De ma vie, je n’ai vu le paternel fairequelques pas de danse. C’était ancré dans les mœurs sociales de l’époque dansune grande partie de la société. Au nom de la pudeur et du conservatisme. Sans plus !
Mais toutmioche encore, je l’ai pourtant vu en esquisser quelques pas s’apparentant plusà des sauteries qu’à une danse, au matin du 5 juillet 1962, au rythme d’unechanson patriotique qui grésillait d’un vieux transistor.
C’était dansle vent de la folie festive de l’Istqlal où les gens défilaient parfoultitudes dans les rues ou en grappes agglutinées sur les toits des ‘’2Chevaux’’, sur les bus de la SATA ou ceux de Galiero.
C’était lestemps où les parents nous apprenaient à nous lever à six heures du matin, à l’ouverturede la Radio, pour un long garde à vous en l’honneur de Qassaman.
Délires etdélirium sans fin, au grand plaisir de nous autres bambins !
A l’heure del’édification difficile d’un pays libre, la douce moitié de mon père qu’est mamère se défit de ses deux ‘’chentouf’’ garnis de louis d’or et que quelquesbracelets du même matériau pour répondre à l’appel du ‘’Sondouk ettafdhamoûn’’Caissede solidarité), sans contrepartie aucune.
Les deuxmoururent quasiment dans le dénuement avec comme seule richesse l’amour sincèreet désintéressé porté à leur pays et à la ribambelle qu’ils ont procréé.
Quandsouvent, au plus fort de ma révolte contre l’Ordre perverti depuis, je me sensdéraper, je revois père danser- lui qui n’a jamais dansé- et ma mère donner sesbijoux pour l’Algérie, alors je m’élève au-dessus des hommes afin de mieuxaimer encore mon père, ma mère et leur pays.
C’est un peutout ça l’Istqlal, la fête de papa !