Au moment où le FMI craint une bulle financière entre 2017/2018, une crise plus grave que celle de d’octobre 2008, un cours tant du Wit (30,03 dollars le 21 janvier 2016) que du Brent (29,64 dollars à 18h, ce dernier ayant atteint la barre de 27 dollars la matinée), se tient les 20/21 janvier 2016 le forum Economique mondial, qui réunit les grands de ce monde, plus de 40 chefs d’Etat et 2 500 leaders du monde des affaires et de la société, quelles perspectives pour l’Algérie ?
1.-Le Forum économique mondial (World Economic Forum- WEF), qui se tient le 20/23 janvier 2016 à Davos pour sa 46ème édition devrait voir la participation d’une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement, ainsi que des opérateurs et banquiers du monde, dont le président du FMI et de la banque mondiale. Parmi les personnalités politiques, il est prévu l’on verra la présence du président allemand Joachim Gauck, le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden qui sera accompagné de John Kerry, secrétaire d’Etat, Lorettav Lynch (Justice), Ashton Carter (Défense), Michael Forman (Commerce), Sylvia Matthews Burwell (Santé), Jacob Lew (Trésor), le Premier ministre britannique, David Cameron, le Premier ministre français, Manuel Valls, le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, le président du Nigéria, Muhammadu Buhari, le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, le président argentin, Mauricio Marci, le président afghan, Mohamed Ashraf Ghani et d’autres chefs de gouvernement.
2.- Le forum mondial aborde la question de la 4ème révolution industrielle, du climat, des migrations, du pétrole et abordera également les impacts du terrorisme. Concernant le premier axe stratégique pour le professeur Klaus Schwab, président-fondateur du WEF, je cite : « la 4ème révolution industrielle fait référence à la fusion des technologies, notamment dans le monde digital, ce qui a des effets très importants sur les systèmes politiques économiques et sociaux, il s’agira de mettre en place un système de compréhension commun de cette révolution industrielle ». Ainsi, On notera pour la journée du 20 janvier 2016, des thèmes aussi variés comme « comment nos vies seront changés par la quatrième révolution industrielle présenté par par Sheryl Sandberg, Paul Kagame et Satya Nadella, comment les entreprises seront modifiées par les nouvelles technologies présenté par Meg Whitman et Marc Benioff, comment le changement technologique rapide va révolutionner le travail présenté par Erik Brynjolfsson et Christopher Pissarides, quel est l’avenir des services financiers Gillian Tett et Christine Lagarde. Pour la deuxième journée du 21 janvier 2016, nous avons les communications suivantes. Comment redémarrez l’économie mondiale avec le Premier ministre irlandais Enda Kenny et prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz, la Grande Bretagne par le Premier ministre britannique David Cameron, un débat sur l'impact possible de l'intelligence artificielle sur les systèmes de défense, l’avenir des énergies combustibles avec Christiana Figueres, Secrétaire exécutive de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques , le nouveau climat et impératif du développement avec le président de la banque mondiale Jim Yong Kim et le SG de l’ONU Ban Ki-moon, quelle est la prochaine pour l’économie chinoise par le directeur général du FMI , Christine Lagarde, l’avenir de l’Union européenne par les Premiers ministres de la France, les Pays-Bas et de la Grèce ainsi que le ministre allemand des Finances sur les nombreux défis de l'Europe.
3.-Face à ce parterre d’éminentes personnalités que dira le Ministre de l’industrie algérien qui représente l’Algérie à l’instar de ses prédécesseurs qui ont fait une visite touristique. Espérons qu’il n’essayera pas de vendre le code d’investissement qui n’existe pas dans les pays développés ou qu’il invoquera encore la règle des 49/51% qui n’existe même pas en Chine. La situation financière difficile que traverse l’Algérie étant connue de tous , espérons qu’il n’’essayera pas de vendre des utopies. Car pour le climat des affaires en Algérie, le Forum de Davos a déjà établi son diagnostic pour l’Algérie. Le rapport du The Global Competitiveness Report 2015–2016 du World Economic Forum qui concerne 140 Etats est paru paraître le 30 septembre 2015. Il a été établi sur la base d’une centaine d’indicateurs quantitatifs émanant des Etats membres et des organisations internationales (Banque mondiale, FMI, UIT, CCI, UNESCO…) ainsi que d’enquêtes qualitatives réalisées par le WEF lui-même. Dans cette édition, le World Economic Forum dénombre les multiples « facteurs problématiques pour faire des affaires » en Algérie. Outre les accès difficiles aux financements, la bureaucratie et la corruption, le rapport « The Global Competitiveness 2015-2016 » justifie le classement de l’économie par l’inflation, l’instabilité politique et l’innovation défaillante en Algérie. L’Algérie a perdu 7 places par rapport à la précédente édition (2014-2015), où le pays était classé 79e et avait gagné 21 places par rapport à l’année 2013-2014 (100e).
-pour la taille du marché, elle a été classé 37ème,-pour l’équilibre macro-économique mais l’enquête a été réalisée avant l’analyse de l’impact de la baisse des recettes de Sonatrach sur les équilibres financiers, elle a été classée 38ème place,-pour l’efficacité des institutions le classement est de 99ème,-pour l’efficacité des infrastructures son classement est de 105 ème,- pour l’enseignement supérieur/formation le classement est de 99 ème,-pour l’efficacité du marché des biens, 134ème,-pour l’efficacité de l’éducation/santé, 99ème,-pour l’efficacité du marché financier, 135ème,-pour l’efficacité du marché dut travail, 135ème,-pour l’efficacité de l’innovation technologique, 126ème.
Or ce bilan pour l’Algérie est très loin des potentialités du pays et elles sont énormes renvoyant au mode de gouvernance.
4.-La raison principale de ces rapports peu élogieux pour l’Algérie et le manque d’attrait à l’investissement productif hors hydrocarbures est que le fondement des politiques 1963/2015 se fonde sur la rente et le monopole bureaucratique. La majorité des responsables algériens vivant de l’illusion de la rente, ne tiennent pas compte du facteur temps qui est déterminant dans la pratique des affaires internationales. Aussi pour éviter ces déclarations démagogiques qui contredisent la réalité, s’impose une cohérence de la politique socio-économique, pilotée par un grand ministère de l’économie couplée avec un grand ministère de l’éducation nationale pour favoriser l’économie de la connaissance. Aussi, sur le plan économique, les axes à mener avec énergie comme condition de sortie de la crise, sous réserve de la mise en place des solidarités démocratiques sont les suivantes :
1.-repenser le fonctionnement des institutions par une réelle décentralisation (e-administration), pour un espace équilibré et solidaire, devant revoir l’actuelle politique d’urbanisation,2.-Revoir l’actuelle politique énergétique en redynamisant le conseil national de l’énergie,3.- la liberté d’entreprendre en démystifiant l’apport du secteur privé national et international,4.- les mesures concernent le régime des changes mais devant éviter l’illusion monétaire passant par la réforme du système monétaire et financier,5.-repenser l’actuelle politique industrielle qui repose sur une vision dépassée de l’ère mécanique,6.-la libéralisation maitrisée des prix et compensations d’émissions,7.-la rationalisation et l’optimalisation de la dépense publique,8.-la réforme de l’entreprise publique par plus d’autonomie,9.- la dynamisation du secteur habitat reposant sur d’autres méthodes de construction économisant l’acier, le ciment et l’énergie,10.- repenser la politique du tourisme et de l’environnement au sein d’un espace équilibré et solidaire,11- l’amélioration des données statistiques, et entrevoir la planification stratégique12- la réforme du secteur agricole dont le foncier,13-la réforme du système socio-éducatif impliquant un grand ministère de l’éducation nationale incluant la formation professionnelle, afin d’impulser les nouvelles technologies,14.- la mise en place d’un véritable marché du travail (mobilité et flexibilité) tout en protégeant les droits des travailleurs par la mise en place du filet social (lutte contre la pauvreté et assistance sociale aux plus démunis.
5.- L’économie de marché véritable ne saurait se limiter à la sphère commerciale mais induit une croissance durable basée sur la production de richesses permanentes tenant compte du bouleversement technologique mondial et de la concurrence internationale, l’Etat Régulateur étant le garant du contrat social. Cela doit se caractériser par la lutte contre tout monopole qu’il soit de type public ou privé. Il y a nécessité de repenser le nouveau rôle de l’Etat Régulateur qui devrait s’adapter à la nouvelle économie mondialisée et aux règles universelles de l’économie de marché, pour se consacrer à sa mission d’encadrement macro-économique, macro- sociale, et investir dans certains segments en amont, dont la maturation est très lente. On ne peut séparer la dynamique économique et la dynamique sociale. Cette solidarité des démocraties – en fait de la démocratie, trouvera des oppositions des rentiers, dont le fonctionnement occulte a conduit à la crise multidimensionnelle que l’ensemble de la population vit dramatiquement. Ce qui explique certaines dénaturations des réformes irréversibles pour asseoir la véritable démocratie et adapter l’Algérie aux mutations mondiales au sein d’un monde de plus en plus multipolaire. Il s’agit d’avoir une vision stratégique clairement affichée de passage d’une économie rentière à une économie basée sur le travail et la récompense de l’effort. Cela suppose de restaurer l’autorité de l’Etat selon une vision démocratique : trop d’autoritarisme brise les libertés et les énergies créatrices, mais pas d’autorité conduit à l’anarchie, tout cela renvoyant à la refondation de l’Etat sur al base de libertés bien comprises. Ces lignes directrices impliquent donc une synchronisation des tactiques pour optimaliser l’efficience économique et sociale, donc une stratégie clairement définie dans le temps évitant l’actuelle instabilité juridique qui décourage tout investisseur potentiel. Cette politique devra être menée par des hommes convaincus par les réformes. La transparence et le langage de la vérité s’imposent pour une adhésion de l’ensemble des citoyens à la philosophie générale des réformes, dont l’accélération est la seule voie pour l’amélioration des conditions de vie des plus défavorisés
En résumé, pour éviter de fausses solutions à des problèmes mal posés, le gouvernement doit éviter de se focaliser uniquement sur la baisse de la rente des hydrocarbures et se demander pourquoi après des recettes de plusieurs milliers de milliards de dollars (à prix constants de 2015 et il est temps de faire un bilan de 1963 à 2015), l’Algérie étant toujours une économie rentière. L’Algérie pour dépasser cette situation actuelle a besoin avant de tout d’un leadership, d’une réorientation urgente de toute la politique socio-économique ( voir nos différentes contributions www.algerie1.com) et d‘une bonne gouvernance. Elle en a les potentialités sous réserve d'une mutation culturelle des mentalités rentières, dépenser sans compter, et surtout voulant ignorer la transformation du monde.
Professeur des Universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL