La "dhikra" (le souvenir, la commémoration) de Sidi cheikh Mohamed Soufi, le fondateur de la confrérie Qadirya Soufia, aura lieu le vendredi 15 septembre prochain, à Souk-Tleta dans la daïra de Bab El Assa (wilaya de Tlemcen). Cette cérémonie religieuse est organisée par l’héritier et guide actuel de cette zaouia, cheikh Sidi Abdelhafidh Soufi.
Un millier de "fuqaras" (disciples) sont attendus à Souk-Tleta ce jour-là, des invités venus de toute l'Algérie et même de France. Nichée au pied de la montagne de Zandal, au milieu d'un paysage rude mais propice à la méditation, "cette zaouia, nous confie Ali, (venu spécialement de Paris pour l'événement) a une vocation d’éducation spirituelle, et cette "ziara" du cheikh, le 15 septembre prochain, signifie pour nous, un moment de présence divine, car nous considérons notre guide comme un "ârif bi Allâh". Nous sommes attachés à lui par une "bay’a" (engagement) et nous pratiquons sous son autorisation ("idhn") le "dhikr" (les invocations au Seigneur) de la confrérie".
"Cette rencontre religieuse du 15 septembre, ajoute Ali, nous permettra de vivre auprès de notre maître spirituel, la "hadhra" (danse extatique) qui est pur moment de joie spirituelle. C'est également une voie vivante, dans le sens où nos pratiques de "tasbîh", nos séances de "dhikr" et la "hadhra" nous transforment de l’intérieur et nous apprennent à vivre l’Islam selon le modèle prophétique Mohammedien".
Le fondateur de la confrérie, cheikh Sidi Mohammed Soufi, est né en 1914 à Souk-Tleta, dans l'extrême-ouest oranais. Très jeune, il apprit le Saint Coran et grandit en milieu rural dans une famille pieuse. Durant la guerre de Libération, il fut emprisonné pendant 3 ans, dans les geôles coloniales. En 1937, à l'âge de 24 ans, il fit son entrée dans le monde mystérieux du soufisme alors qu’il était étudiant auprès du faqîh malikite et ascète Sidi Abdel Qâdir Boutchich. Accompagnant un jour celui-ci, lors d'une visite rendue à son frère Sid Boumediene Boutchich, dans la ville d'Ahfir au Maroc, un événement marqua ses premiers pas dans sa quête initiatique et mystique.
"Lorsqu’ils arrivèrent chez Sidi Boumediene Boutchich, raconte Ali, celui-ci observa Sidi Mohammed Soufi et lui demanda : "Comment t’appelles-tu ?". "Mohammed" répondît-il. "Et quel est ton nom de famille ?". "Soufi" répondît le jeune homme. Cheikh Sidi Boumediene eut alors cette réponse concise mais pleine de promesse :"Ton nom est celui de ta station spirituelle". "Soufi", le "purifié", par la grâce de Dieu".
"Il lui sera alors ouvert, nous dit Ali, toutes les grâces et il sera investi de la noble autorisation d'éduquer les âmes, du vivant de son maître. Lors de son dernier voyage à La Mecque en 1953, son maître Sidi Boumediene Boutchich éleva une prière en sa faveur :"Que Dieu fasse de lui un "ârif" qui conduise au Seigneur".Cheikh Sidi Mohammed Soufi consacra sa vie à la servitude auprès de Dieu, à l’éducation et à la purification des cœurs conformément à la voie qâdiriyya. Il rejoindra le Très-Haut, le soir du 7 février 2004 et sera enterré dans sa zaouïa, deux jours plus tard, après la prière du dhohr. L’évènement marqua tous les disciples de la confrérie qui se sont réunis en nombre, et la famille recevra les condoléances de la part du président Bouteflika qui mentionna l'engagement du défunt contre le colonisateur.
"La voie qâdiriyya qui a inspiré Sidi Mohammed Soufi, consiste en l’enseignement des convenances vis-à-vis de Dieu et vis-à-vis des gens ainsi que les nobles caractères (makârim al-akhlâq) nous rappelle Ali, ce disciple de la zaouia, venu de sa lointaine banlieue parisienne. "Tout l’enseignement du soufisme, conformément à celui du Prophète (paix et bénédiction de Dieu sur lui) vise à parfaire ces nobles comportements".
"Au-delà des actes d’adorations que l’initiation impose ("al-wird") et qui est le cœur de la relation de maître à disciple, l’enseignement vise à réaliser et parfaire "el- akhlak". On passe alors du "takhalluq" au "tahaqquq". Malgré le respect des actes d’adoration et le respect de la sharî’â (la loi), nul ne peut atteindre la station de la servitude ("al-‘ubudiyya") sans la dimension de l’éthique ("al-akhlâq") : "Celui qui te dépasse en moralité, te dépasse dans le soufisme". Un célèbre hadîth témoigne de cette dimension essentielle en Islam, abandonnée de nos jours : "Je n’ai été envoyé que pour parachever les nobles caractères".