Nedjemeddine Bendimerad est psychiatre de formation, il est établi actuellement en Suisse, et derrière l’attention froide du thérapeute se cache un caricaturiste de talent qui ne prescrit que des fous rires et des sourires malicieux sur les «ordonnances» spéciales qu’il délivre assez régulièrement dans des journaux ou sur la toile.
«Kidnappé» par l’humour, il y a une trentaine d’années, il a choisi la caricature comme mode d’expression favori et comme outil de liberté car elle lui permet de «faire passer des messages graves sous couvert d’éclats de rire». Lui qui avoue sans hésiter que son sujet préféré reste la politique, a pu se forger au fil du temps un style personnel, reconnaissable entre tous : les cheveux hérissés de ses personnages, leurs souliers exagérément pointus, leur nez protubérants (par allusion à notre «nif» national) identifient aisément sa patte.
L’imagination toujours en effervescence, notre toubib-dessinateur est une mine d’idées féroces ou cocasses : «Je ne sais pas pourquoi mais ça fait souvent tilt dans ma tête. Je suis le premier à rire de mes trouvailles. Il me faut une heure environ pour venir à bout d’un dessin. Je cherche d’abord une idée originale en rapport avec le sujet que je veux traiter. Puis j’imagine une scène dans laquelle je vais faire mouvoir mon (ou mes) personnage(s). Ensuite, je passe à l’exécution. Je fais des esquisses au crayon puis j’attaque à l’encre de Chine».
«Un dessin, normalement, doit se suffire à lui-même, tient-il à souligner. C’est quand je n’arrive pas à m’exprimer uniquement par le dessin que j’ai recours à la bulle. Pour moi, une caricature parfaite est une caricature sans bulle». Souvent, le regard du psychiatre se mêle à celui de l’artiste : «J’essaie de poser un diagnostic sur les maux dont souffre notre société (ou notre planète), mais ce n’est pas à moi mais aux politiques de prescrire un traitement» précise-t-il.
Au vu de l’expérience qu’il a acquise via son métier peut-être, il lui arrive d’insinuer, d’un air facétieux, que «nous serions tous des «malades» et suggère volontiers le rire, l’autodérision comme la meilleure des thérapeutiques : «Dans la vie, on a un besoin crucial de rire, y compris de soi-même. Et un peu de fantaisie n’a jamais fait de mal à personne.»