Chaque être humain renferme dans son cœur un cimetière où il enterre ses blessures, où reposent tous ceux qui ont compté dans sa vie et les trous béants que creusent en lui ces tombes ressemblent à des balles de fusil.
Dans le cimetière de son cœur, l’homme habite le nom sacré du père, une maison intérieure mille fois détruite et mille fois reconstruite, un chant venu de loin qui lui servira de sauf-conduit, une sagesse qu’il transmettra à ses enfants.
Dans le cimetière de son cœur, l’herbe qui a repoussé sur les talus a effacé la trace des semelles. Les morts ont pris possession des jardins alentour. La puissance et la gloire sont devenues des coquilles vides.
Dans le cimetière de son cœur, tout ce qu’il a vénéré hier est aujourd’hui devenu factice. Des choses qu’il pensait essentielles se sont avérées sans intérêt alors qu’un simple sourire désormais vaut peut-être plus qu’un royaume.
Dans le cimetière de son cœur, la brise d’automne a fait pencher le haut des cyprès. Lui n’écoute plus que la terrible annonce de l’aube. Mais est-ce bien nos enfants, là-bas, qui nous demandent des comptes ? Ici s’arrête la guerre quotidienne. Ici commence le jugement dernier et la miséricorde.