La réapparition du président de la république dimanche recevant le Premier ministre et son ministre des affaires étrangères est loin d'être une simple coquetterie politique. Certes il est visiblement pas totalement remis de ses ennuis de santé, mais Abdelaziz Bouteflika n'en est pas moins décidé à démentir les pronostics globalement négatifs.
En recevant le chef de la diplomatie Mourad Medelci en compagnie de son Premier ministre et avant eux, le chef d'état major de l'armée Ahmed Gaid Salah, le président lance un message subliminal à ceux qui l'ont vite enterré qu'il est toujours là, prêt a rebondir le moment venu. En l’occurrence, à sept mois de la présidentielle, il a dû juger opportun de s'afficher de plus en plus pour remettre les "médecins" politiques à leurs faux diagnostics.
On amorce en effet la dernière ligne droite avant le scrutin supposé se tenir en avril prochain. Supposé parce qu'il se dit çà et là, que l'élection présidentielle n'est pas forcément évidente quand on sait qu'il va y avoir théoriquement une révision de la Constitution avant. Et cette révision pourrait bien coucher noir sur blanc les deux dispositions phares qui pourraient tout changer : l'instauration de la vice présidence et le passage au septennat.
Ces deux modifications à la Loi fondamentale induiraient presque automatiquement l'allongement de l'actuel mandat de Bouteflika pour le porter à sept ans.
La présidentielle annulée ?
Concomitamment, il pourrait décider d’élever Abdelmalek Sellal au poste de vice-président, qui lui va comme un gant compte tenu de la fidélité à toute épreuve qu'il a témoigné au président durant sa longue maladie. Ce scénario parait de plus en plus probable d'autant plus qu'aucun candidat sérieux, mis part Benitour et Moussa Touati n'ont osé s'afficher publiquement. Ni Ouyahia, ni Benflis ni Hamrouche et encore moins Belkhadem n'ont jugé utile d'entrer dans l’arène alors qu'il se fait déjà tard à une poignée de mois du scrutin.
Et connaissant les mœurs du régime, il est certain que ces présidentiables hésitent de peur de se griller définitivement. En l'absence de parrainages sérieux, ils attendent eux aussi que le ciel algérois s'éclaircisse un peu. Or, c'est un épais brouillard politique qui enveloppe le sérail.
FLN et RND en ordre de bataille
De fait, beaucoup d'observateurs estiment que l'hypothèse d'une succession en douce verrait Bouteflika rempiler pour quelques temps avant de confier les rênes à un homme de confiance. Ce scénario jadis saugrenu, devient au fil des semaines plus au moins crédible compte tenu de cette léthargie politique et cette longue attente de ce que les décideurs vont... décider. Il semble bien que le régime n'aurait, du moins pour l'heure, pas de candidat de rechange à Bouteflika.
L'évolution positive de son état de santé pourrait les faire décider à lui accorder une prolongation de son séjour au palais. C'est en tout cas la lecture qui pourrait être faite des audiences qu'il a accordées aux chefs de l'armée, de la diplomatie et du virtuel vice-président Sellal. Une façon de suggérer aux algériens et aux autres décideurs que c'est toujours lui qui commande même souffrant.
La nature ayant horreur du vide, la carte Bouteflika semble une nouvelle fois jouable même si son état de santé fait de lui dans le meilleur des cas, un président à temps partiel alors que le pays est en proie à des tourbillons cycliques. Il va sans dire que le bombardement de Amar Saadani, à la tête du FLN et la virtuelle intronisation de Bensalah au RND sonnent comme une répétition générale d'un replacement des pions sur l’échiquier pour permettre à Bouteflika de garder les mains sur l'avenir politique du pays.