Le communiquédu ministère des Affaires étrangères mettant en accusation la presse nationalepour avoir fait écho «demanière sensationnelle, à des propos attribués à des personnes connues ou mêmeanonymes», a choqué dans les rédactions. C’est logique et c’est mêmelégitime.
Nos amis des Affaires étrangères nous ont surpris par cetexte très étrange. A moins qu’ils aient ressenti, soudainement, un brin denostalgie aux pratiques des années 70 et 80, car rien, absolument rien, ne justifie cetteleçon maladroite de déontologie.
Comment peut-on reprocher aux médias nationaux de reprendreles contenus des rapports, des commentaires, des déclarations de personnes etd’organismes internationaux dûment identifiés, qui plus est, sont librementconsultables sur la Toile ? La chose s’apparente à une tentative de cacherle soleil avec le tamis comme l’enseigne la sagesse populaire.
Abstraction faite de la pertinence et la crédibilité de cesappréciations, elles restent une «matière médiatique» digne d’être servie auxlecteurs, auditeurs et téléspectateurs. Le journalisme consiste précisément àproposer à l’opinion des informations sourcées -et non anonymes- même si ellesne caressent pas dans le sens du poil.
C’est la règle du jeu. Sinon, on n'est plus dans le journalismemais dans la propagande qui exclut toute vision critique en orientant sciemmentle récepteur. Le ministère des Affaires étrangères ne peut pas ignorer que noussommes bien en 2017 ; à l’âge 2.0.
A l’ère des réseaux sociaux qui font fureur dans le mondeentier, et où les nouvelles se répandent, en audio et en vidéo, à la vitesse del’éclair, la démarche du département de Ramtane Lamamra est presque risible.
Recourir à ce genre d’Oukase pour «corriger» lesjournalistes «coupables» de relayer des substances informationnelles jugées toxiques, parait hors du temps. Le communiqué du MAE est déplacé, limite injurieux en cequ’il prend les algériens pour des attardés mentaux qui ne savent pas séparerla vérité des faux semblants.
Ce ministère régalien doit savoir plus que nous tous, que lemonde a changé et que l’Algérie est tenue de le suivre. Dire aujourd’hui que lemonde est un village planétaire est presque désuet. C’est du has been…
Il est dans son bon droit de défendre l’Algérie, ses cadresétant d’ailleurs pour cela ; mais pas pour insulter l’intelligence des journalistespour qui, rien ne se cache, tout se sait bon gré ou malgré M. Ramtane Lamamra et ses collaborateurs.Faut arrêter cette infantilisation des professionnels des médias incompatibleavec la prodigieuse évolution des moyens d’information.
Plutôt que planter le couteau dans le dos de la pressealgérienne, le ministère des Affaires étrangères, sera mieux inspiré del’informer et si besoin la sensibiliser et l’orienter, en temps réel, sur tousles dossiers qui agitent la diplomatie algérienne.
La sécurité nationale est une affaire de tous. Le moindre desrespects à témoigner aux journalistes c’est de les associer à approcher cetidéal d’une Algérie libre, démocratique et sereine. Ne pas le faire, ouvreforcément la porte aux «appréciations spéculatives et tendancieuses» quele MAE dénonce par voie de…presse. Et les médias n'y seront pour rien.