Les algériens ont célébré hier l’AidEl Adha. Mais quelle célébration ! Bien singulière par rapport aux annéesprécédentes. Car en plus du Coronavirus, qui s’est invité cette année et avec lequel lesalgériens commencent à apprendre à vivre avec, lacanicule était également au rendez-vous, vendredi.
Sur l’ensemble du territoire, le thermomètreest monté très haut et très vite, avec des pointes de chaleur tutoyant les 43 degrés Celsius, au nord du pays. Quant au sud, c’est déjà l’enfer de Dieu,depuis plusieurs semaines.
Et la vague va persister quelques joursencore, avertit samedi Météo Algérie, qui parle de « plusieurs wilayas placéesen vigilance orange ».
Comme si la pandémie et lachaleur suffocante n’étaient pas de trop,l’eau et l’électricité ont joué leur partition pour bien corser l’ambiance. Laveille de l’Aid, plusieurs quartiers de la capitale ont connu des coupures d’électricité,provoquant un black out pendant unebonne partie de la nuit.
Colère des citoyens
Mais pas qu’à Alger et sesenvirons. Dans d’autres wilayas aussi, à en juger par la colère des citoyens qui a submergé laToile. « La veille de l’Aid, ils coupent l’électricité, c’estcriminel ! » , s’étrangle Souhila,dans la wilaya de Chlef. "C'est totalement inconcevable" répond en écho Hamid de Annaba. Panne provoquée par la surconsommation, avec desclimatiseurs qui ont tourné à plein régime, jeudi soir ou délestage volontaire de la part de la Sonelgaz ?
Les hypothèses ont foisonné sur Facebook. Maispas un mot des responsables de Sonelgaz.
Dans plusieurs wilayas, l'eau a manquéaussi dans la nuit de jeudi et une bonne partie de vendredi. Les robinets ontdéversé des quantités de vent, commedans les années 80, une triste époque immortalisée à jamais par le tube satirique « Dja Lma ! » qui promet derevenir au sommet du hit parade, cet été. Qu’à Dieu ne plaise !
Certes, comme promis, la veille,la SEAL a mobilisé sa flotte de camions citernes pour sillonnerles quartiers de la capital et distribuer aux foyers le précieux liquide. C’estinsuffisant. Mais c’est tout de même un acte à mettre au crédit du ministèredes Ressources en Eau.
D’ailleurs, sur sa page Facebook, le ministreArezki Berraki a « salué les travailleurs du secteur pour leur mobilisation »,ajoutant qu’ « ils sont la fierté du pays ».
Le primat de la religion sur la science
Malgré ce cocktail : maladie,chaleur, panne sèche, les algériens, dansune large majorité, ont tué le mouton, la foi chevillée au cœur, ayant pris le dessus sur la crainte de chopperle virus. Finalement, les médecins qui ont appelé à faire l’impasse sur lesacrifice rituel, en souvenir de Sidna aIbrahim El Khalil, auront prêché dansle désert ! Le primat de la religion sur la science.
Ceci dit, le nombre de moutonstués est un peu moindre que par le passé, parole et foi d’un boucher algérois : « D’habitude, je mobilise jusqu’à cinq équipes pour ladécoupe et on commence de six heures du matin jusqu’à minuit, cette année, c’estun peu moins », s’exprime t-il samedi sur les ondes de la radio, précisantque le prix « est de 25.000 dinarspour un mouton moyen et 30.00 dinars pour une grosse bête », sauf que ces prix ne reflètent pas la réalité, car souvent les prix avaient dépassé largement ceux avancés par ce boucher .
Samedi, lendemain de l’Aid, l’heureest nettoyage et malgré la pénurie d’eau, les traces de sang ontdisparu du paysage alors que le chassé-croisé des véhicules de Netcom n’a pascessé dans les avenues d’Alger depuis lelever du jour pour l’enlèvement desordures.
« En jour ordinaire onprocède à l’enlèvement d’une moyenne de1.000 tonnes d’ordures par jour, mais à l’occasion des fêtes, ça passe dusimple au triple, avec une moyenne de 3.000 tonnes/jour d’ordures à enlever », explique samedi sur les ondes de la radio nationale la directrice de l’information de Netcom qui déplore « l’incivisme descitoyens qui jettent anarchiquement leurs déchets un peupartout ».
La même responsable prévient queson entreprise « ne va pas traiter les toisons », comme par le passé. Qu’en faire alors ? Pourtant danscertains pays ces toisons sont récupérées dans les tanneries pour leur laine etleur peau. Mais chez nous restent-t-ils des tanneries ?
L’Aid El Adha 2020 est donc passé. Samedi est un autre jour. Reste àsavoir si les algériens, au moment du sacrifice du mouton et lors de leursdéplacements familiaux, ont bien ou mal observé les mesures barrières. Réponse dans deux semaines maximum. C’est la période qu’il faut pour l’incubation du virus. Enattendant, croisons les doigts !