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Birmanie: quand la junte et Aung San Suu Kyi approuvent les massacres de musulmans par les bouddhistes

28-03-2013 22:38  Abbès Zineb

Les Rohingyas, dont plusieurs milliers ont fui les violences qui ont repris dans l'ouest birman, sont un groupe musulman soumis à des persécutions régulières en Birmanie, qui ne leur reconnapit même pas la nationalité birmane.

Les Rohingyas, décrits par l'ONU comme une des minorités les plus persécutées au monde, sont des musulmans apatrides dont le groupe le plus important vit dans l'ouest de la Birmanie, victimes de multiples discriminations qui ont poussé des centaines de milliers d'entre eux à l'exil (lire : Birmanie : des milliers de réfugiés affluent vers les camps, Birmanie : des violences dans l'ouest font au moins 20 morts et Affrontements sanglants dans l'ouest birman). Le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) estime à 800.000 le nombre de Rohingyas confinés en Birmanie principalement dans trois districts (Maungdaw, Buthidaung et Rathedaung) de l'Etat Rakhine, à la frontière avec le Bangladesh.

La loi birmane sur la nationalité de 1982 spécifie que seuls les groupes ethniques pouvant faire la preuve de leur présence sur le territoire avant 1823 (avant la première guerre anglo-birmane qui a mené à la colonisation) peuvent obtenir la nationalité birmane. Elle les a donc laissé apatrides. Mais les représentants des Rohingyas assurent qu'ils étaient là bien avant cette date. En plus d'être apatrides, ils sont confrontés à d'autres formes de persécutions et discriminations. "Cela inclut (mais n'est pas limité à) le travail forcé, l'extorsion, les restrictions à la liberté de mouvement, l'absence de droit de séjour, des règles de mariage injustes et la confiscation des terres. Les Rohingyas ont également un accès limité à l'éducation secondaire et supérieure, ainsi qu'à d'autres services publics", écrivait le HCR dans un rapport publié en décembre.

Les dangers de l'exode

Cette situation a poussé nombre d'entre eux à fuir l'Etat Rakhine. Deux vagues massives d'environ 250.000 réfugiés chacune étaient ainsi arrivées au Bangladesh en 1978 et en 1991-92, suivies à chaque fois de rapatriements "dont le caractère volontaire était réellement en question", selon l'agence onusienne. Selon le HCR, avant les violences de juin entre musulmans et bouddhistes dans l'Etat Rakhine, quelque 230.000 vivaient au Bangladesh, dont environ 30.000 enregistrés dans deux camps officiels. Les autres "vivent dans des sites informels" et "surpeuplés", où les "conditions sont très difficiles", a indiqué cette semaine Vivian Tan, du HCR. Des responsables bangladais estiment eux à environ 300.000 les Rohingyas vivant dans leur pays, qui les considère surtout comme une charge.

Beaucoup ont donc entrepris ces dernières années le périlleux voyage en bateau vers la Malaisie ou la Thaïlande, dont la marine a été accusée par le passé de les avoir repoussés à la mer. Les garde-côtes du Bangladesh ont également repoussé plusieurs bateaux en juin et renforcé ces derniers jours les patrouilles frontalières pour décourager toute nouvelle tentative. Selon le rapport du HCR de décembre, des centaines de milliers d'autres vivent dans les pays du Golfe (400.000), au Pakistan (200.000) ou en Thaïlande. Mais la nouvelle destination de choix des "boat people" rohingyas est la Malaisie, où 24.000 sont enregistrés auprès du HCR, mais où des milliers d'autres vivraient illégalement.

Ces musulmans sunnites parlent une forme du chittagonien, dialecte bengali utilisé dans le sud-est du Bangladesh. Beaucoup de Birmans, en particulier dans l'Etat Rakhine majoritairement bouddhiste, les considèrent comme des étrangers, des immigrés illégaux venus du Bangladesh et les appellent "bengalis".

Aung San Suu Kyi garde le silence

La député de l’opposition birmane est à présent montrée du doigt au même titre que la junte qui laisse faire. Sa bienveillance à l’égard de l’armée et son attitude vis-à-vis des violences inter-communautaires renforcent les critiques, déjà vives, à son égard.

Aung San Suu Kyi, qui a assisté pour la première fois mercredi aux cérémonies de l’armée, est restée muette sur les événements qui bouleversent le pays. En octobre 2012, la figure emblématique de l’opposition avait observé le même comportement.

Pour certains observateurs, ce silence s’explique par les prochaines élections présidentielles, qui se dérouleront en 2015. Aung San Suu Kyi, qui sera la candidate phare de l’opposition, ne peut se permettre de contrarier la majorité bouddhiste du pays, en condamnant les actes de violences envers les musulmans. De plus, la popularité de la lauréate du prix Nobel de la paix de 1991 est déjà bien mise à mal avec le projet, très controversé, de l’implantation d’une mine de cuivre à Leptadaung (nord de la Birmanie).

Une pseudo démocrate

Dans ce contexte de violences le Prix Nobel de la paix et "démocrate" de salon observe un silence assourdissant. Et comme dit l'adage, qui ne dit mot consent. Ces derniers jours, de violentes émeutes entre bouddhistes et musulmans auraient fait cinquante morts, dans le centre du pays, à Meiktila. Lieux de cultes et mosquées ont brulés par dizaines, même les moines bouddhistes ont perdu leur légendaire sagesse pour se transformer en incendiaires.

(Avec agences)



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