Par Mohamed Ould El Bachir
Une brève rétrospective du parcours diplomatique et politique de M. Ahmed Ouyahia suffirait à décourager n’importe qui désireux de lui consacrer une biographie exhaustive.
Aucune volonté de notre part de lui consacrer un portrait complet, tant sa carrière est dense et riche, reflétant grandement une grande rigueur intellectuelle et un souci constant de précision.
Pour les diplomates, épris de valeurs nationales, le nom d’Ahmed Ouyahia dit sûrement de belles choses, puisqu’il fait partie des rares hommes de l’école diplomatique d’Abdelaziz Bouteflika, qui sont porteurs d’espérances majeures. Mais avant tout, c’est d’abord un homme, un style et des méthodes de travail rigoureuses.
Enarque accompli, référence dans sa spécialité, ce diplomate singulier, doublé de politicien, fait partie des hommes d’Etat de la seconde génération qui allient talent et humilité.
Né le 2 juillet 1952 dans le village de Bouadnane, commune d'Iboudraren, au sein d’une famille des plus modestes. Il fait ses études primaires à Alger de 1958 à 1965, avant d’entrer au lycée El-Idrissi où il obtient le baccalauréat ès-lettres en 1972.
La même année, il passe le concours d'entrée à l'École nationale d'administration d'Alger, qu'il réussit avec une note très honorable et intègre ainsi la future technostructure de la Nation. Après un cursus de tronc commun, Il se spécialise alors dans la diplomatie et les sciences politiques en 1976.
En parlant de son itinéraire, un de ses anciens amis le décrit comme « un homme d’honneur et un brillant diplomate ».
Au ministère des Affaires étrangères, il a occupé différents postes de responsabilité, dont ceux de chargé d’études, directeurs général Afrique et secrétaire d’Etat à la Coopération et aux Affaires maghrébines.
Secrétaire aux Affaires étrangères jusqu’en 1981 et après l’accomplissement de son service national de 1977 à 1978, sans pour autant délaisser ses préférences diplomatiques, durant cet intermède, il est affecté en poste à Abidjan, où il intègre notre ambassade comme conseiller diplomatique.
En 1984, il est nommé à New York comme conseiller à la mission permanente auprès de l’ONU. De 1988 à 1989, il siège au Conseil de sécurité des Nations unies, en sa qualité de représentant permanent adjoint.
En novembre 1990, il est nommé comme chargé d'études au cabinet du ministre des Affaires étrangères, avant de devenir moins d'un mois plus tard le directeur général de la division Afrique relevant du département des affaires étrangères, poste qu’il occupât jusqu’au 15 septembre 1992, lorsqu'il est nommé comme ambassadeur au Mali, avec comme feuille de route la charge des bons offices dans le conflit entre le gouvernement malien et le mouvement Azaouad. Une médiation algérienne qui a porté ses fruits avec le « Pacte national » de Bamako.
En août 1993, Il est rappelé à Alger pour intégrer le gouvernement de feu Redha Malek, comme Secrétaire d’État à la Coopération et aux Affaires maghrébines, avant de diriger le cabinet du président Liamine Zéroual où il est chargé des affaires politiques.
Le 31 décembre 1995, Ahmed Ouyahia est nommé chef du gouvernement. Un poste qu’il occupera quatrième fois de suite.
Mesurant l’ampleur des défis, Ahmed Ouyahia a su représenter dignement son pays au sein des diverses instances internationales pour mobiliser le maximum de soutien possible pour régler les crises régionales dont celle du mali, pays frère et voisin.
Prenant sienne la sagesse connue et reconnue du Président Abdelaziz Bouteflika et en totale synergie avec le Ministre Abdelkader Messahel, il a eu à gérer à l'heure de la diplomatie d'influence les différends et les conflits régionaux et internationaux les plus complexes : Mali, Libye, Syrie, Yémen, Sahara occidental, questions économiques et commerciales internationales, lutte contre le terrorisme, émigration clandestine, pour ne citer que ces questions.
Grâce à son tact, il a su exercer une influence modératrice, se faire intelligemment l’interprète, contribuant ainsi à renforcer la compréhension et à atténuer les oppositions, tout en œuvrant à la recherche des solutions dans la sérénité et surtout d’assurer la liberté dans l’évaluation et préserver l’indépendance de la décision.
Cet homme matinal , au temps si précieux, consacre des heures à la lecture pour rester ‘’à la page’’ et maintenir un niveau élevé des débats sur les questions de l'heure.
Pour certains de ses amis, qui évoquent son parcours exceptionnel de grand diplomate, un autre aspect de Ahmed Ouyahia est négligé, celui de tous les jours, dans ses facettes les plus pratiques: le protocole, le sens des choses et des hommes. Enfin, la bonne humeur et l’anecdote ancestrale qui ne sont pas absentes dans un contexte informel, comme le font agréablement les Grands Hommes de l’Ecole diplomatique d’Abdelaziz Bouteflika.
Mohamed Ould El Bachir (Universitaire)