Algérie 1

Icon Collap
...

Ksentini se donne le droit de faire campagne pour Bouteflika

10-12-2013 18:37  Rafik Benasseur

Le président de la commission nationale consultative de défense et de la promotion des droits de l’homme (CNCPPDH), Farouk Ksentini, a ôté aujourd’hui sa robe d’avocat pour se mettre en costume d’un homme politique chargé de farder le bilan du président Bouteflika.

Profitant d’une tribune que lui a offerte une réunion sur le flux migratoire organisé en collaboration avec le Haut Commissariat aux réfugiés (HCR), l’avocat officiel s’est lancé dans un long panégyrique sur l’état des droits de l’homme en Algérie. A cinq mois de l’élection présidentielle, il serait naïf de croire que Me Ksentini, s’est livré sans arrières pensés à cet exercice dont il est si habitué.

D’autant plus que, pour le coup, le président de la commission officielle s’est érigé en la circonstance en jury puisqu’il a décidé, séance tenante, de décerner la médaille des droits de l’homme au… président Bouteflika. Rien n’est laissé au hasard pour un avocat à ce point procédurier. Il faut croire que l’exercice, bien qu’il soit moralement mal vu, en valait la peine à son auteur.

Farouk Ksentini qui, en d’autres circonstances, ne s’empêchait pas de dire crûment ce qu’il pensait des droits de l’homme en Algérie, sait mieux que quiconque la portée politique de son geste dans le contexte actuel. Il ne pouvait alors se priver de tirer profit d’une belle occasion qui s’offrait à lui de signifier qu’il a apporté sa pierre à l’édifice du quatrième mandat en gestation.

Ksentini "décore" Bouteflika

Il rejoint ainsi le défilé des courtisans qui ont à cœur de s’afficher et de dire leur soutien au virtuel candidat Bouteflika. On remarquera ainsi que l’avocat a pris le soin de dater ce qu’il a qualifié de «bond qualitatif» des droits de l’homme en Algérie depuis l'an… 2000. En d’autres termes, depuis l’arrivée de Bouteflika au pouvoir.

Mieux encore, Ksentini a précisé que ce «bond» a été rendu possible «grâce à la promulgation de nombreux textes législatifs dont ceux de la concorde civile puis la réconciliation nationale, le programme de modernisation de la Justice et enfin les projets de réformes politiques et législatives comme la révision de la loi sur l'Information et le texte sur la promotion des droits politiques et civils de la femme».

Les familles des disparus derrière ses murs…

C’est donc la totale aux yeux de Farouk Ksentini qui consent à peine a constater qu’ «il y a encore des carences». Et l'année 2013 a, d’après lui, consacré ce «bond qualitatif» mettant en avant l'élection de l'Algérie au conseil des droits de l'homme de l'ONU. «Une élection à un poste aussi sensible intervient comme un couronnement des efforts inlassables que ne cesse de déployer le président de la République pour la promotion et la protection des droits de l'Homme dans notre pays». Tout est dit ou presque…

A suivre ce raisonnement triomphal de Ksentini, on conclurait que même le Maroc, qui viole les droits de l’homme et torture les militants sahraouis dans les territoires sahraouis occupés, aurait droit à ce genre de satisfecit puisque le royaume voisin a été également élu le même jour au sein de ce fameux conseil des droits de l’homme dont est également membre, au titre du groupe Europe, Israël. Siéger dans ce conseil est donc loin d’être une preuve de respectabilité en matière de respect des droits de l’homme. Mais passons…

Dans sa volonté de plaider la cause de Bouteflika, Me Ksentini s’est attaqué aux rapports accablants des ONG internationales sur la situation des droits de l'homme en Algérie au prétexte «qu’ils ne reflétaient pas la réalité.» Mais la manifestation des familles des disparus aujourd’hui même devant le siège de sa commission est en revanche bien réelle. A moins que Farouk Ksentini ne voit que les droits de l’homme qui l’intéressent…



Voir tous les articles de la catégorie "Focus"