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60ème anniversaire de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux

14-12-2020 18:05  Contribution

Par Abdelhamid Chebchoub (*)

Dans une contribution envoyée à Algérie1, par Abdelhamid Chebchoub, actuel ambassadeur de l'Algérie àBelgrade, l’ancien DGCID du MAE,  revientsur la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuplescoloniaux dont on  a commémore, hier lundi,le 60e anniversaire.

Il serait utile de souligner quecette contribution a été également publiée, enlangue serbe, dans le quotidien ‘’Politika’’ dans son édition de lundi.

Il y a soixante ans, le 14 décembre1960, l'Assemblée Générale des Nations Unies adoptait la Déclaration surl'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux, plus largementconnue par son numéro de codification en droit international comme la Résolution1514 XV.

L'adoption de cette résolution estvenue comme un cri de révolte lancé par les pays épris de paix et de justice,plus unis dans l'action depuis le sursaut de Bandung, contre le systèmecolonial inhumain qui sévissait encore dans certaines régions du monde,pratiquant l'oppression, l'injustice et le déni de liberté, contrairement auxprincipes énoncés dans la Charte des Nations Unies.

Cette résolution est venue égalementrésonner comme un écho aux luttes de libération menées par les peuples d'Asieet d'Afrique, et que la guerre de libération qui se déroulait en Algérierapportait quotidiennement aux salons feutrés du Palais des Nations Unies à NewYork, les atrocités du colonialisme et les actes de bravoure du peuple algériencontre le colonialisme et sa détermination à l'éradiquer.

Les manifestations du 11 décembre1960 en Algérie, où les algériens sont sortis en masse, bravant les baïonnettesdes forces coloniales pour crier haut et fort leur refus de l'oppression etleur désir de liberté et d'indépendance, intervenant quelques jours avantl'adoption de cette résolution, ont sans doute contribué à dissuader les votesnégatifs et à assurer à cette déclaration une très large adhésion.

Cette résolution avait énoncé lesprincipes généraux et jeté les bases juridiques de l'éradication du systèmecolonial. Elle a servi de cadre juridique aux Nations Unies pour mettre enœuvre la décolonisation des territoires qui étaient administrés par lespuissances coloniales en Afrique et en Asie (Guinée Bissau et Cap Vert, Angola,Mozambique, Zimbabwe (ex-Rhodésie), Namibie, Timor Leste,Papouasie-Nouvelle-Guinée, Belize..., sous l’impulsion vigoureuse et lapression morale de la majorité des Nations, réunies au sein du Mouvement desPays Non-Alignés.

La Déclaration sur l'octroi del'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux reconnait par ailleurs, que lenon accès au droit à l'autodétermination des peuples et de territoirescoloniaux constitue un foyer de tension qui menace la paix et la sécurité internationales.

C'est consciente de cette réalité queL'Organisation des Nations Unies continue de traiter de la question dedécolonisation au sein de la Commission des Questions Politiques Spéciales etde la Décolonisation (Quatrième Commission) de l'Assemblée Générale.

C'est dans ce même souci qu'un ComitéSpécial chargé de l'application de la Déclaration sur l'Octroi del'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux (Comité des 24), crée en 1961reste, à ce jour, saisi des questions de décolonisation.

C'est dire que la décolonisationreste l'un des objectifs des Nations Unies, malgré les tentatives de vidercette déclaration de sa substance, menée essentiellement par les anciennespuissances coloniales et relayées étrangement, par une poignée de responsablespolitiques et de pseudo intellectuels de pays nouvellement indépendants,atteints sans doute du complexe du colonisé, tel que diagnostiqué par FrantzFanon, ou mus souvent par un intérêt personnel, aux antipodes de celui de leurspeuples.

Toutefois, il faut dire que soixanteans après, l'humanité n'a pas réussi à éradiquer totalement le système colonialet à parachever cette œuvre rédemptrice.

Certaines puissances ont décidé dedéterminer les priorités des défis auxquels l'humanité doit faire face, sur laseule base de leurs intérêts mercantiles et de leurs velléités hégémoniques.

Sous prétexte de pragmatisme, ellestentent de frapper d'obsolescence des principes universels, forgés parl'humanité dans sa longue marche vers la paix et le progrès et dont laDéclaration sur l'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux enest l'une des étapes.

Cela cache mal une volonté de faireperdurer, sous une forme plus élaborée, plus globale et "pluscivilisée", les mêmes pratiques du temps révolue du colonialisme.

En effet, des territoires inscritspar les Nations Unies comme territoires non-autonomes et dont le statut finaldevait être déterminé dans le cadre de l'application de la Résolution 1514 XVIont vu le processus de leur décolonisation contrarié du fait de la fuite deleurs responsabilités par les puissances coloniales occupantes, des rêvesd'empires de certains Etats ou de l'immobilisme des institutions des NationsUnies.

Le Sahara Occidental, territoire nonautonome, inscrit comme tel par les Nations Unies en 1963 et qui avait faitl'objet, en 1991, d'un plan de règlement qui prévoyait de permettre au peuplesahraoui d'exprimer son droit à l'autodétermination et à l'indépendanceconformément à la Résolution 1514 XV, reste l’exemple le plus frappant duparjure à la Charte des Nations Unies.

Depuis plus de quarante ans, lepeuple sahraoui attend de l'Organisation des Nations Unies et de son Conseil deSécurité qu'ils assument leurs responsabilités et mettent en œuvre leurspropres décisions concernant ce territoire, dernière colonie en Afrique, parl'organisation d'un référendum d'autodétermination, conformément à laDéclaration sur l'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux.

Cette résolution a prévu lesmodalités et les vois juridiques pour permettre aux pays sous dominationcoloniale d'accéder à la souveraineté. Les tentatives de détourner cette voiepar le recours aux subterfuges protocolaires de l'ouverture de consulatsfactices, le changement de la composante humaine ou la situation économique deces territoires, viendront inéluctablement échouer devant la forteresse dudroit international, seul bastion pour la défense des plus faibles.

Il est évident que la reconnaissanceinternationale de la souveraineté ne se décrète pas par des déclarations dansles réseaux sociaux, comme elle ne se décide pas par les lobbies, aussipuissants soient-ils. Elle résulte de la volonté des peuples et ne peut êtreviable que si elle s'adosse sur les normes légales prévues par le droitinternational.

Il est donc vain de tenteraujourd'hui d'exposer la souveraineté des peuples et des pays coloniaux commeobjet d'échange dans les marchandages de zones d’influence et de domination quirappellent les tractations douteuses de la Conférence de Berlin de 1885 quel’histoire a définitivement condamné.

Par ailleurs, Il est permis des’interroger sur la crédibilité de certains Etats, intellectuels et autresanalystes, relayés par des médias à l’indépendance douteuse, qui se réclamentcomme défenseurs des droits de l’homme, de la démocratie et des libertés, etqui, en même temps, observent le silence, voire même, font acte de complicité,lorsqu’il s’agit de la persistance du colonialisme dans cette région del’Afrique.

Le droit à la liberté et àl'autodétermination étant un droit imprescriptible qui relève des droits del'homme, il demeure, par conséquent, une préoccupation pérenne de l’humanité etun sujet d'actualité.

Ce soixantième anniversaire de la Déclaration surl'octroi de l'indépendance aux Pays et aux Peuples coloniaux devrait interpeller la communauté internationale et les puissances de ce monde et les inciter àfaire de nouveau acte de fidélité aux principes fondateurs de la Charte desNations Unies, et à s'engager résolument dans le parachèvement du processus dedécolonisation, tracé par la Résolution 1514 XVI,  seule voie pour épargner à l’humanité lesaffres des conflits armés, de l’injustice et de l’oppression et de permettre àtous les peuples de vivre dans la paix, la prospérité et l’harmonie.

(*) Ambassadeur d'Algérie en Serbie, ancien DGCID, ancien Directeur-général des pays arabes au ministère des affaires étrangères .




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