Le cours du Brent est coté dans la matinée du 14 novembre 2017 à 62,97 dollars le Brent et 56,59 dollars le Wit pour un cours euro/dollar 1,17 et pour le dinar algérien officiel 134,57 un euro et 114,873 un dollar avec un cours sur le marché parallèle de plus de 200 dinars un euro. Depuis plusieurs décennies l’économie algérienne est tributaire de la rente des hydrocarbures et toutes les lois de finances reposent sur l’évolution du cours du pétrole. Or depuis la mi 2014 avec la chute des cours la balance commerciale et la balance des paiements connaissent de vives tensions, devant être réaliste étant fini un cours entre 80/100 dollars le baril. L’Algérie dont le quota OPEP est de 1,2 millions de barils jour auquel il faut soustraire les 50.000 barils de réduction doit être surtout attentive au cours du gaz qui représente plus de 33% des recettes de Sonatrach et dont les contrats à moyen et long terme dans leur majorité expirent entre 2018/2019. Or il ya entrée massive de nouveaux producteurs sur le marché mondial et le cours le 13/11/2017 est de 3,17 dollars le MBTU avec une extrapolation de 3,13 dollar le MBT fin décembre 2017 ayant suivi le cours bisser du prix du pétrole(1).
1.- Tensions au niveau de La balance commerciale et de la balance des paiements
1.1-Les exportations ont été évaluées à 25,79 milliards de dollars (mds usd) sur les 9 premiers mois de l'année 2017 contre 21,82 mds usd sur la même période de 2016 (+18,2%), en hausse de 3,97 mds usd, selon les données du Centre national de l'Informatique et des Statistiques des Douanes (Cnis), effets positifs dues essentiellement à la remontée du cours du pétrole. Concernant les importations, elles ont connu une légère baisse en s'établissant à 33,92 mds usd contre 34,93 mds usd (-2,9%), en baisse de 1,01 mds usd, montrant que les mesures restrictives ont eu un impact mitigé ,Aussi, le taux de couverture des importations par les exportations, il est passé à 76% contre 62% à la même période Les hydrocarbures continuent de représenter l'essentiel des ventes algériennes à l'étranger , 94,66% du volume global des exportations, , en s'établissant à 24,41 mds usd contre 20,52 mds usd sur la même période de 2016, soit une hausse de 3,89 mds usd toujours grâce à des effets externes.. Les exportations hors hydrocarbures marginales composées des demi-produits avec 973 millions usd (contre 982 millions usd), des biens alimentaires avec 277 millions usd , des biens d'équipements industriels avec 61 millions usd , des produits bruts avec 51 millions usd , des biens de consommation non alimentaires avec 15 millions us et des biens d'équipements agricoles avec 0,16 million us. Les lignes de crédit ont financé les importations pour un montant de 12,01 mds usd (35,42% des importations), tandis que les comptes en devises propres ont été utilisés pour des importations de 7 millions usd (0,02%). Le reste des importations a été financé par le recours à d'autres moyens de paiement à près de 1,2 mds usd (3,6% des importations). Les cinq premiers clients de l'Algérie, au cours des neuf premiers mois de 2017, ont été l'Italie avec 4,22 mds usd (16,4% des exportations globales algériennes), suivie de la France avec 3,17 mds usd (12,31%), de l'Espagne avec 2,79 mds usd (10,81%), des Etats-Unis avec 2,34 mds usd (9,1%) et du Brésil avec 1,6 mds usd (6,22%). Quant aux principaux fournisseurs de l'Algérie, la Chine est encore venue en tête avec 6,56 mds usd (19,4% des importations globales algériennes), suivie de la France avec 3,07 mds usd (9,06%), de l'Italie avec 2,58 mds usd (7,62%), de l'Allemagne avec 2,29 mds usd (6,74%) et de l'Espagne avec 2,28 mds usd (6,71%). Comme résultante, le déficit commercial de l’Algérie a reculé à 8,14 milliards de dollars sur les neuf premiers mois de 2017 contre un déficit de 13,11 milliards de dollars sur la même période de 2016, soit une baisse de 4,97 milliards de dollars correspondant à un recul du déficit de 37,94%. Avec la même tendance les importations de biens fluctueront entre 42/45 milliards de dollars fin 2017 et les entrées de devises entre 31/33 milliards de dollars.
1.2- Mais le document le pus fiable est la balance des paiements qui retrace le flux de biens (commerce extérieur des marchandises), de services, de revenus, de transferts de capitaux et les flux financiers réalisés entre l’Algérie et le reste du monde, représentant l’ensemble des entrées et sorties de devises entre l’Algérie et les autres pays. Selon le gouverneur de la banque d’Algérie pour le premier semestre 2017, le poste services hors revenus des facteurs qui se compose notamment des prestations techniques assurées par les étrangers en Algérie (études, etc), le transport assuré par les transporteurs étrangers pour les marchandises importées par l’Algérie (armateurs.., etc) et les assurances à l’international, est évalué à 4,47 milliards au 1er semestre 2017, 3,84 mds au même semestre de 2016.Ainsi le poste services souvent oublié a représenté entre 2010/2016 entre 10/11 milliards de dollars/an et devrait s’établir avec la même tendance à 10 milliards de dollars fin 2017. Le poste transferts nets (dons, retraites et pensions…), s’est élevé à 1,48 mds usd, en hausse de 7,01% par rapport au 1er semestre 2016, dans un contexte de légère dépréciation de l’euro face au dollar. Quant au solde du compte capital et opérations financières, il a affiché un excédent de 0,971 md de dollars (contre un excédent de 0,15 milliard au 1er semestre 2016). Concernant le poste revenus des facteurs, comprenant notamment les bénéfices rapatriés vers l’extérieur par les entreprises étrangères activant en Algérie, les bénéfices réalisés par les sociétés algériennes à l’étranger le déficit a diminué à 1,23 mds usd contre 1,31 mds de dollars en raison principalement de la hausse des revenus perçus sur les réserves de change (hausse des taux d’intérêt et plus-values de cession de titres). Comme résultante , le solde global de la balance des paiements de l’Algérie a affiché un déficit de 11 milliards de dollars au 1er semestre 2017 contre un déficit de 14,6 milliards de dollars au même semestre de 2016, selon , le Gouverneur de la Banque d’Algérie, et devrait être proche de 20 milliards de dollars à la fin de 2017 , avec un impact sur le niveau des réserves de change qui seront entre 94/ 97 milliards de dollars fin 2017, si le cours de pétrole de maintient entre 55/60 dollars durant le dernier trimestre 2017.En fin de compte les sorties de de devises, (biens, services et transferts légaux de capitaux) devraient fluctuer entre 55/57 milliards de dollars.
2. Projet de lois des finances 2018 et perspectives du cours du pétrole
2.1-Selon le Ministre des finances, l'économie nationale devra faire face à plusieurs défis à la lumière de la contraction de la liquidité, l'épuisement de l'épargne publique à compter de février 2017, et un recul des réserves de change en raison de l'effondrement des prix des hydrocarbures sur les marchés internationaux ayant conduit à une réduction des recettes et mettant le Trésor public sous pression. Le projet de loi de finances 2018(PLF) se base sur un prix référentiel de 50 dollars le baril de pétrole et des prévisions de change de 115 DA contre un dollar. Le déficit budgétaire est estimé à - 9,2% du PIB et selon le Ministre des finances, la loi donne la priorité au budget de l’équipement qui a connu une hausse de 60%.Le PLF 2018 prévoit des dépenses globales de 8.628 milliards de dinars composées de 4.043,31 mds DA de dépenses d’équipement et de 4.584,46 mds DA de dépenses de fonctionnement. Pour ce qui est des recettes budgétaires elles se situent à un seuil de 6.496 milliards de dinars, contre 5.635,5 mds DA en 2017. 3.688,68 milliards DA sont des ressources ordinaires et 2.807,91 milliards DA ont pour origine la fiscalité pétrolière. Ce qui donne un déficit global de 2132 milliards de dinars. Selon le Ministre des finances, le fonds de régulation de recettes (FRR) pourra à partir de 2019, financer le déficit du trésor public, étant attendu des approvisionnements positifs à compter de 2020 avec des fonds avoisinant 276,4 milliards de dinars. La raison invoquée par le Ministre est que les niveaux des équilibres financiers mondiaux seront moins risqués en 2018, comparativement à 2016 et au premier semestre de 2017 avec l’augmentation du taux de croissance mondiale en 2018 (3,6%). Miser sur une demande exponentielle est un scénario risqué car le monde devrait connaitre de profondes mutations dans sa structure de production et ne s’orientant pas nécessairement vers une consommation intensive d’énergies fossiles classiques. Le gouvernement postule l’hypothèse de la stabilisation des prix du baril du pétrole avec un cours entre 50 et 55 dollars le baril et que taux de croissance de l’économie nationale pour le prochain exercice atteindra, un niveau de 4% en 2018, 4,2% et 4,6% en 2020, sans préciser quels seront les secteurs qui impulseront cette croissance. Par ailleurs ,toujours selon le Ministre des finances, les recettes des hydrocarbures devraient atteindre 34,4 milliards USD en 2018, 38,3 milliards USD en 2019 et 39,5 milliards USD en 2020, et pour les importations de marchandises, contredisant le ministre du commerce elles devraient être de 43,6 milliards USD en 2018, 41,4 milliards USD en 2019 et 40,9 milliards USD en 2020. Ces hypothèses sont –elles réalisables sachant qu’en 2017 le secteur industriel selon l’ONS représente 6% du PIB et que 97% des entreprises de PMI/PME sont peu préparées au management stratégique international et que sans réformes structurelles profondes, il est impossible d’impulser des entreprises compétitives qui doivent reposer sur le savoir. Comme déduction de cet optimisme, les réserves de changes de 102,4 milliards de dollars à fin septembre contre 114,1 milliards de dollars à la fin décembre 2016, s’établiront à 85,2 milliards de dollars à fin 2018, soit l'équivalent de 18,8 mois d’importations, à 79,7 milliards en 2019 et de 76,2 milliards en 2020. Tout dépendra de l’évolution des cours du pétrole et aussi du gaz traditionnel qui représente plus d’un tiers des recettes de Sonatrach. Attention à une vision de court terme car selon le dernier rapport du Wordl Economic Forum regroupant les décideurs économiques, le monde amorce dès 2020/2030 la quatrième révolution économique fondée sur les institutions efficaces, les nouvelles technologies, donc l’économie de la connaissance, et les industries écologiques. Aussi, les pays qui reposent leur développement essentiellement sur la rente des hydrocarbures devraient avoir une attitude mesurée. Le monde s’oriente entre 2020/2030 vers une transition énergétique. Le Mix énergétique devrait favoriser notamment les énergies renouvelables, le parc de voitures fonctionnant à l’essence et au diesel devant substantiellement diminuer en valeur relative, de nouvelles méthodes de construction économisant l’énergie , ainsi que l’efficacité par une révision comme vient de le recommander la banque mondiale des subventions aux énergies fossiles.
2.2- Ce qui m’amène pour éviter toute euphorie à analyser les dix raisons du prix du pétrole à 60 dollars. La première raison, est que le monde est en période d’hiver. La deuxième raison, est la relance certes timide de la croissance de l’économie mondiale en Europe et ie notamment de la Chine et de l’Inde, mais devant être attentif aux mutations du mode de croissance. La troisième raison, est le respect, globalement, du quota des membres de l’OPEP décidé en décembre 2016 à Vienne avec des perspectives de reconduction de l’accord, notamment de l’Arabie Saoudite qui représente 33% du quota OPEP, l’OPEPE dans sa totalité représentant 33% de la commercialisation mondiale, 67% de faisant hors OPEP. La quatrième raison, est l’entente hors OPEP entre l’Arabie Saoudite et la Russie, ces deux pays produisant plus de 10 millions de baril jour. La cinquième raison, est la situation politique en Arabie Saoudite, les bourses ne voyant pas encore clair de l’action du prince héritier dans la lutte contre la corruption, avec la crainte de tensions politiques internes. La sixième raison, est la tension au Kurdistan, cette zone produisant environ 500.000 barils/jour. La septième raison, est le discours du président américain vis, -à-vis de l’Accord avec l’Iran, certes atténué par la position européenne. La huitième raison, sont les tensions actuelles entre l’Iran et l’Arabie Saoudite pouvant engendrer une mésentente au niveau de l’OPEP. La neuvième raison, est que l’Arabie Saoudite a l’intention de vendre 5% de l’Aramco et que le pays a intérêt à ce que le cours soit élevé pour la cotation de l’action et enfin la dixième raison, est la faiblesse du dollar par rapport à l’euro étant passé à plus de 1,20 dollar un euro à 1,15/1,16 dollar un euro . A court terme, els dix raisons invoques précédemment peuvent pousser soit à la hausse ou à la baisse le cours du pétrole, certains facteurs étant plus prépondérants que d’autres. Le Ministre d e l’Energie de l’Arabie Saoudite a fait savoir que le cours souhaitable devrait fluctuer entre 50/60 dollars afin d’éviter l’entrée massive du pétrole et du gaz de schiste US dont les gisements marginaux, qui sont les plus nombreux deviennent rentables à un cours supérieur à 60 dollars, inondant ainsi le marché. Pour le FMI le baril devrait s’établir en moyenne annuelle pour 2018 à 56 dollars.
En résumé, il fau éviter à tout prix de vivre de l’illusion de la rente éternelle et penser en urgence, pour des raisons de sécurité nationale une stratégie de développement hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales, supposant de profondes réformes structurelles, le statut quo et l’immobilisme conduisant forcément à la cessation de paiement horizon 2019/2020. [email protected]
Professeur des universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL-Directeur d’études Ministère Energie/Sonatrach 1974/1979-1990/1995-2000/2007
(1)-sur ce sujet –interview du Professeur Abderrahmane Mebtoul débat 13/11/2017-radio algérienne publique chaine 3 et interview à la télévision internationale Paris France Africa24 le 13/11/2017
Voir contribution Mena/Forum diffusion internationale Amérique-Europe-Asie-Afrique Moyen Orient- –Londres/Bruxelles en deux parties 11 et 13 novembre 2017- by Dr A. Mebtoul « Urgency of a strategic vision articulating the functions of the State, Local Authorities and the Market »