l'Algérie veut-elle récupérer l’argent volé et placé par la «Issaba» dans descomptes bancaires en Suisse durant les vingt ans de règne de Bouteflika ?
Pourbizarre qu’elle puisse paraître, cette question n’en est pas moins pertinentetant le sujet ne suscite plus de débat en Algérie voire ne fait plusl’actualité.
Tout cequ’on sait de cette affaire de fric pourri c’est cette petite réplique duprésident Tebboune aux journalistes qui l’interrogeaient au soir de sa victoire :«Ne vous en faites pas, je sais où est cet argent et je sais comment lerécupérer ! », lance-t-il, l’air rassurant. C’était le 12décembre 2019. Le président s’était excusé de ne pas en dire davantage sur sonplan pour récupérer cet argent de peur d’un «contre plan» despropriétaires de ces comptes. Depuis, motus et bouche cousue.
Maisvoilà que ce sont les Suisses eux-mêmes qui montrent la voie au président s’ilveut vraiment rapatrier cet argent sale sans craindre un «contre plan» des hommes de l’ancien système.
Eneffe, le journal Suisse Le Temps a publié lundi un long article dans lequel ils’interroge si les nouvelles autorités algériennes sont réellement disposéesà entreprendre les démarches officiellesauprès de leurs homologues helvètes pour mettre la main sur le magot.
Lejournal constate que malgré la démission du président Bouteflika il y aun an, la «Suisse n’a pas procédé au moindre blocage de fonds algériens.Berne attend toujours une demande d’entraide judiciaire de la part du nouveaupouvoir à Alger».
LeTemps souligne en effet qu’Abdelaziz Bouteflika n’a pas seulement fréquenté lescliniques et hôpitaux de la région lémanique mais il était aussi «client desbanques helvétiques.»
L’exemplede l’Egypte et la Tunisie
Depuis,lit-on encore, «les appels se sontmultipliés en Algérie mais aussi en Suisse pour que le Conseil fédéral bloqueles fonds supposés de l’ancien régime, comme il l’avait fait après la chute duprésident tunisien Ben Ali, puis de son homologue égyptien Moubarak, tous deuxemportés par les Printemps arabes de 2011».
Lequotidien Suisse rappelle qu’une «petite partie» des sommes saisies dans lescomptes de Moubarak et Benali et leurs hommes de main, ont été depuis «restituées aux deux pays concernés».
Pourquoidonc l’Algérie peine a récupérer son argent ? Le journal s’interroged’autant plus que depuis 2016, la Suisse s’est dotée du cadre juridiquenécessaire pour saisir préventivement les fonds suspects de potentats afin depréserver la réputation de sa place financière.
«Il faut notamment que le changement depouvoir dans le pays d’origine des fonds soit inexorable», explique DanielTrajilovic, avocat chez Resolution Legal Partners à Lausanne. En creux, ilsuggère que la Suisse attend une demande expresse d’Alger.
«LaSuisse ne veut pas empiéter sur la souveraineté d’un autre Etat si ce dernierne s’est pas effondré», souligne Daniel Trajilovic.
Cettecondition qui n’est pas remplie s’agissant de l’Algérie selon l’avocat estimant que le président Abdelmadjid Tebboune, «estloin d’avoir fait table rase de l’ancien régime».
«Preuveque l’Algérie n’a pas encore changé en profondeur, les manifestants continuentde réclamer chaque semaine la libération du pays», renchérit l’avocatalgéro-suisse Lachemi Belhocine.
Laboite de pandore ?
Il y apourtant une solution toute simple selon le journal et qui consiste à ce que l’Algériedemande l’entraide judiciaire à la Suisse pour récupérer les présumés milliardsde dollars volés, comme l’a signalé son ambassadeur à Alger.
«Bernevient d’ailleurs de signaler qu’elle était prête à coopérer en cas de demanded’entraide» écrit le journal Le Temps.
Le gouvernementTebboune va-t-il saisir la perche que lui tendent les Suisses ? «Je necrois pas qu’il y a la volonté politique (…) car ce serait ouvrir la boîte dePandore et creuser jusqu’à mettre en cause des personnalités jusqu’iciintouchables», tempère Lachemi Belhocine.
Lepolitologue Hasni Abidi, lui, veut croire qu’il est enfin possible de récupérerces sommes colossales des dirigeants algériens qui sommeillent paisiblement dansles coffres Suisses en mettant en avant la chute des cours du pétrole qui vont«plomber le pays».
«L’Algérieest en difficulté financière et le président Tebboune sera tenté de rapatrierles fonds à l’étranger» dit-il. En attendant, le sujet qui fait leschoux gras des médias Suisses, est hors sujet en Algérie.