure pénale s'est faite dans la précipitation, sans consultation ni débat, ni préparation des moyens matériels.

Le mouvement des magistrats ne se fait plus à des échéances précises, mais à toutes les périodes de l'année ce qui ne va pas sans engendrer des perturbations professionnelles mais aussi et surtout personnelles. Quant au nouveau découpage des entités judiciaires, il ne se justifie d'aucune manière selon les mêmes sources. Et de cinq.

Ces exemples et bien d’autres expliquent la désillusion de nombre de magistrats et de la majorité des citoyens qui ont perdu toute confiance en la justice qui devrait être revue de fond en comble. Il y a là matière à méditer sur ce sombre constat et surtout agir, car la justice est une partie intégrante de la colonne vertébrale de l’Etat de droit que l’on s’évertue à instaurer dans notre pays, depuis sa libération.



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