En ces temps d’incertitudes politiques, les rumeurs, les manipulations et les positionnements provoquent forcément des lectures et projections. Autant l’annulation du Conseil des ministres a donné lieu à un flot d’interprétations et autres conclusions, autant l’apparition de Ali Benflis a forcé les lectures politiques.
En prenant aujourd’hui samedi «possession» de la tribune à un hommage rendu par le bâtonnat d’Alger à leur illustre confrère Amar Bentoumi, Ali Benflis a en effet réussi le «buzz». L’hôtel Hilton où il a pris part à une conférence dédiée à la mémoire de feu Amar Bentoumi, premier ministre de la justice de l'Algérie indépendante, l’ex candidat à la présidentielle de 2004, semblait avoir pris date.
Il s’est offert un discours fleuve digne d’un homme qui pense être promis à un destin national. Les journalistes se sont tous donnés rendez-vous à cette grand- messe des avocats algériens qui, pour la circonstance, ont eu l’honneur de recevoir leurs collègues de la Ligue internationale des juristes démocrates. Certes Ali Benflis ne s’est pas laissé aller à des commentaires politiques dans son discours. Mais en filigrane de l’hommage qu’il a rendu à l’avocat du FLN qui a «légué un immense patrimoine judiciaire et rendu service à la justice et à l’Algérie», Benflis parlait aussi de sa personne. Une fois son laïus terminé, les journalistes se sont naturellement rués vers lui pour demander s’il s’agissait de sa rentrée politique. Malin, l’ex candidat à la présidentielle de 2004, ne voulait pas annoncer la couleur d’entrée.
Recours ou candidat alibi ?
Dix ans après, il semble avoir mûri après la dure mésaventure de 2004 dont il a du mal à en sortir. Pour autant, Ali Benflis a laissé une porte large ouverte à une éventuelle (r) entrée en scène, si d’aventure le président Bouteflika décidait de tirer un trait sur sa carrière politique comme le suggère très fortement son état de santé. Ali Benflis a en effet promis de faire une «importante» déclaration politique dans les prochains jours.
Et compte tenu de son long silence qui aura duré une décade, cette déclaration ne pourrait être qu’une annonce de candidature à la présidentielle. Une déclaration qui devrait, cette fois, prendre le soin, de préciser qu’il ne pourrait se présenter contre la volonté du président d’abord et des décideurs ensuite. Une manière pour lui de se réconcilier avec Bouteflika et amorcer par là même une succession des plus douces où il n'y aurait pas de place à la vengeance.
C’est un scénario parmi tant d’autres qui pouvait avoir justifié ce «retour» de Benflis par la lucarne des avocats d’Alger. De là à trancher qu’il sera le candidat que le régime va adouber, il y a un pas que les observateurs hésitent à franchir. Certains continuent encore en effet de voir Ali Benflis comme un parfait «candidat alibi» qui servirait à crédibiliser un scrutin où le régime aura deux fers au feu comme en 2004.