Le Parlement irakien va finalement se réunir dimanche pour tenter d'ouvrir la voie à la formation d'un gouvernement dans un pays en proie à une vaste offensive d'insurgés sunnites et paralysé sur le plan politique par ses divisions communautaires.
L'annonce initiale du report d'un mois, au 12 août, de la session parlementaire prévue ce mardi avait suscité les critiques de nombreux Irakiens et de responsables internationaux, alors que le pays est au bord du gouffre.
Mais la décision a été révisée et «la nouvelle date sera le dimanche 13 juillet, au lieu du 12 août», a indiqué à l'AFP un employé du bureau du président du Parlement par intérim Mahdi Hafez.
Reporter d'un mois «la session du Parlement a été un choc pour les Irakiens qui vivent dans un bain de sang et se retrouvent sans travail et sans services», a commenté Essam al-Bayati, professeur à l'université de Kirkouk dans le Nord du pays.
D'autant plus que la première session du nouveau Parlement n'a eu lieu que le 1er juillet, soit deux mois après les législatives du 30 avril. Et elle avait été levée dans le chaos, des députés s'invectivant ou quittant la séance, sans élire de chef du Parlement comme prévu.
La Constitution prévoit que le président du Parlement, le président de la République et le Premier ministre soient choisis dans un délai maximum de 45 jours après la première réunion du Parlement.
Selon une règle non écrite le poste de Premier ministre revient à un chiite (communauté majoritaire), la présidence de la République, à un kurde, et celle du Parlement, à un sunnite.
L'Irak, miné par les divisions confessionnelles, est frappé par la crise politique et les violences depuis plus d'un an, ce qui a alimenté l'offensive lancée le 9 juin par des insurgés menés par les jihadistes de l’État islamique (EI), un groupe puissant et ultra-radical.
'Calculs politiques'
«Il y a une crise, et ce report pour des questions de calculs et d'accords entre politiques est la plus grande des trahisons pour les Irakiens qui se sont déplacés pour voter pour eux», dénonce Abou Moussa, un commerçant.
Le Premier ministre sortant, le chiite Nouri al-Maliki dont le bloc est arrivé en tête du scrutin, a affirmé la semaine dernière qu'il comptait rester à son poste pour un troisième mandat, malgré les appels en Irak comme à l'étranger pour qu'il cède la place à un gouvernement d'union à même de faire face aux jihadistes.
M. Maliki, au pouvoir depuis 2006, était critiqué pour sa politique d'exclusion de la minorité sunnite et son autoritarisme.
Dans leur offensive fulgurante face à une armée en déroute les premiers jours, l'EI s'est emparé de Mossoul, la deuxième ville du pays, et d'une grande partie de sa province Ninive, ainsi que de régions dans les provinces de Diyala (Est), Salaheddine et Kirkouk (Nord). Il contrôle aussi des secteurs d'Al-Anbar (Ouest).
Le 29 juin, le groupe a proclamé un califat islamique à cheval entre la Syrie, où il est engagé dans la guerre civile, et l'Irak, atteignant ainsi apparemment un objectif affiché de longue date. Samedi, son leader, Abou Bakr Al-Baghdadi, est sorti de l'ombre dans une vidéo, non authentifiée, le montrant lors d'un prêche à Mossoul.
Nouveaux attentats
Près d'un mois après le lancement de l'offensive, l'armée ne parvient pas à reconquérir les territoires pris par les insurgés, en dépit de la livraison d'avions de combats par Moscou, la présence de conseillers militaires américains et l'aide de milices chiites et de volontaires.
Les forces gouvernementales semblent piétiner à Tikrit (Nord), ancien bastion de Saddam Hussein, qu'elles échouent à reprendre aux mains des insurgés de l'EI et de leurs alliés dont d'anciens partisans de l'ancien président sunnite irakien.
Elles souffrent d'un manque d'entraînement mais aussi d'un déficit de renseignement dans les zones sunnites, résultat d'un sentiment de défiance à l'égard du pouvoir Maliki.
Selon les observateurs, Bagdad n'est pas prête de tomber mais les attentats dans la capitale continuent de tuer. Mardi, au nord de Bagdad, cinq personnes ont péri dans un attentat suicide à un point de contrôle et trois policiers ont été tués dans une attaque à la bombe. (Afp)