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Saignée des devises : un problème de sécurité nationale

06-08-2013 18:45  Rafik Benasseur

L’Etat algérien semble enfin avoir pris la mesure du danger que représente la saignée des devises provoquée par des importations massives et des transferts illicites de devises à l’étranger. Un danger non seulement économique mais pire encore, un vrai souci de sécurité nationale. Parce que si cette tendance affreusement haussière des importations qui devrait culminer à la rondelette somme de 60 milliards de dollars à la fin de l’année, le matelas des réserves de change va fondre comme neige au soleil d’ici une année.

Dans une économie basée exclusivement sur la rente des hydrocarbures, la chute des cours du brut, du reste prévue par l’agence internationale de l’énergie (AIE), couplée à des importations à tours de bras, vont assécher les quelques 200 milliards de dollars d’économie. Il est aisé d’imaginer les conséquences économiques, sociales et évidemment politiques d’un tel scénario du pire qui ne relève pourtant pas du domaine de l’impossible.

Record absolu des importations

C’est cette prise de conscience et la peur d’un tel cataclysme national que le gouvernement multiplie déclarations, instructions et initiatives pour tenter de changer cette politique mortelle pour l’économie nationale. On perçoit à travers ces différentes initiatives lancées par-ci par-là une espèce de peur panique de ce que l’irréparable se produise plus tôt que prévu. Le pic dangereusement «historique» de 60 milliards (mds) de dollars à la fin de l’année, contre 46,8 mds USD en 2012 qu’atteindront les importations algériennes a en effet de quoi choquer et inquiéter.

Le délégué général de l’Association des banques et des établissements financiers (ABEF), M. Abderrazak Trabelsi reconnaît que les importations augmentent «trop vite». Un euphémisme face à cette folie dépensière qui s’est emparée de la sphère économique réduite à une faune d’importateurs milliardaires qui se font des affaires juteuses grâce aux devises de la Banque d’Algérie pour des produits parfois bidon…

7 milliards de dollars de voitures !

La palme de cette évasion des capitaux qui ne dit pas son nom, revient aux importations de véhicules qui ont englouti prés de sept (07) milliards de dollars ! Un crime économique ! combien d'usines de fabrications de voitures on aurait pu monter rien qu'avec les dépenses d'une seule année ! Cette saignée est une véritable poule aux œufs d’or pour les deux constructeurs français notamment qui se partagent la part du lion des dollars algériens.

S’agissant des transferts des devises à l’étranger (l’exportation), les entreprise étrangères, françaises surtout, ont transféré durant les cinq premiers mois de l'année 30,448 milliards de dollars vers l'étranger, en hausse de 13,7% comparés à la même période de 2012 (26,76 mds de dollars). C’est la cote d’alerte ! Plus grave encore quand on sait que ces entreprises recourent à la «technique» bien rodée de la surfacturation de leurs importations pour faire sortir le maximum de devises algériennes. Une «spécialité» très française dont le scandale de Sanofi pris en flagrant délit et condamné ne constitue que la face apparente de l’iceberg de l’évasion des capitaux sous couvert d’idE…

Surfacturation : Une maladie de Sanofi…

Un tableau sombre que tout le monde connaît dans la sphère économique. Mais les connexions entre les milieux politiques et celui des affaires empêchait jusque là l’Etat de mette le holà. Il faut oser croire que le gouvernement soit cette fois, décidé à s’attaquer à ce marécage où nagent de gros poissons engrossés par la rapine et la fraude des deniers publics. C’est dire que la réunion de mercredi des responsables de l’association des banques, des Douanes, des impôts, du ministère du Commerce, et d’autres administrations autour du ministre des finances, devrait aboutir à une feuille de route.

Le Premier ministre, M. Abdelmalek Sellal, qui semblait découvrir ce phénomène avait appelé la semaine dernière le ministre des Finances à prendre «les mesures nécessaires pour freiner les transferts illicites des devises vers l'étranger». Mais sans remettre en cause le produit de la réflexion de tout ce beau monde, il serait naïf de croire que la question sera réglée par le seul effet magique des procédures qui sous-tendent une économie ouverte aux strictes lois du marché. Pour avoir été une rente inépuisable pour les pouvoirs politiques successifs, ces dérèglements économiques servent objectivement les régulations politiques en fonctions des rapports de force du moment. En l’occurrence, avril 2014 c’est demain. Et on semble se préparer déjà…



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