Retour sur les péripéties ayant jalonné l'adoption d'une résolution de l'ONU condamnant les colonies israéliennes dans les territoires palestiniens
Pour la première fois depuis 2009 (il s'agissait alors d'un appel au cessez-le-feu à Gaza), les Etats-Unis n'ont pas utilisé leur droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU, ce vendredi 23 décembre, à New-York, lors de la présentation d'une résolution réclamant l'arrêt de la colonisation israélienne en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.
Le vote favorable des 14 autres membres du Conseil de sécurité étant assuré, c'est la position américaine qui était attendue, Washington ayant, par le passé, utilisé 30 fois son veto pour bloquer des résolutions qui pouvaient nuire à son grand allié israélien.
Mais l'adoption de cette résolution a connu plusieurs rebondissements au cours des dernières 72 heures.
Dans un premier temps, le mercredi 21 décembre, en fin d'après-midi, l'Egypte avait présenté, au nom du groupe arabe, un texte au Conseil de sécurité de l'ONU, qui appelait "Israël à cesser immédiatement et complètement ses implantations en Cisjordanie et à Jérusalem-Est". Selon ce projet égyptien "les implantations israéliennes dans les territoires palestiniens mettent gravement en péril la viabilité de la solution à deux Etats" qui ferait coexister Israël et l'Etat de Palestine.
Des "indiscrétions" divulguées dans la soirée de ce même mercredi, par certains médias (notamment la chaine de télévision américaine NBC News) ont suggéré que l'administration de Barack Obama allait s'abstenir lors du vote de cette résolution égyptienne et allait ainsi permettre son adoption par le Conseil de sécurité de l'ONU, lors d'une réunion prévue initialement le jeudi 22 décembre. Pourtant aucun communiqué officiel de la Maison Blanche n'est venu attester cela.
S'ensuivit immédiatement un tollé général et un immense branle-bas de combat en Israël et dans tous les soutiens et relais israéliens de par le monde (particulièrement aux USA).
Au milieu de la nuit du mercredi à jeudi (à 3 heures et demi du matin) le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu a appelé sur son compte Tweeter, le gouvernement américain à utiliser son droit de veto et à bloquer le texte égyptien. "Cette résolution, déclara-t-il, est mauvaise pour Israël, mauvaise pour les Etats-Unis et mauvaise pour la paix!"
De son côté, jeudi dans la matinée, le président américain élu Donald Trump publia un communiqué pour apporter son soutien à la demande de Netanyahu, et se prononça contre le projet de résolution égyptien. "Ce texte, prétend t-il, place Israël dans une mauvaise position de négociation et est extrêmement injuste envers tous les Israéliens".
Pourtant, selon l'ambassadrice de la France en Israël, Hélène Le Gall, la résolution présentée par l'Egypte était "équilibrée et correspond à la position française. Les colonies sont un obstacle à la paix tout comme la violence. Les colonies sont encouragées par le gouvernement israélien. Il y'a beaucoup de signaux qui indiquent qu'Israël agit activement à l'encontre de la solution des deux États. C'est la raison de cette résolution".
La mise en garde de Donald Trump n'est cependant pas restée sans écho puisque, quelques heures avant la réunion du Conseil de sécurité prévue initialement le jeudi 22 décembre, plusieurs médias dans le monde annoncèrent que "selon des sources diplomatiques, l'Egypte avait décidé de reporter son projet de résolution et allait procéder à de nouvelles consultations".
Ce vendredi 23 décembre, dans la matinée, la présidence égyptienne publiait un communiqué confirmant que le Président Abdel Fattah Al-Sissi, après un contact téléphonique avec le Président Donald Trump, avait décidé de reporter son projet de résolution condamnant les implantations israéliennes en Cisjordanie et à Jérusalem-Est.
Mais nouveau coup de théâtre ce même vendredi 23 décembre, en milieu d'après-midi cette fois : quatre pays, la Nouvelle-Zélande, la Malaisie, le Sénégal et le Venezuela, reprennent à leur compte la résolution égyptienne mise au placard dans la matinée et la remettent à l'ordre du jour du Conseil de sécurité. Son adoption quelques heures plus tard fut saluée par des applaudissements.
Les premières réactions ne se sont pas fait attendre. Le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou Roudeina, a estimé qu'Israël a reçu à cette occasion "un grand camouflet". "Il s'agit d'une condamnation internationale unanime de la colonisation et d'un fort soutien à la solution à deux États" a t-il ajouté.
'Israël rejetait cette résolution et ne s'y conformera pas"
Le bureau du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé, quant à lui, "qu'Israël rejetait cette résolution anti-israélienne honteuse et ne s'y conformera pas". Il a accusé le Président Barack Obama et le secrétaire d'Etat John Kerry d'avoir "concocté avec les Palestiniens, une résolution anti-israélienne radicale. Cela risque d'encourager le terrorisme et les boycotts". Tel-Aviv a rappelé ses ambassadeurs en Nouvelle-Zélande et au Sénégal et promet des représailles diplomatiques contre ces deux pays.
Un responsable américain a souligné pour sa part "que Netanyahu avait la possibilité de conduire des politiques qui auraient engendré un autre résultat". Un mois avant son départ de la Maison Blanche, le Président Barack Obama (qui a bloqué une résolution similaire en 2011) a sans doute voulu achever son deuxième mandat par un "coup d'éclat".
Les Nations-unis considèrent l'occupation des territoires palestiniens en Cisjordanie et à Jérusalem -Est comme illégale au regard du droit international et ne cesse d'appeler l'Etat sioniste à y mettre un terme. Mais malgré cela, les responsables onusiens y ont constaté une augmentation des colonies israéliennes, ces derniers mois.