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Lampedusa : indignation hypocrite et larmes de crocodile

05-10-2013 21:48  Contribution

Devant les images insoutenables du naufrage du 3 octobre, le monde se réveille en émoi face au drame de Lampedusa. Mais il n'est que la conséquence des choix politiques des dirigeants africains et européens. La responsabilité est partagée.

Des corps de migrants couverts dans le port de Lampedusa, le 3 octobre 2013 - AFP/Nino Randazzo Des corps de migrants couverts dans le port de Lampedusa, le 3 octobre 2013 - AFP/Nino Randazzo

Avec un bilan provisoire qui dépasse les 130 victimes, le naufrage du 3 octobre au large de Lampedusa pourrait bien être le plus meurtrier de ces dernières années. En effet, sur les 450 à 500 immigrants somaliens ou érythréens qui avaient pris place dans l’embarcation, les secouristes ont réussi à ne sauver que 151 personnes.

Les témoins évoquent en particulier d’insoutenables images d’un océan, avec des têtes d’enfants et de femmes flottant sur les eaux. La tragédie provoque une émotion planétaire. Mais, c’est à se demander si cette émotion n’est pas feinte. Parce qu’autrement, cet accident, aussi choquant qu’il puisse être, n’a rien de surprenant. Il est la conséquence de choix et d’attitudes de responsables aussi bien africains qu’européens.

 Pauvreté et déficit démocratique

En cela, il est le résultat de ce que le pape François a récemment appelé le déficit du "sens de la responsabilité fraternelle" de l’"insensibilité aux cris d’autrui". Le drame du 3 octobre est tout d’abord la conséquence logique de la pauvreté et du déficit démocratique qui caractérisent bon nombre d’Etats africains. Les premières causes qui poussent les Africains à se lancer à leurs risques et périls à l’assaut de la "forteresse Europe", ce sont bien les conjonctures économiques difficiles et les persécutions politiques. Or ces causes interpellent directement l’élite africaine en général et sa classe politique en particulier.

La Corne de l’Afrique offre la meilleure illustration de ce sombre tableau. La Somalie et l’Erythrée sont en effet caractérisées par une instabilité politique chronique. Il n’y existe pratiquement aucun embryon d’Etat. Ces deux pays vivent quasiment dans une situation d’anarchie systémique. Ce sont des bandes armées et criminelles qui se sont réparties les territoires qui y font la loi. Sur le plan socio-économique, la situation n’est guère meilleure. A ce propos, il suffit juste d'évoquer les épidémies de famine aiguë qui y sont régulièrement enregistrées.

 L'Occident s’est uniquement préoccupé de ses intérêts

Naturellement, on ne pourrait en vouloir à quelqu’un qui essaie de se sortir des griffes de telles affres. Mais, dans ces drames quotidiens, l’Occident en général et l’Europe en particulier ont aussi leur part de responsabilité. Certes, ceux qui pensent que le Vieux Continent n’est pas fait pour accueillir toute la misère du monde n’ont pas forcément tort. Encore qu’ils devraient se rappeler qu’une bonne partie de cette misère de ce même monde est le fait de ce même Vieux Continent ! Le phénomène a commencé avec la traite négrière et s’est poursuivi pendant les périodes de la colonisation et du néocolonialisme.

Au cours de toutes ces phases, l’Occident s’est uniquement préoccupé de ses intérêts. Pour les obtenir, il a usé de tous les moyens. Y compris les moins recommandables. Bon nombre de conflits et de situations d’instabilité en Afrique ont leurs origines véritables outre-Méditerranée. Pour des raisons très souvent économiques, ils sont prêts à "foutre le bordel" dans les pays qui tentent de leur résister. Le cas libyen peut servir d’illustration. Et maintenant les voilà qui se barricadent, obligeant les immigrants à utiliser des voies détournées et prendre les risques les plus élevés.

Boubacar Sanso Barry in Guinée Conakry Info



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