Ali Benflis s’était engagé récemment à ne pas cibler Abdelaziz Bouteflika et avait même exhorté ses supporters à ne pas s’en prendre au président «moudjahid» et «malade». C’était il y a quelques semaines à Msila à l’occasion de l’installation d’une permanence électorale.
Mais il faut croire que la pression a dû être si forte aujourd’hui qu’il n’a pas résisté à la tentation d’envoyer quelques piqûres de rappel en direction du virtuel président-candidat. Ali Benflis qui devait se définir et se positionner était obligé de poser un diagnostic forcément accablant pour Bouteflika.
«La situation politique nationale fait légitimement naître, chez les Algériens, des craintes sur le fonctionnement normal des institutions de la République, ce qui fait courir à notre pays des risques d’instabilité», soutient-il. Ali Benflis fait référence sans doute à la maladie du président et les risques qu’encourt, d’après lui, le pays sous la présidence d’un président diminué physiquement.
L’ex chef du gouvernement attaque ensuite de front Bouteflika en affirmant que «La corruption a atteint des niveaux jamais vus depuis 10 ans». On l’aura compris, Ali Benflis se lave les mains de ce phénomène quand il était partisan du président puisque il prend le soin de n’évoquer que les dix dernières années. Un peu court pour un homme qui a servi successivement comme directeur de la campagne électorale du président actuel, directeur de cabinet puis chef du gouvernement de Bouteflika himself.
Et pour se donner une étoffe de patriote et une carrure nationale, Benflis dénie à Bouteflika le monopole du patriotisme. Il s’en lave les mains «Aucun individu, groupe ou représentant de l’État ne peut prétendre ou détenir le monopole du patriotisme ou être l’unique dépositaire de l’intérêt national ». Dans l’esprit du candidat «libre» son ex parti le FLN sous la houlette de Saadani, n’est pas non plus dépositaire du patriotisme. Mais comme c’est la personne de Bouteflika qu'il cible prioritairement, Benflis proclame que «Le principe de l’homme providentiel n’existe pas en Algérie».
A un moment de son discours, le candidat Ali Benflis a senti qui lui fallait sortir de sa coquille pour porter l’estocade et prendre ses distances d’avec Bouteflika. Il s’emploiera alors à dénoncer la «corruption politique (…) qui garantit l’impunité, altère l’indépendance de la justice et porte préjudice aux finances publiques». Sur sa lancée, Benflis accuse implicitement le chef de l’État de pratiquer le régionalisme et le népotisme. Il a ainsi promis de «combattre le régionalisme, le népotisme et le clientélisme, qui constituent une négation du mérite et des valeurs de l’effort et de l’abnégation».
S’il est vrai que le désormais candidat déclaré à la présidentielle, Ali Benflis ne s’en est pas pris directement à Abdelaziz Bouteflika, force est de relever tout de même qu’il ne lui manquait qu’ à mettre un nom sur les maux de l’Algérie qu’il a énumérés. Cela lui suffira t-il pour capter des voix et d’être dans les bonnes grâces ? Réponse le 17 avril.