Les services de la Présidence de la République publient un communiqué, après chaque réunion périodique du Conseil des Ministres.
Le premier Conseil des Ministres présidé par le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, s’est tenu le 05 janvier 2020.
Une nouvelle appellation du Président de la République, a été consacrée depuis cette date dans les communiqués du Conseil des Ministres, en l’occurrence, « Le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, Chef suprême des forces armées, Ministre de la défense nationale, a présidé… » ou « Le Conseil des Ministres a tenu le….sa réunion périodique sous la présidence de M. Abdelmadjid Tebboune, Président de la République, Chef suprême des forces armées, Ministre de la défense nationale ».
Cette nouvelle appellation n’était pas usitée au cours de la période de l’ex-Président de la République. Une autre formulation était consacrée : « Son Excellence, M. Abdelaziz Bouteflika, Président de la République, a présidé… »
Cependant, au-delà de la formulation et s’agissant de la présidence du Conseil des Ministres, il est à relever cette insistance et cette volonté des services de la Présidence de la République de vouloir « magnifier » le Président de la République, de l’encenser par une appellation qui ne correspond nullement à la Constitution, ni aux valeurs républicaines et démocratiques.
D’ailleurs, et en se référant au guide des usages et du protocole, on retrouve à la Fonction : « Président de la République », Appellation : « M. le Président de la République », et quand on s’adresse à lui : « Monsieur le Président ».
Maintenant et c’est l’essentiel, en se basant sur la loi fondamentale de notre pays, la Constitution, il est clairement précisé dans les dispositions de son article 91/1er et 4ème tirets, ce qui suit :
« Outre les pouvoirs que lui confèrent expressément d’autres dispositions de la Constitution, le Président de la République jouit des pouvoirs et prérogatives suivants :
1-il est le Chef suprême des Forces Armées de la République ;
4-il préside le Conseil des Ministres ».
Ainsi, l’une des prérogatives du Président de la République est de présider le Conseil des Ministres, indépendamment de son autre prérogative de Chef suprême des Forces Armées de la République et de son exercice volontaire de la fonction de ministre de la défense nationale. Aussi, l’appellation « Le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, a présidé… », suffit amplement sans chercher l’emphase, car, en cette seule qualité et quelle qualité!, il est le garant de la Constitution, incarne l’unité de la Nation et exerce la magistrature suprême dans les limites fixées par la Constitution (articles 84 et 86 de la Constitution).
Sa prérogative de Chef suprême des Forces Armées de la République n’a aucune relation avec la présidence du Conseil des Ministres. En effet, le Président de la République agit en sa qualité de Chef suprême des Forces Armées de la République, quand il prend des décisions qui concernent l’Armée Nationale Populaire.
De même, sa qualité de Ministre de la Défense Nationale ne peut aucunement être soulevée, lorsqu’il préside le Conseil des Ministres, car la Constitution a donné au seul Président de la République le pouvoir de présider le Conseil des Ministres.
Le Président de la République qui cumule la fonction de Ministre de la Défense Nationale use de cette deuxième fonction, lorsqu’il décide dans les affaires relevant de l’administration militaire.
L’appellation « Le Président de la République, Chef suprême des Forces Armées, Ministre de la Défense Nationale », ne devrait être utilisée que lorsque le Président de la République prend des actes ou des décisions concernant l’institution militaire.
En conséquence, les services de la Présidence de la République devraient se conformer strictement à la Constitution et rédiger ainsi qu’il suit le début du communiqué sanctionnant la réunion périodique du Conseil des Ministres : « Le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, a présidé… ».
Se conformer à la Constitution sans chercher à plaire serait, en soi, pour les services de la Présidence de la République, une rupture avec les pratiques de l’ancien régime et une assise de l’avènement de la « Nouvelle République, forte et respectée », souhaitée par le Président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, qui a demandé à la fin de son discours d’investiture, le jeudi 19 décembre 2019, qu’il soit simplement appelé « Monsieur le Président ».
La stricte conformité à la Constitution et la sacralisation des vertus du travail et de la morale ne devraient être corrodées par aucune autre action subjective.
Colonel à la retraite ZERROUK Ahmed
ex-cadre/MDN