Les partis et acteurs politiques qui ont lâché un petit mot sur la révision de la Constitution à laquelle le président vient de donner le coup d’envoi, se comptent sur les doigts d’une seule main.
Le sujet ne semble pas emballer grand monde en Algérie. L’intérêt manifesté à l’égard de cet immense chantier sous d’autres latitudes est inversement proportionnel à son importance pour l’avenir du pays.
Il y a comme une apathie qui souligne à grands traits un phénomène dangereux : la disqualification de la politique en Algérie. Le «tous pourris», qui s’est incrusté au fil des années dans les esprits des algériens qui ne croient plus à rien aura contaminé même les acteurs politiques censés logiquement s’abreuver des maux du pouvoir pour construire une alternative.
Or, à quoi assistons-nous à présent ? A une démission individuelle et désormais collective de la chose politique. Les partis sont plus occupés et préoccupés par le souci de régler leurs crises internes, souvent fomentées de loin, que d’exprimer leurs idées -si tant est qu’ils en ont- pour tenter de se placer sur la scène politique.
Le pouvoir reste le seul maître du jeu. Il s’est assuré de fait le monopole du débat (plutôt monologue) politique, que la presse se charge de vulgariser et parfois analyser à l’aune de quelques indiscrétions plus au moins informées des bruissements du sérail.
C’est hélas la triste photographie que décline l’Algérie politique où le président de la république, pourtant manifestement diminué, reste quasiment le seul «organe» qui bouge.
La Constitution ? Inutile…
La révision de la Constitution qui est un acte politique d’une haute portée stratégique dans la vie d’une nation est ainsi relégué à un banal fait divers…
Aucun parti n’a jugé utile de diffuser une déclaration ou même poster ne serait- ce qu’un Tweet pour faire connaître sa position sur le sujet.
Le Premier ministre a installé la commission d’experts chargée de rédiger la mouture de la nouvelle Constitution conformément à un ordre de mission du président.
Ce dernier en a fixé les règles du jeu, choisi souverainement les juristes et précisé la marge de manœuvre aux «techniciens» du droit.
La mission se résume prosaïquement à traduire dans un corpus juridique une feuille de route politique telle qu’elle a été conçue par le président sans doute futur candidat.
Les partis en mode «off»
Comme on le voit, il y a risque que le président soit juge et partie dans cette «cuisine» constitutionnelle. Mais face à cette incroyable vacance politique des partis, est-il raisonnable de reprocher demain au chef de l’Etat d’avoir cousu une Constitution à sa mesure ?
Ce serait trop facile pour des formations politiques qui jouissent doucement dans leur hibernation ininterrompue. Mais au-delà de la longueur d’avance que prend le président sur ses concurrents potentiels, ce silence assourdissant sur un texte qui engage le pays sur plusieurs années a de quoi inquiéter sur l’avenir démocratique de l’Algérie.
En se mettant en mode «veille» voire «off», les partis politique et les personnalités nationales auront manqué à leur devoir de relais du peuple. Ils auront failli dans leur mission qui consiste à traquer le despotisme, la soumission et la tentation du monopole.
Plus généralement, ils cautionnent la mise entre parenthèses du destin national et valident, à leur corps défendant, la thèse selon laquelle il n' y aurait pas d’hommes d’Etat en Algérie.
L’algérien de la rue a alors raison de dire : « Qui d’autres, à part Bouteflika ! ».
Ce n’est malheureusement pas tout à fait faux…