La surprenante sortie médiatique du secrétaire général du front de libération nationale (FLN) M. Amar Saadani a eu l'effet d'un séisme politique en Algérie. Responsables de partis, acteurs politiques, journalistes et simples anonymes ont majoritairement condamnés cette charge d'une rare violence de Saadani contre le Département du renseignement et de la sécurité (DRS) et son chef, le général de corps d'armée, Mohamed Mediène alias Toufik.

Et, pour une fois, c'est un civil qui plus est chef de la première force politique en Algérie sur laquelle s'appuie le pouvoir qui dégaine contre un général des services du renseignement ! C'est assurément une grande première dans les annales politiques algériennes depuis l'indépendance du pays. Les observateurs sont encore groggy par la violence du propos de Saadani qui n'est pourtant pas un "poids lourd" de la politique.

On ne s'attaque pas en effet avec autant de désinvolture au patron des "services". Le coup est très osé bien que ces trois lettre "DRS", qui faisaient tressaillir de peur jadis soient tombées ces derniers temps dans le domaine du presque banal. Mais sur ce coup là, force est d'admettre que le chef du FLN s'en est pris personnellement au puissant général de corps d'armée dont les algériens ne retiennent qu'une vague photo d'époque.

Qui est ce qui a donc fait courir Saadani ? D'où est ce qu'il tient ce courage de s'attaquer aussi publiquement à un homme qui a pris une dimension presque mythique dans le paysage politico-militaire algérien ? S'il est vrai que de larges secteurs de l'opinion, n'apprécient pas forcément le contrôle envahissant de la société par le DRS, ils n'apprécient pas non plus que les services secrets du pays soient traînés dans le boue comme la fait maladroitement le chef contesté du FLN.

Il a crûment jeté le discrédit sur une entité où il n y a pas que du mauvais. Faut-il rappeler du reste que ce même Saadani sans doute missionné, doit son poste voire son intrusion dans le paysage politique à ces services dirigés par le général Toufik.

Que pense le MDN ?

Pourquoi a-t-il attendu 2014 pour lancer sa grenade ? Il serait politiquement naïf de penser une seconde que la sortie médiatique de Amar Saadani soit un acte isolé. A trois mois de la présidentielle qui s'annonce très incertaine compte tenu du flou qui entoure la candidature de Bouteflika, le coup de Saadani parait politiquement motivé de par sa proximité avec le clan présidentiel.

Tous les observateurs s'accordent à souligner que le responsable du FLN voulait à travers sa violente charge désigner l'homme qui ne serait pas favorable à un 4ème mandat. Il serait intéressant de savoir si le ministère de la défense va réagir ou pas à cette attaque frontale contre un de ses plus hauts cadres.

En effet, pour nettement moins grave que cela, le département de Gaid Salah a fermement rappelé à l'ordre des journalistes pour leurs écrits jugés controversés. Et si le MDN décide de rendre public un communiqué, sûrement que sa substance donnera lieu à des interprétations politiques liées à la présidentielle. Quoi qu'il en soit, une mise au point s'impose au risque de créer un grave précédent.