Le regain de tensions entre l'Arabie saoudite et l'Iran pourrait compromettre la conclusion d'un accord contraignant sur le gel de la production pétrolière. La réunion des ministres a été retardée.
Un nouveau projet d'accord sur le gel de la production pétrolière appelé à être débattu dimanche par les pays participant à la réunion de Doha inclut un paragraphe prévoyant que tous les Etats membres de l'Opep doivent s'associer aux décisions prises, indique Reuters citant des sources du secteur.
Cette modification du projet pourrait constituer un obstacle majeur à la conclusion définitive d'un accord contraignant puisque l'Iran, membre de l'Opep, a décidé de ne pas participer à la réunion de Doha et refuse de geler sa production.
Des "consultations" informelles ont bien commencé dans la matinée dans un grand hôtel de Doha, la capitale du Qatar, a indiqué à la presse un membre de la délégation équatorienne. Mais la réunion des ministres a été retardée de plusieurs heures.
"Le problème, désormais, consiste à déboucher sur quelque chose qui exclurait l'Iran, satisferait les Saoudiens et ne fâcherait pas la Russie", a résumé une autre source de l'organisation.
Le projet prévoit notamment que la production quotidienne moyenne chaque mois ne dépasse pas le niveau de janvier dernier, selon une copie obtenue par Reuters. Ce gel resterait en vigueur jusqu'au 1er octobre puis les producteurs se réuniraient à nouveau en octobre en Russie pour évaluer les progrès accomplis dans la mise en oeuvre d'un "redressement progressif du marché pétrolier", est-il écrit dans ce document.
Réunion à Vienne en juin
Le ministre équatorien des Hydrocarbures, Carlos Pareja, a déclaré aux journalistes que son pays, membre de l'Opep, soutenait ce projet d'accord destiné à stabiliser le marché pétrolier et à soutenir les prix, plombés par une surabondance de l'offre. Le ministre de l'Energie d'Azerbaidjan, Natig Aliyev, cité par l'agence russe RIA Novosti, a pour sa part indiqué que le projet d'accord prévoyait un gel de la production "à ses niveaux de janvier et (ce) jusqu'à octobre", sans donner d'autres détails. Le ministre équatorien a rapporté que le projet prévoyait "la mise en place d'un comité de contrôle du gel".
Pareja a averti que, si aucune mesure n'était prise, "d'énormes dégâts affecteraient l'industrie pétrolière et il y aurait un important excédent" sur le marché. "Nous sommes prêts à faire le premier pas et à surveiller le marché pour voir la réaction à cela (le gel) lors de la prochaine réunion de l'Opep", a-t-il ajouté.
Divergences
Des divergences entre l'Iran et l'Arabie saoudite, les deux grands rivaux du Moyen-Orient, avaient éclaté avant même le début de ces discussions.Samedi, le vice-prince héritier saoudien Mohammed bin Salman, chargé de la politique pétrolière, a déclaré à l'agence Bloomberg que le royaume pouvait rapidement augmenter sa production et qu'il ne la limiterait que si l'Iran acceptait un gel.
De son côté, le ministre iranien du Pétrole, Bijan Zanganeh, a déclaré que les autres pays producteurs devaient se faire à l'idée du retour de son pays sur marché pétrolier. "Si l'Iran gèle sa production pétrolière au niveau de février, cela signifiera qu'il ne peut pas bénéficier de la levée des sanctions", a-t-il dit.
Kamel al-Harami, expert pétrolier koweïtien, estime cependant qu'un accord dimanche sur un gel de la production est encore possible, même sans l'Iran. "L'Iran est incapable d'ajouter plus de 500.000 barils par jour à sa production d'ici la fin de l'année".
Les Etats-Unis dans le viseur ?
L'incapacité à conclure un accord pourrait laisser le champ libre à une nouvelle batailles pour les parts de marché entre pays producteurs, ce qui risquerait de porter un coup d'arrêt à la remontée du prix du baril.
"S'il n'y a pas d'accord aujourd'hui, l'Arabie saoudite ne s'en prendra pas seulement à l'Iran. S'il n'y a pas de gel, cela affectera directement la production nord-américaine, et c'est peut-être ce que veulent les Saoudiens", a commenté Abhisek Deshpande, analyste spécialisé de Natixis.
L'espoir d'une limitation concertée de l'offre mondiale a permis au baril de Brent de rebondir de 60% par rapport aux plus bas touchés en janvier autour de 27 dollars, après la chute qui lui avait fait perdre plus de 75% depuis le pic à 115 dollars de la mi-2014.Un gel concerté de la production des pays présents à Doha n'aurait cependant qu'un impact limité sur l'offre pétrolière mondiale et il est peu probable que le marché revienne à une situation d'équilibre probable avant 2017, a estimé jeudi l'Agence internationale de l'énergie (AIE).(agences)