Il va falloir peut être se résoudre à vivre une période plus au moins longue de vaches maigres, en tout cas, pas grasses pour les recettes du pays.
Les mauvaises nouvelles sur le «front» des hydrocarbures arrivent l’une après l’autre, comme pour rappeler qu’une économie rentière est condamnée à subir a défaut d’agir.
L’inévitable dévissement des prix du gaz annoncé aujourd’hui par le PDG de Sonatrach, Abdelhamid Zerguine, est assurément une mauvaise nouvelle pour la compagnie nationale voire pour l’Algérie. Pour cause, le gaz et le pétrole continuent de servir 50 ans après l’indépendance d’unique tube digestif à une économie mono exportatrice.
Les lois des finances en Algérie sont réduites à un invariable «chapitrage» des niches de dépenses de l’argent gagné de la vente du pétrole et du gaz. Et il suffit que les cours de l’un ou de l’autre toussent pour que toute l’économie rentière attrape un rhume…
C’est un peu le sens à donner à une inquiétude un peu feinte du patron de Sonatrach qui a reconnu que sa «boite» n’est plus en mesure d’agir sur les prix du gaz pour les maintenir à leur niveau actuel.
Résultat : le gaz algérien devra être cédé à l’avenir à un prix bas. Et ce sont les recettes de Sonatrach qui vont automatiquement fondre comme neige au soleil.
«Notre marge de manœuvre est difficile, car il n'y a pas de reprise économique forte et lorsqu'il n'y a pas de reprise forte, commander le marché n'est pas uniquement l'apanage de Sonatrach», a –t-il avoué à l’APS.
Tube digestif
En d’autres termes, la décrue économique dans la zone euro, notamment, a provoqué une contraction de la demande face à une offre de plus en plus large.
M. Zerguine a affirmé que le Groupe Sonatrach a été débouté par la chambre de commerce internationale dans le contentieux sur le prix du gaz l'opposant à l'italien Edison. Sonatrach, a–t-il expliqué, a perdu cet arbitrage à cause d'une clause dite de «bouleversement» prévue par le contrat de vente de gaz à Edison, contrôlée par le français EDF et qui prévoit une révision à la baisse lorsqu'il y a changement des conditions économiques.
«Les contrats même bien ficelés, accordant des droits à Sonatrach, incluent malheureusement une clause admissible sur le marché de l'énergie et chez tous les partenaires qui consiste à revoir les prix lorsqu'il y a bouleversement des marchés», a-t-il précisé.
Brutale désillusion
Il y a donc fort a craindre un effet boule de neige de tous les clients de Sonatrach. Ils ne se priveront pas d’aller aux tribunaux internationaux pour faire valoir leur droit de revoir à la baisse le prix du gaz dans ce contexte de crise. Sonatrach ne pourra hélas rien faire.
Et ça commence déjà, à en croire Zerguine qui évoque un effet domino. «L’effet domino est là, il n'y avait pas qu'Edison qui a demandé à revoir les prix, il y a aussi l'ENI et GNF (Gas Natural Fenosa)», a-t-il révélé.
On est donc sûr que le gaz algérien sera moins cher au moins à moyen terme. Pour l’Algérie c’est un important manque à gagner tant son économie est financée à 98% environ par la rente des hydrocarbures. Le constat risque d’être encore plus compliqué quand on sait que les perspectives des cours du brut ne sont pas réjouissantes non plus.
L’agence internationale de l’énergie (AIE) nous a même donné des sueurs froides l’autre jour en soulignant dans son rapport de conjoncture qui couvre la période 2012-2018, que les prix du pétrole vont «brutalement chuter» à cause des stocks record enregistrés par les Etats-Unis.
Un tableau de bord qui n’a rien de rassurant pour un pays qui a passé son temps à consommer, sans modération, son énergie pensant que cette bénédiction de la nature va durer ad vitam aeternam. Brutale désillusion.