Le plus haut gradé américain estime que l'Iran renforce la puissance de feu des milices chiites irakiennes engagées dans l'offensive de Tikrit mais se demandE si cette intervention aide ou nuit à la lutte contre le groupe Etat islamique (EI). Le général Martin Dempsey a déclaré vendredi à des journalistes à bord de l'avion l'emmenant à Bahreïn et en Irak avoir l'intention de faire part de ses inquiétudes à ce sujet aux dirigeants irakiens qui viennent de lancer une offensive pour reprendre Tikrit à l'EI.
Les milices chiites, armées et conseillées par l'Iran, jouent un rôle de premier plan dans cette offensive. Mais la coalition conduite par les Etats-Unis, qui n'a pas de contacts avec ces milices chiites, est absente de cette opération et ses membres craignent de voir l'implication de l'Iran exacerber les tensions confessionnelles en Irak.
Selon le général Dempsey, chef d'état-major inter-armées américain, les frappes aériennes de la coalition ces derniers mois au nord de Baïji ont préparé le terrain à l'offensive de Tikrit. "Je pense que l'offensive a été rendue possible grâce à la campagne aérienne menée aux alentours de Baïji", qui a éloigné l'EI de la raffinerie de la ville, a-t-il dit. "Je veux que le Premier ministre et le ministre de la Défense (irakiens) réalisent que cela (l'offensive) ne s'est pas produit par magie et grâce à l'émergence des milices chiites sur la route conduisant de Bagdad à Tikirt", a poursuivi le général américain.
Se référant au soutien de l'Iran aux milices chiites, le général Dempsey a indiqué vouloir se faire une idée sur une possible "complémentarité" entre leur action et celle de la coalition. Il s'est dit attentif aux "défis" que pose le soutien de l'Iran à ces milices, ajoutant que l'influence de l'Iran suscite des inquiétudes parmi les membres de la coalition qui comprend des pays sunnites aux yeux desquels l'Iran représente une menace. Il n'est pas clair non plus, a-t-il ajouté, si l'Iran partage les objectifs stratégiques de la coalition. Cette coalition se dit attachée à l'unité de l'Irak composé de sunnites et de kurdes ainsi que d'une large communauté chiite, a rappelé le général américain. "Je veux m'assurer que ces efforts sont complémentaires et s'ils ne le sont pas, nous allons avoir un problème", a-t-il dit.
L'EI en infériorité à Tikrit
Selon lui, l'Iran fournit aux miliciens chiites de l'artillerie, de l'entraînement et "certaines informations" ainsi que de la surveillance aérienne. Mais il n'y a aucun signe d'une participation aux combats de troupes iraniennes, a-t-il dit, ajoutant toutefois qu'il va poser la questions à ce sujet aux dirigeants irakiens. De façon générale, le général Dempsey affirme qu'il n'y a pas de doute que le soutien iranien rend les milices chiites "plus capables militairement". "Mais cela inquiète nos partenaires de la coalition".
Le seul qui peut atténuer ces craintes est le Premier ministre irakien Haider al-Abadi, a estimé le général américain. Pour lui, la défaite de l'EI à Tikrit n'est qu'une question de temps. "Les chiffres parlent d'eux-mêmes", a indiqué le général Dempsey, précisant que quelques centaines de combattants de l'EI font face à Tikrit à 23.000 soldats et miliciens irakiens. Et c'est la première fois, selon lui, que l'armée irakienne et les milices chiites aient été "si étroitement associées" dans une opération militaire.
Des colonnes de véhicules militaires et de blindes irakiens encombrent la route menant de Bagdad à Tikrit, dans ce qui ressemble, selon le général américain, à un embouteillage de Washington. Mais selon lui, le véritable test sera la manière dont les habitants sunnites seraient traités une fois leur ville libérée. Si les sunnites seront autorisés à regagner leurs demeures et avoir le sentiment que l'offensive serait suivie par un effort de reconstruction et d'assistance humanitaire, tout ira bien. Mais s'ils sont maltraités et qu'ils ne bénéficient pas, selon lui, d'une aide humanitaire cela posera problème.(Afp)