L’information s’est propagée comme une traînée de poudre, et pour cause ! L’ex golden boy algérien, Rafik Abdelmoumene Khalifa, sera enfin extradé du royaume uni vers l’Algérie, annonçait lundi le ministère britannique de l’intérieur.
L’information aura surpris plus d’un. La justice de sa majesté a déclaré que M. Khalifa s’est vu refuser d’interjeter appel devant la Cour suprême le 3 décembre. Il sera alors «extradé dans les 28 jours qui font suite à cette date», souligne le communiqué du «Home office». A la bonne heure !
Les observateurs n’ont pas hésité à évoqué un «bon coup»- de marketing politique évidemment du pouvoir dans sa volonté de requinquer le bilan de Bouteflika à quatre mois de la présidentielle. Les dividendes politiques d’une telle annonce sont effectivement immenses pour le président Bouteflika et son entourage qui auraient à cœur de se laver les mains d’une scabreuse affaire qui a coûté au trésor public plus de deux milliards de dollars.
Sauf que l’affaire est loin d’être aussi simple. Passée l’euphorie, (ou l’onde choc, c’est selon), de l’annonce britannique, le ministre algérien de la justice Tayeb Louh s’est empressé de raboter un peu l’optimisme des uns et la peur des autres. «Monsieur Abdelmoumene Khalifa sera extradé s’il ne dépose pas de recours devant la cour Européenne des droits de l’Homme», a –t-il déclaré aujourd’hui aux journalistes en marge d’une séance en plénière à l’APN consacrée à l’adoption du projet du Code pénal.
Louh doute…
Rien n’est donc acquis, loin d’en faut. Si le ministre assure plus loin que «l’Algérie suit de très près ce dossier et que «les autorités ont entamé déjà les procédures pour accueillir Khalifa », cela ne signifie pas forcément que la procédure va aboutir. Tayeb Louh ne fait qu’entretenir l’illusion -politiquement porteuse- que l’Etat algérien est déterminé à récupérer son «cher» ressortissant.
Aux yeux de l’opinion publique, cela contribue considérablement à farder l’image peu glorieuse de la justice algérienne soumise aux ordres de l’autorité politique. C’est dire que cette affaire semble ne pas dépasser le stade de l’effet d’annonce.
Le précieux Joker de Khalifa
Tout le monde sait que Khalifa Abdelmoumene ne pouvait commettre son terrible forfait sans la protection de personnages haut placés dans la hiérarchie de l’Etat. Des personnages de haut rang, des institutions, des syndicats et même des ministres avaient été arrosés d’argent, de billets d’avions et de cartes de crédit pour soutenir le patron de cet empire en… carton qui a saigné à blanc l’argent les trésoreries des entreprises publiques.
Il est pour le moins aléatoire de croire que tout ce beau monde, dont beaucoup sont encore en postes, puissent se réjouir de l’extradition d’un homme qui pourra les dénoncer publiquement dans un procès public. On comprend mieux la précision de Tayeb Louh que si Khalifa saisit la Cour européenne, son extradition sera ipso facto annulée.
Et il serait naïf de croire que l’ex milliardaire va se priver d’user de ce joker que lui offre le droit Européen pour éviter de tomber entre les mains de la justice algérienne. Autant dire, que si extradition il y aura, cela ne se fera pas avant quelques années encore. Le temps que l’affaire soit «politiquement» classée et que ceux qui y sont mêlés, soient hors d’atteinte et ne soient plus aux commandes.