L’ex chef du gouvernement Mouloud Hamrouche a une nouvelle foisrompu son silence pour dire ce qu’il pense de l’actualité politique et lafeuille de route du président Tebboune. Dans une contribution publiée ce jeudipar les journaux El Khabar et El Watan,Hamrouche s’est bien gardé de citer des noms et personnaliser la crise.
Pour autant il porte un regard critique sur la gouvernanceactuelle et souligne l’importance des contre-pouvoirs pour asseoir la démocratie.
«Une gouvernance nationale, au-delà des dogmes, estl’ensemble de ces mécanismes et pratiques de pouvoirs et de responsabilités, decontre-pouvoirs, d’habilitations, de vérifications et de contrôles. Ladémocratie, par-delà la définition la plus usitée ou la plus admise, n’est pasune idéologie ni un état statique ni une situation chancelante, mais unprocessus dynamique de gouvernement, d’action, de protection et de contrôle» écritMouloud Hamrouche.
Et de mettre le doigt dans la plaie ens’interrogeant : «Que pouvons-nous faire, nous Algériens, devant detels retards, déficits et hiatus ; face à de tels défis et de telles exigences? Une situation de vide politique et organisationnel outrageant qui risque denous engloutir» estime –t-il.
Pour l’ex chef de l’exécutif sous Chadli, «aucunestructure politique ou institutionnelle n’est réactive et crédible, hormis lesforces de sécurité et les administrations pérennes et territoriales(instruments de la loi)».
De la même il pense «qu’aucune force partisane ouorganisation syndicale ne jouit de légitimité organique avérée ni dereprésentation sociale évaluée, y compris celles qui s’auréolent de mythesrévolutionnaires ou se flattent de leurs rôles et apports passés».
Hamrouche ajoute également «qu’aucune structureéconomique et financière non plus n’est capable d’impulser ou de peser demanière décisive sur le devenir économique du pays. Notre pays a ardemmentbesoin de mobilisations et de solidarités».
Quelle est donc le remède miracle pour guérir le malalgérien ? L’ex candidat à la présidentielle de 1999 qui a choisi de jouerle «conseiller» plutôt que de s’engager dans l’action politique, estime que l’Algérie à «besoin d’un Etat fort et d’un Exécutifrésilient».
Pour lui, «l’armée nationale, à l’instar des arméesqui comptent, a besoin de cohésion et d’harmonie dans ses seuls invinciblesboucliers, le peuple et son espace. Peuple et espace l’avaient prouvé durantles mois du hirak» écrit –il.
Nécessaires contre-pouvoirs
Mouloud Hamrouche en veut d’autant plus que le moment,dit-il «nécessite ces exigences vitales pour une gouvernance nationaleagissante. D’autant que notre crise de légitimité et d’inefficacité s’estnourrie de crises successives de déception et d’échec répété. Ces gâchis, ceséchecs recommencés et ces perversions révélées devant des tribunauxn’autorisent plus aucun redressement ni aucune réforme».
Quid du projet de la révision constitutionnelle ? «UneConstitution est un document qui régit la vie de la société, des individus etdes groupes, organise et protège les pouvoirs et le territoire, mais nullementun bail de pouvoir» professe Hamrouche
Et d’ajouter : «Un pouvoir s’énonce et s’organise par laConstitution et s’exerce par mandat validé par scrutin inscrit dans un ordreinstitutionnel et électoral souverain pour tout dirigeant et tout élu. Si laConstitution représente la souveraineté constituante du peuple, la gouvernance,elle, est une volonté souveraine conjoncturelle des électeurs».
Bien qu’il ait soigneusement évité de critiquer le projet derévision de la constitution de Tebboune, il est loisible de deviner la piqueaigre douce de Mouloud Hamrouche.
«Notre peuple et son espace nécessitent une Constitution quiatteste de leur indéfectible lien, de leur souveraineté, de leurs attachementset de leurs aspirations. Une Constitution qui les libère et les protège detoute crainte, toute incertitude, de toute hypocrisie, de toute violence et detoute soumission», explique –t-il.
M. Hamrouche qui a été reçu par le président Tebboune dans lecadre de ses consultations avec les personnalités nationales, semble lancer desmessages allusifs aux concepteurs de la mouture finale en rappelant l’alpha etl’oméga d’une constitution. «Une Constitutionqui leur permet (le peuple et son espace NDLR) de défendre leurs libertés, de garantir leursouveraineté, d’assurer leur sécurité et leur droit à exister» écrit –t-il.
Et à Mouloud Hamrouche de mettre le pouvoir en garde contre latentation de «Continuer à vouloir agir en dehors de la conscience nationalealgérienne, sans un engagement politique, hors tout processus et tout contrôle,hors toute implication et structuration de l’opinion publique».
Pour lui, cette démarche ne ferait que «nourrir le statu quo etses désastreux résultats, maintenir les fragilités, aggraver les fractures etretarder la réflexion sur les grandes questions nationales, leurs solutions etleurs résolutions».