Il y a 54 ans, tombait au champ d'honneur à l'âge de 25 ans Ziza Massika, vaillante moudjahida, victime le 29 août 1959 sur les hauteurs de Collo (Wilaya II historique) d'un raid aérien des forces coloniales françaises.
L'ancien appelé du contingent français envoyé en 1957 à Merouana (Batna), René Fagnoni, raconte, dans un entretien à l'APS, sa toute première rencontre avec la famille Ziza grâce à laquelle il mit à profit son statut de civil-secrétaire d'un major pour connaître l'Algérie et se "frotter" à sa population.
"Lorsque je suis arrivé à Corneille (Merouana), j'ai eu tôt fait de savoir que toute la famille du petit homme qui travaillait à la Commune mixte de Corneille, Ziza Ali, était engagée dans les rangs du FLN, ses deux fils Ayèche, médecin colonel de l'ALN, et Maamar, ainsi que sa fille, Massika, engagée dans la wilaya II dans la région de Collo", se rappelle-t-il.
M. Fagnoni, qui travaille aujourd'hui pour un comité de groupe de presse français, se félicite des liens d'amitié qu'il avait noués avec le père de cette glorieuse famille, dont la photo figure dans son livre "Chronique des Aurès" paru en 2006 aux éditions "Art Kange" et présenté comme un "recueil de poésies visuelles" où l'auteur met à la disposition du public ses propres photos souvenirs. Une bonne partie de ces photos figurent aussi dans "L'Algérie en couleurs", de l'historien Tramor Quemeneur et du journaliste et essayiste Slimane Zeghidour, paru aux "Arènes" en octobre 2011.
Ces liens avec la famille Ziza ont également permis, selon Fagnoni, de "sortir de l'oubli" le combat libérateur de Massika. "C'est vrai que je me suis battu pour faire sortir de l'ombre cette glorieuse Chahida tout comme son amie Raymonde Peschard, elle aussi tombée au champ d'honneur, les armes à la main", a-t-il affirmé, indiquant que c'est surtout son frère, Ziza Maamar, qui lui a raconté le parcours héroïque de sa sœur.
"Je n'ai eu de cesse d'en parler autour de moi, notamment aux réalisateurs de la télévision algérienne et aux hommes politiques que j'étais amené à côtoyer" a affirmé M. Fagnoni, qui s'est réjoui qu'après une séquence télévisée consacrée en 2007 à la chahida, il a été décidé de donner son nom à une promotion d'élèves médecins major de l'Armée nationale populaire (ANP).
Dans un article paru il y a quelques années dans la presse, une nièce de la chahida se plaignait du "silence" qui entourait le parcours combattant de sa tante paternelle dont "on ne parle pratiquement jamais", selon elle. "Ce constat m'a choqué d'autant plus que les renseignements que j'ai recueillis là où la chahida a vécu me prouvent qu'elle a été une des plus valeureuses héroïnes de notre pays", a-t-elle ajouté.
Selon M. Fagnoni, "on est, aujourd'hui par le truchement de témoignages tant du frère de la chahida, Maamar, que d'autres compagnons d'armes, loin d'être encore là". "Grâce à ces témoignages, dûment recoupés, une page de Wikipédia, l'encyclopédie universelle sur Internet, est consacrée à cette moudjahida, soutenue récemment par une brillante photographie de cette héroïne, l'une des rares qui subsiste", s'est-il réjoui, se disant "honoré" d'être encore aujourd'hui l'ami de cette "glorieuse famille".
Selon des récits concordants, Ziza Massika est tombée au champ d'honneur en août 1959 suite à une attaque de l'aviation coloniale dans la wilaya II historique. Elle était alors responsable d'un hôpital de campagne où elle soignait des blessés avec une infirmière qui se trouvait avec elle. Aujourd'hui, plusieurs établissements publics dans la région des Aurès portent le nom de cette héroïne de la Révolution de Novembre, immortalisant le combat d'une militante enfin sortie de l'oubli.
Le cinquante-quatrième anniversaire du décès de la chahida Ziza Massika (Sakina) – tombée au champ d’honneur le 29 août 1959 dans la région de Collo – a été l’occasion mercredi passé pour Saïd Abadou, secrétaire général de l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM), d’effectuer un déplacement à Mérouana (Batna). M.Said Abadou devait se recueillir sur les tombes des chouhada de Mérouana, la ville aux deux mille (2 000) chouhada de la Révolution.
Le portrait d’une héroïne
Par la suite, c’est à l’intérieur du CEM filles que le secrétaire général de l’ONM a assisté à une conférence donnée par M. Nezzer Kebaili Messaoud sur la vie et le parcours de combattante, la chahida Ziza Massika. D’après le conférencier, cette fille chaouia des Aurès, originaire de Markunda, lieu situé entre Taxlent et Mérouana, fief des ouled Fatma avec la localité de Cheddi, a délibérément sacrifié sa vie au service de la Révolution armée.
Cette lettrée qui avait réussi à décrocher à Batna son baccalauréat (1re et 2e parties) n’avait point suivi les conseils de son entourage d’aller vivre et de poursuivre ses études en France ou de se marier pour fonder un foyer. Ziza Massika préféra plutôt rejoindre les moudjahidines de l’ALN dans les maquis, sur instigation, semble-t-il de Tahar Touil (Chahid) et Belkacem Ouazzani.
C’est d’ailleurs avec ses copines de N’Gaous (Batna) Meriem Bouattoura et Leila Bouchaoui que Ziza Massika quitta discrétement Mérouana pour rejoindre la ville de Sétif. C’est là qu’elles furent enrôlées et s’intégrèrent dans les rangs de l’Armée de libération nationale. Ziza Massika fut gradée adjudante dans la hiérarchie militaire.
Ces trois Chaouiate servirent depuis comme infirmières dans les maquis de Collo, plus précisément à Ouled Attia, douar ouled Djemâa, sous les ordres de Amar Baaziz (3e zone). Elles ont œuvré côte à côte avec Azouz Hamrouche et Abdelkader Bouchrit, responsables de la santé dans les maquis de Collo.
Quand elles furent affectées aux zones «Une» et «Deux» de l’ALN dans la région de Collo, elles furent placées sous la direction de Lamine Khène (de 1956 à 1958) puis de celle du docteur Toumi Mohamed (de 1958 à 1962) sauf que Ziza Massika tomba au Champ d’honneur en 1959 suite à un bombardement de leur cache, effectué par des avions militaires français.
Certaines sources rapportent que la cache avait été repérée suite à un incendie qui se serait déclaré à l’intérieur lorsque les combattantes préparaient un plat de mahdjouba pour les maquisards. Ziza Massika n’avait que 25 ans. L’on signale que son frère Ayache, médecin, avait eu à soigner des maquisards.
Sur la photo des combattantes ALN de la wilaya II. De gauche à droite: ? - Bellami Khadra - Massika Ziza - Malika Kharchi - ? - Meriem Bouatoura - ? -?
Un autre portrait de Massika
Massika, de son vrai nom Sakina Ziza, est née le 28 janvier 1934 à Merouana (Batna).
Après ses études primaires à Batna, Sakina Ziza poursuit à Sétif en 1950 ses études moyennes de la 4e classe Moderne à la seconde classe M de dans le collège de jeunes filles (actuellement lycée Malika Gaïd). Puis retourne à Batna terminer ses études secondaires, où elle obtient le baccalauréat en 1953.
Elle poursuit ensuite ses études supérieures à l’université de Montpellier en France jusqu’en 1955 (en compagnie de son frère Ayache Ziza) avant de revenir enseigner à Merouana à l'école maternelle.
Elle rejoint Sétif peu avant la grève des étudiants nationaliste en 1956 (avec deux consœurs, Mériem Bouatoura et Leïla Bouchaoui), afin de rallier les moudjahidines en tant qu’infirmière sous le grade de caporal puis celui de sergent au niveau de la région de Collo, à Oued Atia, au douar Ouled Djemaa, sous les ordres de Ammar Baaziz dans la 3e région de la Wilaya II.
Elle collabore activement avec Azzouz Hamrouche et Abdelkader Boucherit, qui étaient à l’époque, responsable de la santé de la 1ère et 2ème région, respectivement sous les ordres de Lamine Khene de 1956 à 1958 et de Dr Mohamed Toumi entre 1958 et 1962.
Elle est tuée lors d'un bombardement non loin de Collo, le 29 aout 1959, près de l'hôpital dont elle était responsable, d`une roquette tirée par un avion.
À l’indépendance, le corps de Massika a été exhumé pour être inhumé auprès de son père Ali Ziza à Belezma, massif montagneux.
Son nom a été donné à une école primaire, nouvellement construite et à un établissement hospitalier à Merouana.
Son nom a été donné une promotion de médecins et de techniciens paramédicaux de l'hôpital militaire de Ain Naadja et également à un domaine autogéré dans la daïra d'Ain Djasser et à une cité dans la ville de Aïn Djasser.
(Aps, La Nouvelle République et divers)