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Le roi est nu

11-08-2013 13:29  Rafik Benasseur

La monarchie «jeune et moderne» de notre ami le roi commence assurément à prendre des rides. C’est l’implacable constat qui s’impose aujourd’hui aux marocains d’abord et à tous ceux qui ont naïvement cru que Mohamed VI incarnait véritablement le parfait monarque des temps modernes ou presque. Ironie du sort, c’est un détestable pédophile qui écorne gravement l’image du «Commandeur des croyants» ainsi mêlé à une scabreuse affaire de générosité vis à vis d’un violeur d’enfants.

Et cette fois, ça n’a hélas pas raté pour lui. Le roi est bien nu devant ses sujets envers qui sa mansuétude s’est rarement manifestée. Du coup, l’affaire de la grâce du serial violeur espagnol, Daniel Galvon, a déteint dangereusement sur l’image…royale du roi.

Que ce soit dans les réseaux sociaux, sur les sites internet ou dans les journaux, Mohamed VI en a pris pour son grade. Et c’est quasiment une première dans un pays où la personne du roi est intouchable voire sacrée. Il suffit de consulter les journaux marocains de ces derniers jours pour prendre la mesure de la grosse déception des gens face à cette insupportable grâce accordée par Mohamed VI à ce monstre qui a fait des ravages parmi les petits sujets de sa majesté (11 enfants violés).

«Danielgate»

Désormais c’est le roi himself qui devient malgré lui le sujet de discussions y compris dans les cafés. Il est aussi l’objet puisque il est l’homme par qui le scandale est arrivé. Sans sa générosité pour le moins inopportune et déplacée, le misérable pédophile serait aujourd’hui entre les quatre murs de sa cellule à la prison de Kenitra jusqu’à s’acquitter de ses 30 ans de réclusion.

On comprend mieux le boucan soulevé dans les médias et au sein de l’opinion et la société civile qui se sentent quelque part trahi par celui qui est censé être le gardien du temple et de la morale.

A l’arrivée, l’image de Mohamed VI s’en sort très abimée par cette affaire promise à devenir le feuilleton à rebondissements de cet été. On parle en effet de «danielgate» à visage découvert et on critique ouvertement la décision du roi. Certains journalistes et hommes politiques osent même de véritables «lèse majesté», pointant presque l’incompétence du roi. Mieux ou pire, ils sont nombreux les marocains qui ne font plus confiance au monarque après cette affaire.

Un feuilleton d’été ?

Le fait est qu’un sondage du journal Lakome révèle que 71.5% des personnes affirment ne pas prendre pour argent comptant la déclaration du roi selon laquelle il ignorait qu’il y avait un pédophile parmi ses graciés. Seuls 28.5% lui accordent le bénéficie du doute. Quelque chose s’est donc cassé entre M6 et ses sujets.

Le moral national au Maroc a connu un sérieux coup de barre. Même le célèbre commentateur des activités royales à la télévision officielle marocaine, Mustapha Alaoui n’a pu cacher son dégoût.

Dans son commentaire en direct consacré à la cérémonie d’allégeance présidée par le roi sur son cheval l’après-midi d’hier samedi au Palais royal de Rabat, il a lâché un lapsus révélateur comme dirait Fellag… Au lieu d’évoquer la «fête d’allégeance» (ولاء) en arabe, Mustapha Alaoui a asséné un cinglant : «fête de «souffrance» (بلاء) ! Volontairement ou pas, le lapsus en dit long sur l’état d’esprit des marocains ces jours-ci.

Voilà par ailleurs ce qu’a écrit hier Salah Elayoubi sur le site Lakome : (…) «Nous persistons à nous voiler la face, et à nous bercer de vieilles comptines éculées où il est question du bon roi et du vilain entourage».

Le pédophile de Kenitra et le trafiquant de Houceima

Et d’ajouter : (…)«L'excès de tyrannie finit toujours par tuer la tyrannie ! Celle de Mohammed VI n'échappe pas à ce postulat implacable. Son refus d'amender le régime, son affairisme coupable, son accaparement de tous les pouvoirs, son obstination à s'entourer de prédateurs, de tortionnaires et d'incompétents, son refus de se séparer des corrompus qui l'entourent, lui font dire à qui veut bien y croire, qu'il exerce une monarchie exécutive, alors qu'il se trouve tout simplement à la tête d'une dictature.

Salah Elayoubi s’est fendu d’un pamphlet contre le roi dont il a brocardé un règne «tyrannique» pendant 14 ans sur fond de «corruption généralisée». «L'affaire de la grâce le démontre clairement. A concentrer tous les pouvoirs, le despote finit par n'en maitriser aucun et n'est, dès lors, plus à l'abri du moindre faux-pas, de la moindre erreur ou peau de banane de son entourage», écrit l’auteur.

Et il faut croire que M6 n’est pas au bout de ses peines. Alors que le sale dossier du violeur espagnol n’est pas encore refermé qu’il doit faire face à un autre du même «calibre». La presse marocaine rapporte ainsi que le numéro 19 de la liste des graciés du roi, Mohamed Mounir Molina, a été libéré 48h avant le début de son procès à Al Hoceima pour « trafic international de drogue et constitution de bande organisée».

De quoi ébranler un peu plus un palais qui montre ces premières fissures…



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