Par Djamel Bouatta
L’Africom, le commandement américain d'Afrique, ce fameuxgendarme destiné au continent africain créé dans les années 2000 et installé enAllemagne faute de pays d’accueil, aurait-il trouvé sa base ? Les manœuvresmilitaires durant une dizaine de jours entre les villes d'Agadir et Tizsenitdans le sud du Maroc, ont tout l’air d’y apporter une réponse.
Ces exercices mettent en action 1300 soldats sous ladirection des cadres de l’Africom, des membres des forces spéciales américaines: des militaires marocains mais aussi des contingents européens, français, allemands, britanniques, espagnols, et canadiens. Des africains également :des maliens, des sénégalais et des tunisiens.
Des contingents aériens, maritimes et terrestres participentà ces opérations techniques et tactiques ainsi que stratégiques de la guerre etdes opérations de maintien de la paix ouvertes le 22 avril, qui se poursuiventjusqu’au 28 avril. Il est vrai que ces exercices menés par le Pentagone et lesdivers services secrets américains, sont organisés chaque année sur lecontinent africain, pour bien sur marquer les liens étroits que l’armée US atissé avec ses homologues africains, mais également pour trouver enfin le pointde chute escompté en Afrique, de préférence pas loin du Sahel.
Le Maroc a failli succomber à l’offre américaine en 2008.Les négociations sur le point d’aboutir ont capoté, semble-t-il, parce que lepatron du Pentagone de l’époque, Robert Gate, s’était refusé de se prêter audeal proposé par Mohamed VI : la base de l’Africom à Tan-Tan contre lareconnaissance de l’occupation du Sahara Occidental. Robert Gate a mis sur latable une contrepartie financière, sous forme d'aide, très séduisante avaientindiqué des sources proches du dossier mais Mohamed VI s’est accroché à son obsession :légaliser le fait colonial de son père.
Le Maroc n’a pas pour autant rompu ses amarres avec lePentagone en engageant notamment son armée dans plusieurs missions militairessur le continent, notamment en Centrafrique et en RDC, en s’engageant dans desconflits sous l’égide de coalitions internationales dirigées par Washington(coalition internationale contre les groupes djihadistes de l’EI en Irak et enSyrie). Comme il a pris part activement à la guerre au Yémen en participant auxopérations contre les populations démunies de ce pays menées par l'Arabiesaoudite.
En réalité, la coopération avec le Pentagone, la CIA et sesconsœurs de la NSA, ne date pas de l’Africom. La présence militaire américainechez notre voisin n’a jamais constitué un fait nouveau dans la mesure où HassanII, père de Mohamed VI, a autorisé au début des années 1980 les Etats-Unis àinstaller sur son territoire plusieurs bases, dont la plus célèbre est la baseaérienne de Ben Jarir, à une soixantaine de kilomètres de Marrakech. Pendantlongtemps le Maroc a servi d’escales pour les équipées militaires américainesau Moyen Orient.
Si l’Africom venait à s’installer au Maroc, comme lesoutiennent des rumeurs et des spéculations, ce pays, court le risque,avertissent également des analystes, de voir des flambées de terrorisme.Plusieurs pays africains ont d’ailleurs décliné les offres alléchantes del’Africom par le fait qu'une présence militaire US sur leur territoire pourraitêtre à l'origine d'attentats terroristes. N’est-il pas de notoriété publiqueque les nébuleuses djihadistes cherchent avant tout à s'attaquer aux intérêtsaméricains partout dans le monde ?
Les Sahraouis s’interrogent sur cette intrusion de l’Africomnon loin de leur territoire où sévit une partie de l’armée marocaine forte de200.000 militaires. Le Maroc, fidèle allié de Washington, est aussi sonpartenaire militaire de premier plan. C’est un excellent client des Américainsde matériels militaires. Au point où le Pentagone a sponsorisé l’entrée del’armée marocaine, l'année dernière, dans la plateforme opérationnelle del'Otan. Une première pour un pays d'Afrique.