En installant solennellement aujourd’hui la commission d’experts chargée d’élaborer un projet de révision constitutionnelle, le président de la république aura coupé court aux spéculations. D’aucuns pensaient en effet que ce projet annoncé il y a deux années à l’occasion d’un discours à la nation dans le feu du printemps arabe, était définitivement rangé dans les tiroirs de la république du moins pour l’année en court.
On sait désormais que la présidentielle d’avril 2014 sera organisée conformément aux nouvelles dispositions de la nouvelle constitution.
Qu’il s’agisse de la durée du mandat présidentiel ou du nombre de mandats auquel un président élu ouvrira droit, la nouvelle loi fondamentale devrait en fixer les règles du jeu. Ceci, d’autant plus que ces deux questions constituent l’abcès de fixation de la classe politique depuis que le président avait décidé via un amendement de la constitution en décembre 2008 de faire sauter le verrou de la limitation des mandats présidentiels.
Une procédure qui, au-delà de la manière peu cavalière- adoubée par le seul parlement -n‘a pas manqué de susciter les critiques acerbes des acteurs politiques qui ont crié à une mise à mort du sacro-saint principe démocratique de l’alternance au pouvoir. Il est donc sûr que cette révision constitutionnelle dont le coup de pioche a été donné aujourd’hui devra mettre un terme à une grosse polémique.
Lifting ou toilettage global ?
Reste à connaître dans quel sens cela devrait se faire. Va-t-on revenir à l’option de deux mandats présidentiels de cinq ans ? Ou alors les experts vont–il proposer d’allonger la durée d’un seul mandat à sept ans pour permettre au président élu de s’assurer de rester, quoi qu’il arrive, 14 ans au pouvoir ?
Le Premier ministre qui a installé la commission aujourd’hui n’en a évidemment donné aucune précision sinon que cette révision se fera «sans aucun préalable». Comprendre que les experts auront toute latitude de réfléchir sur la meilleure mouture à leurs yeux. Sauf que le dernier mot revient au président de la république qui leur a déjà remis une feuille de route qui résume les propositions formulée par les acteurs politiques au termes des consultations conduites par la commission Touati-Bensalah.
La formule magique pour Bouteflika
Certaines sources bien informées croient savoir tout de même que l’on s’acheminerait vers l’option de deux mandats de sept ans chacun. Cette formule a ceci de magique qu’elle permet à l’actuel président de rester encore deux années supplémentaire sans avoir à supporter un autre mandat complet de cinq ans.
Elle permet aussi au pouvoir de préparer doucement un successeur en 2016 qui pourrait être un vice-président que la nouvelle constitution instituerait.
De la sorte, le régime s’offrira un bol d’air frais dans la mesure où il n’aura pas à se payer une crise politique liée au 4ème mandat dés lors que Bouteflika sera automatiquement adoubé pour deux années supplémentaire. Seulement, il y a problème. Si la formule est adoptée cela voudrait dire qu’il n' y aurait même pas d’élections présidentielles en 2014 !
On imagine mal en effet que Bouteflika concourre pour une rallonge de deux années de son 3ème mandat et que ses concurrents le feraient pour un mandat de sept ans…
A moins qu’un autre homme du sérail ne soit «décongelé» à la dernière minute pour défendre les couleurs du régime dans la peau d’un nouvel «homme du consensus», qui aurait la particularité d’avoir bonne presse y compris dans l’opposition.
Mais la scène politique ne donne pas de signaux accréditant une telle hypothèse. La réactivation des comités de soutien de Bouteflika à travers notamment les équipes de football n’est certainement pas faite pour amuser la galerie.