Dans le blanc des yeux, lepolitologue et universitaire français, OlivierLe Cour Grandmaison, a qualifié samedi de «crime contre l'humanité» lesmassacres commis par la police française contre des Algériens sortis manifesterpacifiquement le 17 octobre 1961 à Paris contre un couvre-feu discriminatoiredes autorités françaises.
Grandmaison a affirmé que ceux quiont été ainsi, assassinés «l’ont été pour des motifs politiques et raciauxen exécution d’un plan concerté», a-t-il asséné, dans un entretien donne,samedi, à l’Aps.
Passant pour être l'un desspécialistes reconnus des questions liées à l’histoire coloniale française enAlgérie, il rappellera qu' «à l’origine de ces rassemblements pacifiquesappelés et organisés par le Front de Libération nationale (FLN) à Paris et dansla région parisienne, se trouve un couvre-feu discriminatoire et raciste imposépar le préfet de Police Maurice Papon avec l’aval de son supérieur, le ministrede l’Intérieur, Roger Frey, et le soutien du gouvernement».
Un couvre- feu qu’il qualifie de «sinistreexemple de racisme d’Etat, qui interdisait à ceux qu’on appelait alors les ‘’Françaismusulmans d’Algérie’ de se déplacer entre 20h30 et 5h30, de circuler en voitureet de marcher en groupe sous peine d’être arrêtés».
C’est donc pour protester contre cecouvre-feu que le FLN décide d’appeler à des rassemblements en différentslieux de la capitale, a-t-il rappelé, citant les travaux majeurs du regrettéJean-Luc Einaudi, qui avait le premier estimé à des centaines le nombre devictimes algériennes assassinées alors par la police française.
Il ne manquera pas de noter que certains manifestants «furentexécutés sommairement, y compris jusque dans la cour de la Préfecture dePolice, d’autres précipités dans la Seine ou battus à mort après leurarrestation et leur transfert au parc des Expositions et au stade Coubertin,transformés à cette occasion en centres de détention», dénonce-t-il.
Et de poursuivre que «Peu de tempsauparavant, M. Papon avait tenu ces propos: ‘’Pour un coup reçu, nous enporterons dix’’. Ainsi fut fait le 17 octobre 1961, dans un contexte où latorture, les disparitions forcées et les exécutions sommaires étaient monnaiecourante en métropole», a-t-il déploré, relevant encore qu’à cela s’ajoutait«plus de 14000 arrestations, soit près d’une personne sur deux »,souligne l’historien, qui estime que cesrafles étaient sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Sur un autre registre, Olivier LeCour Grandmaison, note la «pusillanimité»des gouvernements et présidents françaissuccessifs de reconnaître les massacres du 17 octobre 1961 à Paris.
«Depuis 1991 et plus encore en 2001,date de la mise en place d’un collectif unitaire réunissant de nombreusesassociations, organisations syndicales et partis politiques à l’occasion de laquarantième commémoration de ces massacres, ce collectif demande aux plushautes autorités françaises de reconnaître qu’un crime d’Etat particulièrement terriblea été commis alors », a- t- il tenu à rappeler, faisant observer que, «jusqu’à présent, iln'y a que l'ex-président François Hollande qui s’est contenté de qualifier cequ’il s’est passé de ‘’sanglante répression’’» ce qui est, selon aux yeuxdu politilogue, «très en-deçà de la réalité et des revendications ducollectif», dira- t- il.
L’universitaire français a, néanmoins,relevé qu’au niveau local, de nombreuses initiatives ont étéprises, citant comme exemples l’érection de stèles à la mémoire des victimes,plaque commémorative au Pont Saint-Michel à Paris, boulevard du 17 octobre 1961à Nanterre, square du 17 octobre 1961 à Givors, au moment où des rassemblements se sont désormais étendus àde très nombreuses villes françaises.
Pour lui, «cela ne fait que souligner plus encore la pusillanimitédes gouvernements et présidents de la République, qu’ils soient de droite ou degauche. Tous refusant de s’engager plus avant», a-t-il regretté.
Et de conclure qu’ «En cesmatières, le président actuel Emmanuel Macron "se comporte comme sesprédécesseurs, sans doute pour ne pas heurter un électorat de droite qu’ilcourtise de façon régulière désormais en vue des élections présidentielles quiapprochent».