Depuis la fin de l’année dernière, Caracas essaie sans succès de rapatrier son or déposé dans la Banque d’Angleterre. Dès que Londres a rallié la semaine dernière Washington, en reconnaissant Juan Guaido comme «Président en exercice» du Venezuela, les perspectives de ce rapatriement ont été réduites pratiquement à zéro. La pratique de gel ou de confiscation d’actifs de pays qui vont à l’encontre des intérêts politiques ou financiers des États-Unis et de l’Union européenne n’est pas nouvelle, et Sputnik se souvient de trois autres cas de ce genre.
Iran
L’histoire des actifs gelés de l’Iran a 40 ans. Elle remonte à la révolution de 1979. À l’époque, le Chah Mohammad Reza Pahlavi, soutenu par les États-Unis, a été renversé, et une république islamique a été créée. Ces événements, dont la prise d’otages à l’ambassade états-unienne à Téhéran, ont poussé Washington à rompre les relations diplomatiques avec l’Iran, à interdire les importations de pétrole iranien et à geler les actifs de ce pays pour près de 11 milliards de dollars (aujourd’hui 35,35 milliards de dollars, compte tenu de l’inflation).
Et même trois ans après la signature en 2015 du Plan d’action global commun (JCPOA), connu comme l’accord sur le nucléaire iranien, le sort de la plupart des actifs iraniens gelés lors de la révolution de 1979 reste inconnu.
Irak
En 2003, à la veille de l’invasion de l’Irak par les États-Unis, le planning militaire stratégique était accompagné de calculs économiques en vue de confisquer environ 1,75 milliard de dollars d’actifs irakiens déjà gelés sur les comptes aux États-Unis.
Quoi qu’il en soit, cette confiscation n’était que le sommet d’un iceberg. Par la suite, une immense quantité d’actifs irakiens ont été dilapidés. En 2010, par exemple, à l’issue d’une inspection menée au Pentagone, on n’a pas pu expliquer la disparition de près de 8,7 milliards de dollars provenant d’exportations de pétrole et de gaz irakiens et destinés à la reconstruction du pays.
Lors d’un audit réalisé en 2005, Stuart Bowen, inspecteur général pour la reconstruction de l’Irak, a reconnu ne pas avoir «trouvé» 8,8 milliards de dollars.
Six ans plus tard, il a annoncé que les autorités des États-Unis ne pouvaient toujours pas expliquer la disparition d’environ 6,6 milliards de dollars, déclarant qu’on pourrait sans doute le qualifier de «plus grand détournement de fonds dans l’Histoire nationale».
Libye
Presque huit ans après l’ingérence de l’Otan en Libye dans le but de renverser son ancien dirigeant Mouammar Kadhafi, les détails d’un pillage supposé d’une grosse somme des richesses souveraines de ce pays restent inconnus.
Les actifs libyens ont été gelés en septembre 2011 sur décision des Nations unies. Selon l’hebdomadaire belge Le Vif, plus de 10 des 16 milliards d’euros appartenant à l’entourage de l’ex-dirigeant libyen Mouammar Kadhafi ont mystérieusement disparu des comptes de l’Euroclear Bank en Belgique entre 2013 et 2017.
Or de Caracas
Saluant le refus de la Banque d’Angleterre de restituer à Caracas son or, le «Président» autoproclamé du Venezuela Juan Guaido a annoncé lundi prendre le contrôle des actifs du pays à l’étranger afin d’«empêcher les abus et les détournements de fonds destinés à financer la nourriture, les médicaments et l’avenir de nos enfants».
Mais à en juger d’après les histoires de gels et de confiscations d’actifs, exposées ci-dessus, il est peu probable que les Vénézuéliens puissent décider ce que les gouvernements et les banques centrales en Occident feraient des richesses du pays.
Le Trésor américain a annoncé lundi de nouvelles sanctions qui interdisent à la compagnie pétrolière nationale vénézuélienne PDVSA de faire du commerce avec des entités américaines et gèlent ses avoirs à l’étranger. Cette décision est censée, selon Washington, faire pression sur Nicolas Maduro. Le Président Maduro a interprété les restrictions américaines comme une tentative de saisir la filiale états-unienne de PDVSA.
Le 27 janvier, la France, l’Espagne, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Belgique ont annoncé qu’ils seraient prêts à reconnaître Juan Guaido comme Président du Venezuela, si aucune élection n’était annoncée dans un délai de huit jours.
L’opposant Juan Guaido, renvoyé le 22 janvier du poste de président de l’Assemblée nationale vénézuélienne sur décision de la Cour suprême, s’est autoproclamé le lendemain «Président en exercice» du pays et a prêté serment pendant une manifestation à Caracas. Donald Trump l’a reconnu comme «Président par intérim».
Nicolas Maduro a estimé que les États-Unis avaient essayé d’organiser un coup d’État au Venezuela et a rompu les relations diplomatiques avec ce pays le 23 janvier. M.Maduro a qualifié M.Guaido de Président non constitutionnel. (Sputnik)